Dans un nouvel entretien, le journaliste et auteur Jacob Cohen revient sur les derniers évènements ayant marqué l’actualité maghrébine et française.
Algérie54: Le chroniqueur franco- algérien Mehdi Ghezzar vient d’être évincé par RMC pour avoir souligné dans un plateau d’une chaîne de télévision Algérienne, que le Maroc est dirigé par André Azoulay?
Jacob Cohen: Il est presque surprenant que Mehdi Ghezzar, qui a dû fréquenter les médias français pour arriver à ce poste en vue, n’ait pas intégré les règles non- écrites du système médiatique français. Peut-être a-t-il pensé qu’elles s’appliquaient seulement à l’entité sioniste qu’il ne faut absolument pas critiquer. Mais d’une part le Maroc continue à être l’allié privilégié de l’establishment français, et ce depuis Hassan II et sa fameuse hospitalité marocaine qui s’exerçait principalement dans le luxueux Mamounia de Marrakech et qui enchantait les invités français à coup de cadeaux somptueux. Mais il y avait d’autre part une critique indirecte d’Israël dans ses propos, en mettant en cause le conseiller spécial du roi, un ancien banquier français, un juif qui travaille avec acharnement à la « paix » au Proche-Orient, et aux multiples réseaux aussi discrets que très élevés. Le chroniqueur aurait eu des propos assez durs sur la complaisance royale face à Israël. Le système médiatique français est verrouillé depuis des décennies par des agents d’influence judéo-sionistes (sayanim) qui empêchent toute expression critique à l’égard d’Israël et avec le génocide perpétré à Gaza, ils sont encore plus vigilants et plus intraitables.
Algérie54: Le régime du Makhzen soutenu par la droite et l’extrême droite française semble avoir mis à genoux Emmanuel Macron, qui semble céder au diktat du lobby maroco-sioniste. Quelle lecture faites-vous du revirement du locataire du palais de l’Elysée en faveur du régime néoféodal du Makhzen ?
Jacob Cohen: Le revirement de Macron demeure assez incompréhensible, si on le juge en fonction de critères rationnels. Car enfin qu’a gagné le président français à bouleverser la politique traditionnelle d’équilibre entre l’Algérie et le Maroc ? Il ne tirera pas d’avantages supplémentaires conséquents du côté marocain. Par contre il perdra énormément en froissant le régime algérien. La France peut dire adieu et pour longtemps à des échanges économiques hautement stratégiques, et trouvera sur son chemin un adversaire résolu sur le sol africain. La seule explication d’une telle bévue résiderait dans la volonté de Macron de se soumettre aux désidératas de Washington et de Bruxelles. On l’a vu avec la vente de fleurons industriels aux Américains, au revirement de la diplomatie française face à la Russie, et aux milliards donnés à l’Ukraine au détriment de la population française.
Algérie54: De nombreux marocains sont restés sur leur faim, après la publication de la liste des détenus graciés par Mohamed VI. Une liste où figuraient principalement les détenus liés au trafic de drogue, au grand dam des prisonniers politiques. Qu’en pensez-vous?
Jacob Cohen: Je reconnais ne pas avoir suivi ce dossier dans le détail. J’avais cependant noté que Omar Radi, journaliste d’investigation et grande figure du combat contre la corruption, pour lequel j’ai personnellement une grande estime, a été gracié, ainsi que trois ou quatre autres journalistes ou intellectuels. Je ne savais pas pour la grâce accordée à des trafiquants de drogue. Quant aux prisonniers politiques, je pense à ce pauvre Marocain condamné à 5 ans de prison pour crime de lèse-majesté parce qu’il s’opposait à la normalisation avec l’entité sioniste, je crains qu’ils ne bénéficient d’aucune mansuétude de la part d’un régime qui ne tolère aucune contestation.
Algérie54: La France s’achemine vers une grave crise politique, dans la foulée du rejet du candidat du NFP, comme chef du gouvernement,et l’éventuelle nomination d’une personnalité proche de la droite et l’extrême droite. Ne pensez-vous pas que Macron pousse les choses au pourrissement?
Jacob Cohen: Macron est dans son élément. Un psychiatre italien avait dès 2017 établi un diagnostic sur les fragilités et les tendances psychopathes du personnage, ses sautes d’humeur, ses bouderies, ses coups de tête intempestifs comme la dissolution de l’Assemblée Nationale, qui revenait selon ses termes à « jeter une grenade dégoupillée entre leurs jambes et l’effet que cela ferait ». A l’instar des autres dirigeants de l’UE, Macron se fiche de la France et de son destin. Ces pays perdent de leur souveraine et de leur identité au profit d’un pouvoir étranger qui obéit à des intérêts obscurs. Les nouvelles instances européennes, dès qu’elles seront installées, vont encore détricoter ce qui reste de souveraineté nationale, et Macron s’en ira vers d’autres cieux avec plus de pognon.
Entretien réalisé par M.Mehdi
