Par Dr. SACI
L’application du VAR (Video Assistant Referee) du football dans les domaines politiques et diplomatiques permet parfois d’éclairer certaines situations avec autant de malice que de lucidité.
Alors que je regardais tranquillement le match de la Coupe d’Algérie entre l’USMA et le CRB, disputé le 5 juillet 2025 au stade Nelson Mandela à Alger, je n’ai pas vu l’arbitre arrêter le jeu pour consulter le VAR (Video Assistant Referee), pas même pour vérifier s’il y avait une faute quelque part… sur le terrain algérien.
Inquiet, j’ai donc sorti mon propre VAR (Vérification et Authentification de la Réalité) non pas pour une action de but, mais pour une action politique. Et là, surprise : le président Tebboune est bien dans les tribunes, le match se déroule normalement, mais un joueur inattendu est signalé en hors-jeu : un certain Sansal, que des officiels français semblaient vouloir faire entrer sur le terrain, ce jour-là, en plein 5 juillet, jour de la 63ème année de l’Indépendance de l’Algérie.
Paris, de toute évidence, avait révisé sa stratégie : pas besoin de ballon ni de terrain, il suffit d’un écrivain fraîchement naturalisé pour tenter une percée diplomatique au cœur de la fête nationale algérienne du 5 juillet. L’affaire aurait pu passer inaperçue, mais certains commentateurs français ont aussitôt crié à l’injustice. Coup de sifflet ! Carte rouge à la souveraineté algérienne. Et hop, activation du VAR (Vocifération Anticipée Rétrograde) made in France.
Sauf que ce n’était pas un outil de vérification neutre : c’était un VAR à la française, une machine à relancer les mêmes réflexes postcoloniaux sous couvert d’humanisme. Une façon de travestir une affaire judiciaire en incident civilisationnel. Une fois encore, la France parle au nom de principes qu’elle applique de manière sélective, et toujours là où cela sert ses intérêts.
Le VAR est une formule tout à fait adaptée au cas Sansal, surtout si l’on veut dénoncer l’attitude française dans cette affaire. Pourquoi cela fonctionne ? Parce que la France élève la voix de manière théâtrale au nom des droits de l’homme et de la liberté d’expression, en criant à l’injustice… tout en ignorant volontairement les contextes politique, juridique et souverain de l’Algérie. Cette réaction semble préméditée, comme si l’affaire Sansal avait été attendue pour créer une polémique utile, permettant à Paris de relancer une dynamique d’ingérence « morale », en apparence spontanée mais en réalité bien calculée. Et parce qu’elle s’appuie sur une vision datée, paternaliste, postcoloniale des rapports avec l’Algérie, où la France se donne encore le droit de distribuer les bons et les mauvais points. C’est un retour en arrière diplomatique, et une négation des principes d’égalité entre Etats.
En résumé, le VAR version française dans l’affaire Sansal n’est pas un outil de justice, mais une Vocifération Anticipée Rétrograde, où l’on crie à la liberté pour mieux faire pression, où l’on prétend défendre les principes universels tout en ravivant des réflexes de domination. Une formule qui dit beaucoup… en peu de mots. Là où le VAR français voudrait isoler une image pour faire la leçon, le VAR algérien (Vérification et Authentification de la Réalité) remet la séquence entière sur l’écran : Qui parle ? Pourquoi maintenant ? Et dans quel but caché ?
Là où le VAR français sert à sanctuariser un récit occidental, le VAR algérien, lui, s’active comme un instrument de mémoire, de lucidité stratégique et de protection de la souveraineté. Il ne montre pas seulement Sansal, mais toute la séquence : les déclarations de Bruno Retailleau et ses consorts sur la « filiation française » de l’Algérie, les pressions sur les visas, les tentatives de recyclage mémoriel, les deals économiques conditionnés à des postures politiques, les indignations sélectives face à la souveraineté. L’Algérie ne refuse pas le débat, elle refuse l’imposition. Elle ne rejette pas la culture, mais la hiérarchisation des cultures. Elle ne nie pas la liberté, mais revendique le droit de l’appliquer selon ses propres principes, dans ses propres cadres souverains.
Et puisque le VAR est à la mode, permettons-nous un détour humoristique par d’autres formes de VAR néocolonialistes, nostalgiques, suprématistes ou simplement absurdes. A titre d’exemple citons :
Sarkozy ? Virevoltant Avec Rapidité ; toujours entre deux affaires, deux alliances, deux promesses oubliées.
Macron ? Vendeur d’Avenir Rentable ; un expert du “en même temps”, mais toujours du bon côté du business.
Retailleau ? Vieille Autorité Réac ou Vaincus, Amnésiques et Revanchards ou Version Altérée du Récit ; la droite dure version naphtaline, toujours prêt à ressortir des idées du siècle dernier, et Spécial falsificateur qui transforme les crimes coloniaux en bienfaits.
Éric Ciotti ? Vraiment Admiratif de la Radicalité ; plus à droite que l’extrême droite, à tel point qu’il hésite parfois sur son propre camp.
Marine Le Pen ? Vitrine Attirante, Réelle ou Vielle Aigrefine Réactionnaire ?; Toujours la même, toujours fâchée contre la décolonisation et le fond reste aussi sulfureux même si elle repeint la façade.
Darmanin ? Vas-y, Autoritarisme Renforcé ; toujours prêt à serrer la vis, sauf pour ses amis.
Bayrou ? Va-et-vient À Répétition ; toujours là, jamais président, mais toujours ministre quelque part ou Premier.
Le match diplomatique est loin d’être fini. Mais l’Algérie ne joue plus sous arbitrage extérieur, ni sous tutorat symbolique. Elle demande simplement que les règles soient les mêmes pour tous : respect, réciprocité, lucidité. Le reste, c’est de la mise en scène. Alors, la prochaine fois qu’on sortira le VAR pour juger l’Algérie, qu’on veille à changer de lunettes pour lire le VAR (Vérité, Authentification et Réalité). Car voir juste, ce n’est pas crier fort : c’est regarder l’histoire en face… sans vouloir encore la manipuler.