Par Abdellali Merdaci
Le 7 mai 2022, au palais de l’Élysée, Emmanuel Macron est solennellement investi pour un second mandat à la tête de l’État français. Dans la cohue des invités, Kamel Daoud captive l’attention du président réélu, qui lui demande de se rapprocher au mépris des règles protocolaires. La pittoresque scène n’a pas échappé aux caméramans. Ce Daoud « camusien » (1), grandi dans les bauges de Mesra et d’un journalisme populiste, que revend Emmanuel Macron dans des atours virginaux, est-il sans tache préjudiciable du point de vue des lois et des mœurs d’une France éberluée, qui persiste à ignorer son comportement passé et présent, qui n’est pas un modèle de vertu ? Les Français sont friands de passés décomposés, problématiques et occultés, qu’ils débusquent parfois par le bout de la lorgnette ; ils savent les épingler et les crier sur la place publique. Connaît-on, à Paris, de Kamel Daoud l’envers et l’endroit ? Se rappelle-t-on la figure illuminée du lanceur d’alerte sur les viols arabes de Cologne, ses péroraisons sur le « sexe arabe » licencieux au moment il invite à considérer son récent plaidoyer pour les LGBT+, salué par l’establishment occidental ? Et connaît-on son faciès à contre-jour : islamiste en apprentissage en ses jeunes années, écrivant un récit islamiste et homophobe, auteur non repenti de violences conjugales ? Sur l’ami de Macron, la France persiste à ne rien entendre, lire et voir ; elle se tait et s’enferme dans un silence coupable. Voici les vérités qui devraient faire douter d’une « passion » « camusienne », muée en sordide alibi.
- Le passé islamiste de Kamel Daoud
Assez tôt, au début des années 2010, la présence de Kamel Daoud dans les « halaqate » (pl. de halqa : séance, rituel extatique) islamistes, à Mesra et à Mostaganem, était dénoncée en Algérie, principalement par ses anciens condisciples repentis. Après son adoubement par la France, en 2014, ses amis français, informés de cette fâcheuse chronique, ont fait la sourde oreille. Alain Finkielkraut sur France Culture (2) et Pierre Assouline dans « Le Magazine littéraire » (3) lui ont donné l’occasion de se justifier sur son passage dans les rangs des « jewala » – force paramilitaire islamiste – qui ne vont plus tarder à faire la guerre à l’État et à la société algérienne. Daoud a été dans ces ligues islamistes assez tôt dans l’enfance jusqu’à la veille de son entrée à l’Université, à dix-neuf ans.
S’il ne nie pas les « halaqate », Daoud justifie auprès d’Assouline, son initiation chez les « frères » comme une période d’apprentissage plus culturel que cultuel. Ces années de « frérisme » encadré furent-elles accordées à la seule et innocente lecture d’auteurs soufis publiés par l’éditeur parisien Pierre Bernard (Sindbad) ? Ripolinage de la réalité et mensonge révulsants, insultant la morale des faits ? Les camps clandestins des Frères musulmans, les Algériens le savent, n’étaient pas des havres de paix et d’étude. L’essayiste Mohamed Issami, un des rares spécialistes de la mouvance islamiste en Algérie, a montré avec une absolue précision le fonctionnement de la section des Frères musulmans d’Algérie redevable de la structure originelle d’Égypte, sous la direction de Hassan El Banna et de Sayyed Qotb (4). Relativement aux jeunes recrues, Issami souligne l’existence des « jewala » dans l’organisation des Frères musulmans d’Algérie. Crées par la maison-mère, ces « jewala » algériens, démarquant le scoutisme et son hiérarchisation de grades, proposaient – au strict sens de la locution – une instruction paramilitaire ; ils se sont développés en Algérie depuis les années 1970. Les Instituts islamiques, fondés à la même période par le ministre des Affaires religieuses Mouloud Kacem Naït Belkacem, devaient s’en inspirer dans leurs pratiques physiques et sportives. Mohamed Issami précise que le président Boumediene, qui les soupçonnait de dispenser une formation militaire, les avait dissous en 1977. Comment le « frérisme » mostaganémois, auquel était affilié le jeune Kamel Daoud, aurait-il échappé à la règle générale ? On n’éduque pas chez les Frères musulmans des adolescents, déjà rompus à la clandestinité, pour gloser aimablement la poésie de Saadi, son « Gulistan » (XIIIe siècle), et les préceptes philosophiques éthérés de Hujwirî. Un Daoud, assez tôt, imprégné de soufisme et de la « Juste Voie » ?
Ni Finkielkraut ni Assouline, qui ont aidé Daoud à purger cet engagement islamiste de l’adolescence, ne l’ont considéré comme dommageable. Bien au contraire, dans les colonnes du « Magazine littéraire », dirigé à l’époque par Assouline, cet islamisme est paré de vertu. Ainsi, à seize ou dix-sept ans, encore au lycée, Daoud lisait les grands textes doctrinaux de l’Islam. Ce qui est proprement controuvé et inouï. Aujourd’hui, un docteur des Universités théologiques du pays ne serait pas en mesure d’aborder l’herméneutique de ces classiques des études islamiques et les gloses de leurs introducteurs. En supposant que soit lisible pour un apprenti-égorgeur « jewala », plus préoccupé de ji-jutsi que des thèses de Laoust et Geoffroy-Desmombynes, ce versant de l’islamologie française éclairée.
Affreuse plaisanterie. L’écolier, collégien et lycéen Kamel Daoud était-il vraiment armé intellectuellement pour aborder les textes difficiles d’accès pour le commun des lecteurs de la collection « La Bibliothèque de l’Islam » de Sindbad, comme il voulait le faire croire, en 2015, au « Magazine littéraire » ? Voici quelques titres du catalogue de l’éditeur parisien : Hujwiri, « Somme spirituelle », Ibn ‘Arabi, « La Profession de foi », « Les Soufis d’Andalousie », Ibn al-Jawzi, « La Pensée vigile », Junayd, « Enseignement spirituel », Kalâbâdhi, « Traité de soufisme », Shabestarî, « La Roseraie du Mystère », mais aussi : Jacques Berque, « L’Islam au temps du monde », Jean-Paul Charnay, « Sociologie religieuse de l’Islam ». Il n’est pas douteux que le collégien ait lu des vers d’al-Muttanabi et d’Abul-‘Ala al-Ma’rri, et même de douces romances d’al-Manfalouti, mais aurait-il pu entrer sans aucune préparation dans « Les Poèmes mystiques » de Hallaj ? Ce serait la marque d’un somptueux génie.
Pourquoi faire d’un embrigadement paramilitaire une retraite spirituelle ? C’est vrai que le Kamel Daoud de 2014-2015, qui était reçu comme un annonciateur quasi-messianique dans les médias culturels parisiens, avait troqué la sourate de la Bakara contre le vin Camus, le seul du nom qu’il connaisse rigoureusement, changeant – c’est le cas de le dire – de fusil d’épaule. Est-il resté quelque chose de cet embrigadement que Daoud ne rompra que lorsqu’il quitte, obligé, Mesra-Mostaganem pour Oran et des études universitaires de langue française ? Dans les années 1990, au plus fort de la guerre civile qu’ont imposée les groupes islamistes armés à la société algérienne, ce sont des « jewala » d’avant, instruits des sentiers escarpés de la guerre par les Frères musulmans d’Algérie, intégrés aux groupes islamistes armés, qui tuaient des Algériens. Kamel Daoud les soutiendra-t-il ? Certainement. Par quels biais ? On va le voir.
- « Ô Pharaon » : un récit islamiste
L’ancien « jewala », diplômé de lettres françaises, journaliste, a-t-il renié son passé et son endoctrinement islamiste dans cette décennie 1990 de guerre imposée au peuple algérien – et, bien après dans les années 2000 ? Il publie, en 2005, chez la maison d’édition Dar El Gharb, aujourd’hui disparue tout comme son fondateur Fréha Benamadi, un récit intitulé « Ô Pharaon » qui rapporte des épisodes de la grande tuerie des années 1990 dans la région de Relizane, dans l’Ouest algérien, l’attribuant au pouvoir et à ses forces de sécurité. Un horrible massacre et plus de mille morts enregistrés en une seule journée dont il absout l’islamisme, ses groupes armés et ses brigades criminelles volantes. Daoud avait en partie couvert cette guerre islamiste pour « Le Quotidien d’Oran ». Il en a été, d’une certaine manière, un témoin direct qui va soutenir dans son récit les groupes islamistes armés contre les forces de sécurité de l’État (ANP, Gendarmerie nationale, police) appuyés par l’auto-défense civile, les Groupes de légitime défense (GLD) et les « Patriotes ».
L’idée, tant débattue à l’époque, à la base d’« Ô Pharaon » est le « qui-tue-qui ? » des années 1990, porté par sa grande prêtresse, la journaliste française Josée Garçon, longtemps correspondante du quotidien parisien « Libération » à Alger. Mais, dans la semblable démesure, par l’avocat franco-belge, Patrick Baudoin (5), de la Ligue des droits de l’homme. En ces années-là, pour les médias français unanimes, poussés par le pouvoir socialiste du président François Mitterrand, particulièrement bienveillant envers les islamistes algériens, puis par la droite du président Jacques Chirac, l’Armée nationale populaire (ANP) garde l’entière responsabilité de nombreux massacres de civils en Algérie. Voilà une motivation essentielle du récit de Daoud : au moment ou le pouvoir algérien était attaqué en Occident, apporter son témoignage dans un récit de fiction, incriminer, et surtout salir, les forces de sécurité nationales et à travers eux l’administration publique et les assemblées communales fidèles à l’État algérien républicain.
Kamel Daoud, « Ô Pharaon » (2005), un récit islamiste et homophobe
qu’il cache à ses amis et protecteurs français
Pour le narrateur d’« Ô Pharaon », stricto sensu le délégué textuel de l’auteur Kamel Daoud, les belligérants sont classés en deux groupes : d’une part, les Ouled Ech-Char (« Gens du Mal »), agents du pouvoir, et de l’autre, les Ouled El Khir (« Gens du Bien »), islamistes. Qui tue ? La question est claire. Daoud écrit : « La nuit, dans une sorte de folie de contes et de crimes costumés, l’on ne savait déjà plus qui d’entre les agents de la Propagande, était habillé des guenilles des maquis et qui, d’entre les maquisards en famine et les terroristes hideux, avait volé une tenue pour rendre visite aux siens ou surveiller les habitudes d’une cible et noter ses mouvements. Pour les plus honnêtes, il fallait regarder de très près pour tirer le coup de feu et cela, personne ne s’en offrait le luxe et le temps perdu » (pp. 19-20). Et, la réponse tranchante, sans aucun doute. Ce sont les soldats de l’Armée nationale populaire, les services de sécurité et les volontaires de société civile qui harcèlent et assassinent, la nuit tombée. Furent-ils affublés de hardes, au cœur des ténèbres, dans une terrible fantasmagorie ?
Explication par le texte. Les représentants locaux de l’État, les « Gens du Mal », organisent des violences meurtrières à la demande du pouvoir central, saisi dans une formule évocatrice : « les laborantins de la capitale » ; le narrateur les a sortis de leur tanière : « Les cinq avaient fini par se reconnaître, peu à peu, par on ne sait quel signe mystérieux raturé sur le dos, par un diable quelconque. Une sorte d’âme commune les unit dans des jeux de rapacité qui allèrent plus loin que le simple appât du gain, et déboucha sur un festin nu avec des rires de profanation. La légende raconte que c’est dans un bureau sombre, qu’une ombre malsaine décida de cette politique du pire, pour la ville d’El’Mdina. Les cinq bonhommes avaient, chacun, un lourd dossier de dérives et de dépassements derrière le dos, le long de leur ancienne carrière dans la haute administration » (pp. 46-47). Et, parmi ces responsables civils et militaires, le maire d’El’Mdina-Relizane, « la Cité des Mouches », surnommé Pharaon : « C’est dans le même esprit que, plus tard, muté dans une autre wilaya, lorsque sa bande fut démantelée, il [Pharaon] continua son habitude médicale de faire le nettoyage, l’arme au poing et la balle au canon, pour alléger la procédure de la Justice et expédier des cas de présumés terroristes capturés par ses soins » (p. 52).
« Nettoyage » donc, c’est dit. En voilà la méthode : « Après avoir rasé la ville avec ses yeux, le Pharaon installa un gigantesque silence qui fit attendre tout le monde, pendant des mois, ne sachant plus de quoi allait se nourrir le Rat qui avait pacifié les parages par ses raids nocturnes. C’est de ces moments-là, après sa victoire sur les islamistes, que l’on peut dater le basculement de la ville dans la renonciation et l’infamie. Le nettoyage du Pharaon fut féroce et sans demi-mesure. Y passèrent non seulement, dit-on, ceux qui portèrent les armes contre la République, mais aussi leurs sosies, quelques proches sans raisons, les opposants au nouveau règne, ceux qui se trouvaient au mauvais endroit sous l’horloge du mauvais moment et ceux qui pouvaient encore réfléchir bruyamment à haute voix sur une troisième solution à creuser pour échapper à ce drame. La méthode du Pharaon fut, dès le début, d’une extrême violence nue » (pp. 90-91).
Même dans un style de pochade surréaliste (« avoir rasé la ville avec ses yeux »), les choses sont exposées sans ambigüité, avec certitude : l’État algérien et ses forces de sécurité, les volontaires civils « costumés », tuent sans quartier, même des pauvres diables qui avaient le malheur d’être là au mauvais moment et au mauvais lieu sous la mitraille. En face d’eux, les « maquisards » des groupes islamistes armés, issus des « Gens de Bien ». « Maquisards » ? Le dictionnaire de langue française Larousse en donne le sens : « HIST[oire]. Résistant d’un maquis, sous l’Occupation ». Précisons : la seule occupation qu’a subie la France est celle de l’Allemagne nazie (1940-1944). Les islamistes, exterminateurs de populations civiles, étaient ainsi, pour Kamel Daoud, des « résistants » menant le bon combat contre l’État et son pouvoir, auteurs de ce qu’il nomme le « Grand Massacre ». Pour Daoud, le langage qu’il fourbit contre l’État algérien et ses « laborantins de la capitale » n’est pas outré. Un engagement islamiste sans fioritures de l’ancien « jewala ».
Mais, retournons au contexte historique de l’écriture du récit « Ô Pharaon ». Près d’une dizaine d’années après la découverte de charniers dans la région de Relizane dont Mohamed Smaïn, représentant local de la Ligue algérienne des Droits de l’Homme, en concertation, avec des organisations non gouvernementales internationales, a rendu responsable le président de la délégation communale Hadj Ferguène, Kamel Daoud le relaie dans cette accusation, jamais étayée. Mohamed Smaïn a été condamné en cour de justice, sur la requête de Hadj Ferguène, à une année de prison ferme pour diffamation, confirmée en appel (6). Cités dans la même accusation, les frères Mohamed, Abdelkader et Hocine (dit « Adda »), chefs de Groupes de légitime défense (GLD), résidents à Nimes (Gard), ont fait l’objet auprès du tribunal de grande instance de cette ville de poursuites judiciaires menés par la Ligue des droits de l’homme, la Fédération internationale des droits de l’homme et l’Organisation mondiale contre la torture, menées par Patrick Baudoin, qui n’ont pas abouties, faute de preuves établies (7).
- Une homophobie islamiste
Le lundi 8 janvier 2019, Hadj Mohamed Ferguène décédait dans sa ville de Relizane, à l’âge de quatre-vingt-et-un ans. L’agence nationale d’information Algérie presse service (APS) écrit dans son bulletin quotidien du 9 janvier : « Feu Mohamed Ferguène (81 ans) est considéré comme un illustre moudjahid de la région de Relizane durant la Guerre de libération nationale. Après le recouvrement de l’Indépendance, il a occupé plusieurs postes dont celui de Président de l’APC de Relizane et secrétaire de wilaya de l’organisation nationale des moudjahidine (ONM). Il a été parmi les fondateurs des groupes d’autodéfense de la wilaya durant la décennie noire ». Elle apportait aussi une utile précision: « Le défunt a été inhumé mardi après-midi au cimetière ‘‘Chouala’’ de Mendes, à 30 km au sud du chef-lieu de wilaya, en présence de représentants de la famille révolutionnaire et de ses compagnons d’armes ». Qui ont gardé le souvenir ému d’un combattant glorieux de notre guerre anti-islamiste, un sauveur de la République algérienne démocratique et populaire au moment où elle était isolée dans le monde.
Hadj Mohamed Ferguène a gardé, jusqu’au bout d’une vie de combats, le respect de ceux qui l’ont côtoyé. Dans l’Algérie des années 1990-2000, il a été un acteur de premier plan du champ politique national, pressenti pour le poste éminent de secrétaire général de l’Organisation nationale des Moudjahidine (ONM). Un combattant sans haine envers ses ennemis islamistes repentis (de l’AIS, des GIA, et de la terrible brigade « El Ahouel »), qu’il a aidés à retrouver leur place dans la cité et dans leurs familles. Et, aussi, envers ceux qui, en France, et ailleurs l’ont chargé des pires méfaits de la décennie noire. Entre autres la journaliste Florence Aubenas prenant la défense de son accusateur Hadj Mohamed Smaïn. Il s’en rappelait : « Quant à Hadj Smaïn, les droits de l’homme qu’il a découverts à un âge avancé ne peuvent avoir un sens à ses yeux qu’en m’impliquant dans tous les traumatises, y compris peut-être l’enlèvement de la journaliste de ‘‘Libération’’ Aubenas [otage en Irak entre le 5 janvier et le 12 juin 2005], que je condamne par ailleurs, pour la simple raison que je suis contre le terrorisme qui touche à la liberté de pensée. Je me demande pourquoi Hadj Smaïn s’est tu quand Florence Aubenas a été enlevée en Irak. Pourtant, cette journaliste a séjourné chez lui et elle a fait un travail en sa faveur, en omettant de publier mon interview » (8). « Contre le terrorisme », où qu’il s’exprime, pour la « liberté de la pensée », Hadj Ferguène était assurément un fier combattant mais, aussi, une belle âme.
Dans cette affaire, Kamel Daoud va jouer sa partition, apportant sa caution à Hadj Mohamed Smaïn et aux organismes droits-de-l’hommistes de Patrick Baudoin, plus soucieux de défendre l’islamisme et ses groupe armés que le droit à la vie de nourrissons précipités dans des bains de chaux ou d’écoliers abattus à la mitrailleuse. Le chroniqueur du « Quotidien d’Oran » espérait-il écrire dans « Ô Pharaon » le récit à charge contre le pouvoir, les GLD et les « Patriotes » anti-islamistes, qui lui ouvrira les portes de la France et le soutien des promoteurs parisiens du « Qui-tue-qui ? », une répétition près de dix années avant « Meursault contre-enquête » couronné de succès ? L’intention, clairement affichée, est de détruire le chef des groupes d’autodéfense, que les balles islamistes n’ont pas réduit au silence. Il utilisera ainsi la démarche la plus vile, la plus dégradante, celle du sexe. Nulle part dans la presse ou dans l’opinion publique de l’époque, il n’est fait état de l’homosexualité du moudjahid Hadj Mohamed Ferguène et du libertinage de groupes d’auto-défense furieusement dépravés. Cette accusation, Kamel Daoud en fait son arme de destruction. Pour autant qu’elle soit vraie et vérifiable, que le courageux combattant anti-islamiste ait été un homosexuel, cette délation, ce coup sous la ceinture, est peu honorable.
Dans « Ô Pharaon », Kamel Daoud agite sur la place publique le discrédit du maire et chef des GLD de Relizane. Dans ce récit, ressourçant son islamophobie islamiste de « jewala », il portraiture en chair l’édile de la « Cité des Mouches », jetant son dévolu sur un agent de la municipalité : « Hassan ne parlait plus jamais, depuis ses vingt ans d’autrefois, de la fameuse énormité paysanne de ses attributs cachés, mais c’est elle qui décida de sa carrière, un jour qu’il fit tomber son pagne dans le Hammam de la ville, face au futur homme fort des années de braise » (p. 14). Une exploitation politico-sexuelle ? Cette inclination aux bacchanales enfumées s’étend également, en tout préjudice, aux camarades de combat du maire Pharaon-Hadj Ferguène, ainsi que le relève le professeur Mohamed Bouhamidi : « Voleurs, violeurs, rançonneurs, maffieux, criminels et assassins de masse, délinquants par filiations bâtardes, homosexuels par vocation, par goût, et par perversion, l’image horrifique des patriotes et GLD dans le regard de Kamel Daoud » (9).
Cette mise en cause de l’orientation sexuelle de Hadj Ferguène, qui se faisait, semble-t-il, monter aux heures pies (Bouhamidi préfèrera l’expression cauteleuse « aux heures médianes que vous devinez ») n’est-elle pas ignominieuse ? En ces années de guerre civile islamiste, la décennie noire des années 1990, et, aussi, en ce début des années 2000, dans le temps de l’écriture de son récit « Ô Pharaon », Daoud (qui n’avait probablement pas lu le psychanalyste austro-américain Wilhelm Reich) échafaudait une lecture politique de la sexualité. Se réclamant d’une conception ouvertement islamiste du sexe et de la sexualité, il s’appliquait à chasser l’hérétique. Mais, sur ce registre canonique, lointaine incantation de sa formation « jewala », il n’a dénoncé ni les viols islamistes, ni leur « nikah » débridé, ni leur « zina » décomplexée et leur esclavagisme sexuel.
À cette époque de sexe islamiste béni, Kamel Daoud concevait une sorte d’érotologie islamiste qui traçait une infranchissable frontière entre hétérosexuels et homosexuels, entre sexe normatif du « beyt el-Islam » et sexe libidineux, foncièrement sacrilège. C’est au nom de ce partage qu’il incrimine devant la Loi d’Allah Hadj Hadj Ferguène-Pharaon et l’inconvenante « déviance sexuelle » de ses compagnons, décrits dans son récit en partouzards orgiaques. La disqualification sexuelle des combattants anti-islamistes s’accompagne d’opprobre moral sur le refus d’observance des lois de la guerre, qu’il ne faudrait pas, selon l’éthique de Daoud, imputer aux tueurs islamistes, on l’a vu plus haut des « maquisards », qui se distinguent par la pureté de leur combat et leurs chastes intentions. L’auteur d’ « Ô Pharaon » le scande, nettement : les charniers de Relizane sont l’œuvre de l’État algérien, de ses services de sécurité et de ses groupes d’auto-défense. Le dérèglement sexuel s’assume ainsi dans leurs massacres répétés ; il est une sanction divine. Et, la marque de l’impiété de l’État-« taghout » (traitre) est gravée sur le front de ses soldats et de ses combattants.
Et, derrière la fiction, ses modèles réels. S’il ne nomme personne dans son récit, ni Hadj Ferguène, ni les autorités civiles et militaires et les combattants de l’auto-défense, l’auteur place, ici et là, des détails pour qu’ils soient identifiables dans la région et dans la « Cité des mouches ». Tout comme ses amis, parmi lesquels le troublant Hadj Mohamed Smaïn dont un fils se pavanait dans les groupes islamistes armés de Relizane, campé en « chercheur d’os » (merci, Tahar Djaout !), détenteur de l’histoire insortable des charniers. Justement, de ces délirants « charniers hantés » (10), qui explosaient l’acmé dans les rédactions parisiennes.
Les faits incriminés dans « Ô Pharaon » remontent au 31 décembre 1997. Comment oublier la vaste plaine de Relizane ensanglantée, son chapelet de villages jonchés de cadavres, de Cherarba à Oued Sahrine, Had Chekala, Ben Taïeb et El Abadil ? Et, Ramka, dans la putrescence des corps dépécés, plus qu’un crime contre l’humanité. En quoi dans cet ultime combat de l’État contre l’islamisme génocidaire, qui n’était pas un combat douteux, comme le laisse entendre Daoud, la sexualité des uns et des autres était-elle préjudiciable ? Elle l’était suffisamment pour l’auteur du récit qui fourbit l’arme mortelle de la délation contre un ennemi de ses « Gens du Bien ». L’homosexualité n’est-elle pas la pire injure et le crime irrémissible en terre d’Islam ?
- Le changement de cap sexuel de Kamel Daoud, défenseur des LGBT+
En 2014, au moment où il a perçu qu’il pouvait se projeter dans un avenir de modernité occidentale plus gratifiant et jouissif, Kamel Daoud a supprimé de la liste officielle de ses publications insérée dans les pages de garde de ses textes édités en France le récit « Ô Pharaon », qu’aucune critique littéraire française ne saurait lui tolérer. Faut-il croire que lorsqu’ils l’encourageaient à blanchir son passé islamiste, Alain Finkielkraut et Pierre Assouline connaissaient ce récit ? Je ne pense pas que, pour eux, la défense d’Israël et du sionisme mondial, qui les a engagés à soutenir aveuglément Kamel Daoud, puisse passer avant celle des valeurs de la France et de l’Occident sur la libre orientation sexuelle. Outre l’islamisme, ses « Gens du Bien », ses maquisards-résistants et son « qui-tue-qui ? », « Ô Pharaon » est un récit homophobe, un récit de délation homophobe. Ne pouvant se prévaloir d’aucune qualité littéraire, il est simplement un tract homophobe.
Or, aujourd’hui, en 2023, Kamel Daoud s’érige en défenseur de la communauté LGBT+. La belle affaire ! La délation, en 2005, de la prétendue homosexualité de Pharaon-Hadj Ferguène, maire de Relizane, « la Cité des Mouches », et l’incroyable catalogue – revu et augmenté – des perversions sexuelles de ses compagnons de l’auto-défense, il en est revenu. Le délateur, désormais en rupture avec l’Islam et naturalisé Français, reconnaît tardivement que « dans les pays dit ‘‘arabes’’, l’homosexualité est un crime, autrefois puni par la défenestration, aujourd’hui par la peine de mort et de prison » (11). Mais il le savait déjà en 2005 lorsqu’il révélait publiquement en Algérie, « pays dit ‘arabe’’ », la supposée homosexualité de Hadj Ferguène-Pharaon, tout en sachant que cette divulgation était potentiellement mortelle. Où la souhaitait-il telle ?
Le fait indiscutable est que Kamel Daoud n’a écrit « Ô Pharaon » que pour nuire à l’État républicain et à ses forces de sécurité en guerre contre l’islamiste. La preuve ? Hadj Mohamed Ferguène est mort de sa belle mort, dans un âge apaisé, dans son lit, entouré de l’affection de sa famille et de ses compagnons. Il n’a pas été défenestré pour crime d’homosexualité comme l’enseigne la vulgate révérée du « Beyt el-Islam », chère à son accusateur des années 1990-2000, ni condamné à perpétuité par les juridictions de l’État. Kamel Daoud a, dorénavant, changé d’opinion par un sordide calcul, puisqu’il a choisi la France et ses mœurs, mais son homophobie islamiste peut-elle être effacée et excusée ? Une part d’ombre irrémissible.
Certes, Kamel Daoud s’est sustenté de cette « homophobie islamiste » qu’il dénonce présentement auprès de ses amis de France et d’Occident. Il milite, maintenant, pour la liberté des corps et des orgasmes et s’exerce à une fantasque nouvelle division du sexe et de la sexualité : d’un côté et de l’autre d’un nouveau mur de Berlin, l’obsession de la virilité de Vladimir Poutine face à la douce tolérance de l’Occident. En fait, rien de nouveau, sinon le vieux schéma de la sexualité islamiste inversé : Daoud joue les LGBT+ contre les hétéros, Kiev contre Moscou, toujours infailliblement du bon côté du manche, sachant changer de camp pour défendre en France et en Occident sa petite entreprise. Après avoir porté le drapeau des femmes blanches victimes des viols de Cologne et décrié le « sexe arabe », avec le succès que l’on sait, le pourfendeur de l’homosexualité du maire de la « Cité des Mouches » brandit les couleurs de l’arc-en-ciel typique des LGBT+. Opportunisme, sans foi ni loi.
Le grand paradoxe ? Les protecteurs français de Kamel Daoud dans l’édition et dans les médias parisiens sont majoritairement issus de cette communauté « Kaous-Kouza ». Ce sont eux qui lui garantissent, en 2014-2015, en France et dans le monde, un succès étonnant qui ne correspondait en rien à ses potentialités littéraires étriqués, sans rien savoir de son homophobie islamiste pleinement étalée dans « Ô Pharaon ». Cependant en France et dans plusieurs pays d’Europe, l’islamisme qu’il a pratiqué et défendu vigoureusement est pourchassé et l’homophobie, point d’orgue d’un récit caché, est punie par la loi. C’est vrai que son passé islamiste et ses convictions homophobes sont si lointaines, recouvertes depuis 2014 d’une couche de vernis de modernité occidentale et d’un goûteux vin Camus.
Ces informations sur le « jewala » d’antan, compagnon de route de l’islamisme armé, écrivant un récit sur le « qui-tue-qui ? », faisant la part belle à l’islamisme armé, en homophobe déclaré, ont circulé dans les salles de rédaction parisiennes. Il est compréhensible que la France et les Français ne censurent pas ces vilénies perpétrées en « terre d’Islam ». Il y aurait deux raisons. La France tient, aujourd’hui, en la personne du chroniqueur Kamel Daoud, attaché au magazine « Le Point », un zélateur des valeurs de l’Occident, se rehaussant dans ses billets en citoyen de la France et de l’Union européenne. N’est-il pas aussi le « plus-que-frère » du président de la République française ? Un intouchable. La France d’Emmanuel Macron le perdra-t-elle pour de navrantes incartades algériennes ? Elle le protège – et continuera à le protéger.
- Les violences conjugales de Kamel Daoud
Ces derniers jours, dans un débat sur Daoud, à l’initiative du précieux publiciste Rafaa Abboud sur sa chaîne de télé-web, un intervenant a noté l’exceptionnelle permissivité accordé par les médias français à Kamel Daoud, poignardant son épouse, dont il est séparé depuis, qui n’a pas été reconnue à des hommes politiques français, ainsi Adrien Quatennens, membre prometteur de La France Insoumise (LFI-NUPES) et Julien Bayou, brillant chef du groupe parlementaire écologiste (EELV-NUPES) à l’Assemblée nationale, écartés par leurs partis et discrédités dans leur société pour moins que l’usage répugnant d’un poignard contre une femme. Mme Sandrine Rousseau, député écologiste, inlassablement sur le front pour flétrir des acteurs publics de la société, debout sur les rives d’un féminisme paroxystique lorsqu’il s’agit d’éliminer de potentiels concurrents politiques, plus talentueux, ne connaît probablement pas Kamel Daoud et son art du couteau aussi tortueux que sa syntaxe. Et, manifestement, la presse parisienne, y compris « Le Canard enchaîné », à l’origine de l’Affaire Quattenens.
Toutefois, les rédactions parisiennes ne peuvent prétendre ne rien savoir de cet événement malheureux et le passer à la trappe. Les journalistes Jacques-Marie Bourget (12), indépendant, et Mehdi Messaoudi (13), fondateur et directeur de la rédaction d’« Algérie 54 », ont publié le verdict du tribunal de première instance d’Oran condamnant Kamel Daoud à six mois de prison ferme, réduits à trois mois avec sursis en appel. Il n’y a eu, en France et aussi en Algérie, aucune réaction à cette voie de faits caractérisée et de son épilogue judiciaire. Deux poids, deux mesures : les carrières politiques d’Adrien Quatennens et Julien Bayou sont désormais fragilisées, peut être définitivement compromises. Observe-t-on que dans ces démêlés conjugaux, ni l’un ni l’autre n’ont usé de poignard pour soumettre une épouse – ou compagne. Daoud l’a fait. Quatennens et Bayou ont reconnu les faits incriminés et les ont publiquement regrettés, Daoud est dans le déni. Dès la diffusion de la décision du tribunal d’Oran, il publie un communiqué dans la presse algérienne qui lui est acquise, menaçant de poursuite judiciaire ceux qui seraient tentés de reprendre l’information (14). En Algérie, bien entendu, car la France n’a rien vu et entendu.
Kamel Daoud, « informateur indigène », selon la formule d’Ahmed Bensaada (15), un des visiteurs du soir écouté du président de la République française, occupe une position singulière dans le champ politique français pour échapper aux radars médiatiques. Si Adrien Quatennens, mollement soutenu par Jean-Luc Mélenchon, chef de la NUPES, et Julien Bayou, abandonné par le mouvement écologiste, sont des personnalités politiques affirmées dont la presse parisienne exploite les infortunes conjugales, le chroniqueur parisien Kamel Daoud est, répétons-le, le protégé du président Emmanuel Macron qui l’a suivi, sous les huées de la foule, jusque dans les bouges d’Oran (16). Et, aussi, de la Sainte-Trinité sioniste Bernard-Henri Lévy, Alain Finkelkraut, Pierre Assouline – et bien d’autres, valeureux défenseurs des hautes valeurs de pureté de la France. Mais comme Adrien Quatennens et Julien Bayou, Daoud est un personnage public français – et à ce titre moralement et pénalement éligible aux tribunaux médiatiques et judiciaires français. Sinon, où serait l’égale mesure ? À moins que les élites parisiennes qui font bloc autour du néo-Français jugent que la femme violentée par Kamel Daoud – l’Oranaise « Nadjet E-H » – n’est qu’une Algérienne, une Arabe, dans un pays et une civilisation des confins où #MeToo n’existe pas, qui ne mérite pas qu’on s’y arrête. Toujours ce mépris du Français envers l’Autre algérien « dit arabe » dans les seuils d’une infrangible altérité coloniale et néocoloniale.
- Encore et encore : pauvre France !
Voici une France de la politique et des médias qui baigne dans l’hypocrisie. Emmanuel Macron, le premier, doit se réjouir de la condamnation des députés de LFI et d’EELV, de redoutables adversaires, dans des faits moins blâmables que ceux de son protégé Kamel Daoud. Au moment du méchant coup de poignard asséné à « Nadjet », son ex-épouse, en 2016, l’agresseur Kamel Daoud, sûrement adoubé par la France, n’était plus un « bougnoule » (17) qui a tenté de tuer avec un coutelas berbère une « bougnoule ». Mais, déjà, un faiseur d’opinion consacré en donneur de leçons : il a fait, et il continue à faire le job, hier pour flétrir l’Islam, les Musulmans, les Arabes et le « sexe arabe », aujourd’hui pour fustiger Vladimir Poutine, la Grande Russie et le « sexe russe », au nom de la France, de l’Europe et de l’Occident dans leur guerre sans nom. Et, accessoirement, pour se proclamer derrière son emblème coloré le vaillant avocat de la communauté LGBT+, après voir touché à l’homophobie islamiste dans un récit qui reste comme l’inaltérable témoignage d’un esprit perverti.
Islamiste en formation dans les « halaqate » dès son jeune âge, radicalement islamiste et homophobe dans un récit de 2005, devenu honteux, auteur non repenti de violences conjugales, Kamel Daoud, affranchi de ses dérives crapoteuses, est blanchi dans la lessiveuse d’une France oublieuse, dressé en « camusien » « passionné » pour souscrire à une posture qu’Emmanuel Macron, président de la République française et l’intelligentsia parisienne, à l’unisson, lui ont consentie. Un nouveau Camus dévoyé. Triste artifice d’une France qui a mangé ses intellectuels (18), qui croit pouvoir changer François Mauriac (1885-1970, Prix Nobel de Littérature 1952) et son « Bloc-notes » de « L’Express » par un écrivassier à six cents signes du « Point », à la langue délétère, qui s’agite foutrement au-dessous de la ceinture. Misère de la pensée française.
Lire: https://algerie54.dz/2023/02/04/neocolonisation-litterature-3/
Notes
- Kamel Daoud, « Emmanuel Macron : ‘‘Je ne demande pas pardon à l’Algérie et j’explique pourquoi’’ », « Le Point » (Paris), 12 janvier 2023.
- Alain Finkielkraut, « Répliques », « ‘‘L’Étranger’’ revisité », France Culture, 29 novembre 2014.
- Pierre Assouline, « Kamel Daoud : ‘‘Ni m’exiler ni me prosterner’’ ». Entretien publié dans « Le Magazine littéraire » [Paris], mars 2015.
- Mohamed Issami, « Le FIS et le terrorisme. Au cœur de l’enfer », Alger, Le Matin Éditions, 2001, pp. 35-36.
- Mohamed-Tahar Messaoudi, « Et revoilà Patrick Baudoin », « El Watan », 29 janvier 2023. Il ne manque pas une seule abjection dans ce portrait sur pied de l’activiste franco-belge.
- Au terme du « procès des charniers », selon la formule décapante d’Ihsane El Kadi (« Le Quotidien d’Oran », 12 février 2012), toujours égal à lui-même en défroque d’incendiaire, la cour de Relizane a condamné Hadj Smaïn à une année de prison ferme, le 24 février 2012.
- « Guerre civile algérienne : non-lieu pour deux ex-miliciens …», www.France 24.com, 19 janvier 2016 : « Après 10 ans d’instruction, la cour d’appel de Nîmes a prononcé un non-lieu pour Abdelkader et Hocine Mohamed, deux frères poursuivis pour des actes de torture pendant la guerre civile algérienne ».
8. Yasmina Ghaouthi, « Hadj Ferguène se prononce sur l’amnistie générale », lanouvellerepublique.com, 5 avril 2005.
- Mohamed Bouhamidi, « ‘‘Ô Pharaon’’, le livre-procès des Patriotes et GLD », « La Tribune » [Alger, aujourd’hui disparu], 4 avril 2017. Lire aussi sur « bouhamidimohamed.over-blog.com ».
- Fabrice Tessel, « Les charniers hantés de Relizane », « Libération », 23 septembre 2012.
- Kamel Daoud, « Rideau de fer et de peau », « Le Point », n° 2628-2629 des 15-22 décembre 2022
- Jacques-Marie Bourget, « Quand Kamel Daoud, ami de Macron, battait son ex- femme », « Le Grand soir », 17 octobre 2022.
- Mehdi Messaoudi, « Kamel Daoud, condamné par le tribunal d’Oran, il devient ‘‘l’auteur’’ de la violence conjugale », « Le Libre Penseur », 20 octobre 2019.
- Voir les articles des sites d’information en ligne www.algerie-eco.com (« Victime de diffamation, Kamel Daoud réagit », 21 octobre 2019) et www.dzvid.com (« Kamel Daoud nie avoir été condamné pour violence envers sa femme », 21 octobre 2019).
- Lina Kennouche, Entretien avec Ahmed Bensaada, « El Akhbar » (Beyrouth), 3 mars 2018.
- Les temps changent. Et la France aussi, dans l’indignité. Comment imaginer un président français chez un vendeur de musique de cabaret sous les cris rageurs de la populace. C’est Macron à Oran, guidé par Daoud. Aurait-on vu, dans l’Algérie française finissante, le général de Gaulle, courant les rues de Bab-El-Oued, au pas et aux rythmes de l’Égyptien Bob Azzam et de son « Ya Mustapha » (1959) ?
- René Naba, « Le Bougnoule, sa signification étymologique, son évolution sémantique, sa portée symbolique », « Actualités Afrique Analyse Europe France International », 22 Juillet 2002. Très subtile analyse lexico-sémantique. J’en retiens l’imparable définition du « Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française Le Petit Robert », Tome 1, Société du nouveau Littré, Paris, 1979, page 205. Bougnoule : « 1. familier, péjoratif, injure raciste. 2. maghrébins, arabes ». Le second niveau de sens exclut, pourquoi y insister ?, toute forme de racisme. Si cet article du « Petit Robert » n’a pas été révisé depuis, l’emploi en France et en bon français de « bougnoule » – maghrébin, arabe, donc Algérien – est légitime.
- Cf. sur ce débat, Régis Debray, « I.F. Suite et fin », Paris, Gallimard, 2000.
POST-SCRIPTUM.
Un défi renouvelé à Kamel Daoud.
« Ô Pharaon » n’a jamais été réédité depuis sa parution en 2005, voilà dix-huit ans. Tiré à quelques centaines d’exemplaires, il est aujourd’hui introuvable en Algérie et dans le monde. Les curieux peuvent le consulter en ligne auprès de la Bibliothèque de l’Université du Michigan (États-Unis). Si ce n’est Actes Sud, l’auteur trouverait facilement, à Paris ou en province, un éditeur pour publier et faire connaître aux Français – et aux Algériens – ce récit honteux. Ne serait-ce que pour démentir ce qui est écrit ici. Qu’il ait donc le courage de le faire. Il ne s’agit plus seulement, pour Daoud, de renier un texte, de l’effacer de la liste de ses œuvres publiées, mais d’en assumer les positions qui y sont contenues, qui informent nettement sur ce qu’a été son parcours en Algérie. Comme l’énonçait Michel Foucault (« Qu’est-ce qu’un auteur ? », dans « Dits et écrits », T. 1, Paris, Gallimard, 1994), la notion de responsabilité des écrits est liée à leur auteur, autant du point de vue du droit que de la morale.