Le soutien apporté par Paris au prétendu « plan d’autonomie » marocain pour le Sahara occidental se trouve « en porte à faux » avec la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), estime le professeur en droit international à l’université de Bruxelles, François Dubuisson qui rappelle que toutes les juridictions internationales s’accordent sur le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
« Le Sahara occidental est un territoire autonome au regard des Nations-unies, c’est à dire que c’est un territoire qui a le droit à l’autodétermination », a affirmé M. Dubuisson dans une déclaration à la presse.
A ce titre, il a souligné que « le peuple sahraoui peut déterminer son propre sort, (et) qu’il a été décidé qu’il pouvait le faire au terme d’un référendum », rappelant que « toute une série de juridictions internationales se sont prononcées en ce sens ».
Il a notamment évoqué la Cour internationale de justice (CIJ) qui « dans un avis de 1975 avait établi que le Maroc n’avait pas la souveraineté sur ce territoire et que c’était bien un territoire non autonome auquel s’appliquait le droit à l’autodétermination ».
Cette position, a-t-il poursuivi, « a encore été confirmée par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) le -22 septembre 2022- et par la CJUE », faisant savoir que cette Cour européenne va se prononcer probablement dans les prochaines semaines sur divers accords économiques UE/Maroc », étendus illégalement au Sahara occidental occupé.
Pour rappel, en septembre 2021, le Tribunal de l’Union européenne (UE) avait statué en faveur du Front Polisario, soulignant que l’accord de pêche entre l’UE et le Maroc a été conclu sans le consentement du peuple du Sahara occidental.
Les Conseil et Commission européens avaient introduit un recours en appel en décembre de la même année. Cet accord, d’une validité de 4 ans et arrivé à terme en juillet 2023, fait actuellement l’objet d’une procédure judiciaire devant la Cour de justice de l’UE (CJUE) dont le verdict est attendu au courant de cette année.
« En première instance, le tribunal avait annulé ces accords en considérant que l’UE ne pouvait pas passer des accords avec le Maroc portant sur le Sahara occidental sans le consentement du peuple sahraoui », a-t-il rappelé dans ce cadre, relevant qu’il se peut donc que, « la position française se trouve assez rapidement en porte à faux avec la jurisprudence de la CJUE).
Répondant à une question sur l’illégalité de la présence marocaine au Sahara occidental, M. Dubuisson a expliqué que « le Conseil de sécurité avait condamné la marche verte qui avait été organisée par le pouvoir marocain », en 1975.
« Par la suite, la Cour africaine des droits de l’homme avait indiqué très clairement que l’occupation marocaine était illégale et contraire au droit à l’autodétermination du peuple sahraoui », a-t-il ajouté.
Le professeur en droit international a, en outre, souligné que « les juridictions européennes ont été dans le même sens en considérant que le territoire du Sahara occidental n’appartient pas au Maroc et que dès lors il n’est pas possible de passer un accord avec ce pays qui porterait sur le Sahara occidental sans obtenir le consentement préalable du peuple du Sahara occidental, ce qui passe très certainement par un accord avec le Front Polisario ».