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Géopolitique de l’Europe: Une lecture d’actualité.

 

Par: Mohamed El-Abassi.

Alors que l’Union Européenne, telle que nous avions admiré son processus de construction, depuis la communauté de l’acier et du charbon (CECA) à la communauté économique européenne consacrée par le traité de Rome, puis vers l‘Union dans son inaccompli devenir, ne ressemble à rien du rêve européiste depuis Victor Hugo à Robert Schuman, ni à l’ambition déçue d’une Allemagne, l’éternelle second dans un couple franco-allemand déséquilibré qui bat de l’aile.

Voyons voir qu’est devenu ce rêve de constituer un pôle politico-militaire et diplomatique sensé faire contrepoids à la bipolarisation du monde et poser un pied qui laisserait son empreinte sur l’échiquier mondial.

Si le rêve passionnant d’une Europe unitaire et supranationale avait avancé dans l’ombre d’une bipolarisation et de la guerre froide tant que les Etats unis en avait besoin mais sans jamais l’accepter, en tant que nouveau pôle concurrent, sa progression  et son approfondissement se sont heurtés à ses propres limites dues  à des souverainetés nationales des Etats membres inaccomplies face au choix pour la supranationalité ou l’alliance transatlantique. Tout porte à croire que le choix pour le second a été déterminant.

Durant les années 80’, pendant que l’idée d’une politique étrangère et de sécurité commune (PESC) commençait à émerger des laboratoires de quelques Etats membres, l’Union Européenne s’est empressée dans un élargissement effréné en nombre sans approfondissement, ni économique, ni politique, de la qualité de membre. Il fallait privilégier le plus grand nombre, jusqu’à 27 pays, juste pour grignoter de l’espace géographique et  de se positionner au plus proche des frontières de la Russie.

Elargissement intéressé et à géopolitique variable.

Chez nombre de ces pays nouvellement européens, ils ont été motivés, dans des circonstances d’une crise économique sévère et d’une attirance de l’embellie économique dans le vieux continent, par le troisième pilier de la construction européenne : La solidarité.

L’autre versant militaire de l’alliance occidentale contre la Russie et la Chine a, lui aussi, emprunté le même cheminement pour s’agrandir et se positionner au plus proche de la Russie.

Où commence et où s’arrête l’Europe quand on sait que la Turquie devance la majorité des nouveaux pays membres pour avoir signé dès les années 60’, un accord de libres échanges avec la CEE de l’époque. La réponse à cette question renvoie, non pas à la géographie, ni à l’Etat de droit, ni au contrôle civil des forces armées, mais à la confession religieuse et à la géopolitique, malgré le fait que la Turquie est un pays constitutionnellement laïc. Pourtant, celle-ci est bien membre à part entière de l’OTAN.

Le « Brexit » n’est qu’une réaction bien britannique à la dérive xénophobe et à cette solidarité pesante d’une Europe à 27, devenue une auberge espagnole pour s’y abriter le temps de l’embellie comme l’Albanie, réfractaire à la libre circulation à travers son passeport doré, par exemple, tout comme la Pologne nationaliste et rebelle en légiférant contre le droit communautaire, ou encore la Hongrie, peut-être bien justement embarrassée par le diktat de la commission européenne.

Le rêve européiste tel que ses fondateurs l’avaient imaginé devra attendre longtemps pour parler d’une seule et même Europe. Elle devra ainsi dire adieu à sa PESC avortée et abdiquer devant l’omnipotence de l’OTAN et des Etats Unis avec lesquels, elle est condamnée de sous traiter sa défense collective et individuelle.

Prise de conscience ?

L’on assiste, cependant,  depuis la guerre d’Ukraine, à un certain réveil nationaliste chez les pays occidentaux, en matière de défense et, pour cause, le récent vote en Allemagne, en France et au japon qui, de surcroit, a inscrit le principe de neutralité dans a constitution, qui se lancent dans une augmentation substantielle de leurs budgets militaires respectifs.

L’équilibre de la dissuasion nucléaire entre la Russie et la Chine, d’une part, et les pays occidentaux détenteurs de cette arme, se font face à face, sans que ni l’un, ni l’autre de ces deux camps adversaires, n’osent l’utiliser, sauf en cas d’une attaque et/ou réplique à une belligérance exterminatoire. D’où, l’enlisement dans une guerre sophistiquée au moyen d’un armement technologique avancée.

Sur le plan diplomatique, ce spectacle donne la preuve des limites de l’ONU étant contrôlée par les P5, à majorité occidentale,  qui usent et abusent de leur droit de véto, les uns, dès qu’ils sont en désaccord par idéologie, ou que les autres, se sentent menacés. Une opposition d’intérêts divergents et, par conséquent, un blocage du conseil de sécurité, qui n’a pas connu de consensus depuis des lustres.

Le multilatéralisme, par-dessus l’assemblée générale, sans pouvoir de décision, vit une crise qui révèle un rapport des forces bâti, non pas sur le droit et la légalité internationale, mais sur des intérêts nationaux ou de bloc.

L’union européenne tiraillée entre le droit et ses valeurs fondateurs, d’une part, et la realpolitik, d’autre part, s’en est trouvée bien éloignée de sa raison d’être, la paix en Europe !

La guerre d’Ukraine est l’illustration d’un échec historique.

 

Mohamed El-Abassi.

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