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La déception de la France : l’auteur de l’agression des enfants est chrétien

Par Khider Mesloub

L’attaque au couteau ayant visé des enfants à Annecy en France aura réservé plusieurs surprises. Ce dramatique crime aura fait éclater bien des stéréotypes.

Premièrement, événement inédit : les victimes sont des enfants en bas âge. Deuxièmement, situation inédite : le forcené est un Syrien, mais de confession chrétienne. Troisièmement, on aura découvert qu’il avait obtenu curieusement trois avis favorables de statut de réfugié, octroyés par trois pays européens, à savoir la Suède, la Suisse et l’Italie. Quatrièmement, c’était un bon père de famille, papa d’un enfant de 3 ans. Cinquièmement, il n’avait jamais vécu les affres de la guerre en Syrie puisqu’il avait réussi à quitter son pays dès 2011.

Toute la classe politique française, tout comme la majorité des Français, était presque déçue, car le suspect de l’attaque au couteau visant des jeunes enfants à Annecy est, certes, un réfugié syrien, mais chrétien.

Depuis plusieurs décennies, selon des stéréotypes bien établis en France et en Europe, un massacre commis par un Arabe est forcément l’œuvre d’un musulman. Pis. Tout attentat est forcément commis par un musulman. Cela ne peut être l’œuvre d’un chrétien. Encore moins d’un Européen ou d’un Américain.

Selon la définition du dictionnaire, le terme attentat signifie, entre autres, tentative criminelle contre une personne ou un groupe. Selon un préjugé bien ancré, pour la majorité des personnes européennes, notamment françaises, tout attentat est perpétré par un musulman.

De même le terrorisme est, selon les stéréotypes racistes français, d’essence islamique. Or, le terrorisme est né en Europe, avec les narodniks russes, les anarchistes français, les irlandais sécessionnistes. Sans oublier les organisations terroristes sionistes européennes, notamment l’Irgun et la Haganah. Le terrorisme de L’OAS. Le terrorisme d’extrême-gauche (Action directe, Fraction armée rouge, Brigades rouges) perpétré dans les années 1970-1980 en Europe (France, Allemagne, Italie).

Quant aux attentats, c’est-à-dire les crimes commis contre un groupe de personnes, associés injustement aux pays musulmans, ils sont commis majoritairement dans un pays démocratique occidental, qui plus est majoritairement chrétien : les États-Unis. Si l’on s’en tient à la définition des dictionnaires, en effet l’Amérique détient le record d’attentats perpétrés sur son territoire. C’est-à-dire des crimes commis contre une personne ou un groupe.

Par ailleurs, ces attentats ou crimes collectifs sont commis par des Américains majoritairement blancs de confession chrétienne. Ce sont des attentats ou crimes absolument pas liés à l’immigration, ni à la problématique des réfugiés.

En dépit de l’application de la peine de mort, ce pays, au modèle libéral criminogène, détient le sinistre record mondial des taux d’homicides et des massacres de masse, ces fusillades qui défrayent régulièrement la chronique mondiale. Selon les statistiques publiées par la police fédérale (FBI), les États-Unis ont enregistré plus de 21.500 homicides en 2020, soit près de 59 par jour. Un grand nombre de ces homicides est perpétré par des enfants âgés de 10 à 19 ans. Pareillement en 2021 et 2022.

L’année dernière, en 2022, il y a eu quasiment 700 fusillades, c’est-à-dire attentats.  Soit presque deux fusillades par jour. Depuis 2012, il y a eu 3865 fusillades de masse, commis par de jeunes américains, majoritairement blancs de confession chrétienne. En effet, ces jeunes sont souvent issus de familles « blanches » pieuses, fréquentant régulièrement l’église. Ce sont des jeunes baptisés, grands lecteurs de la Bible. Et pourtant, curieusement, on n’incrimine jamais la religion chrétienne d’être pourvoyeuse de meurtres, de massacres de masse. On attribue le crime à la folie de l’auteur de l’attentat, c’est-à-dire de la fusillade. On n’établit jamais de lien entre l’auteur de l’attentat et son appartenance religieuse chrétienne. La religion chrétienne est exemptée de toute culpabilité, de responsabilité.

Les États-Unis constituent, parmi les pays chrétiens « en paix », la nation où le risque de mourir d’une arme à feu ou dans une tuerie de masse est le plus élevé au monde. Vingt-cinq mineurs meurent chaque semaine par balle et 91 % des enfants tués dans le monde par des armes à feu, le sont aux États-Unis.

Par ailleurs, la population carcérale des États-Unis est la plus importante au monde : plus de deux millions de prisonniers. La population carcérale des États-Unis a été multipliée par plus de quatre, de près d’un demi-million en 1980 à un pic à plus 2,3 millions.

Un récent livre de David Michael Smith, Holocaustes sans fin : mort de masse dans l’histoire de l’Empire des États-Unis (New York : Monthly Review Press, 2023), a estimé que l’Empire américain est responsable, ou partage la responsabilité, de près de 300 millions de morts, en Amérique et dans le monde.

David Michael Smith évalue le nombre d’autochtones décimés lors de la colonisation européenne de l’Amérique du Nord à 13 millions. Le génocide des Amérindiens a contraint les colonisateurs européens à importer des captifs d’Afrique pour les faire travailler de force sur les nouvelles terres conquises. Selon Smith environ 25 millions d’Africains ont été initialement capturés. Plus de la moitié d’entre eux sont morts entre la capture et l’embarquement des navires négriers qui les ont amenés en Amérique du Nord. D’après Smith, plus de 20 millions d’Africains supplémentaires sont morts dans des raids d’esclaves, portant le total des morts à cause de la traite transatlantique des esclaves à 32.5 millions. Au total, il estime que 41.5 millions de personnes pourraient être mortes à cause de l’esclavage.

Au lendemain des attentats du 9 septembre 2001, en représailles des millions de musulmans ont été tués, notamment en Afghanistan et en Irak.

David Michael Smith souligne que « les États-Unis font partie des sociétés les plus violentes de l’histoire – avec des taux d’homicides, de meurtres par la police et d’incarcération inquiétants – et sont confrontés à la menace des milices de droite et des terroristes ».

Ainsi, outre les génocides des Amérindiens et des esclaves Afro-américains, l’Empire américain continue à provoquer des interminables holocaustes de par le monde. À semer partout des guerres.

Pourtant, ce pays génocidaire et impérialiste, culturellement criminogène, continue à être présenté comme le modèle politique et social à suivre. Notamment par la France qui, dans le même temps, voue une haine pathologique contre les Arabes, fustige et méprise le monde musulman.

Signe des temps, sous le capitalisme décadent, de nos jours les homicides tuent beaucoup plus de personnes que les conflits armés, selon une étude de l’ONU publiée en 2018. Près de 464 000 personnes dans le monde ont été victimes de violences meurtrières en 2017, soit plus de cinq fois le nombre de personnes tuées dans des conflits armés au cours de la même période. En particulier aux États-Unis, parangon de la « démocratie » et du capitalisme.

Au vrai, l’Amérique, pourtant imprégnée de religiosité chrétienne, demeure une société foncièrement criminogène et belligène, vectrice de délinquance et de crime.

Tout comme la France, fille aînée de l’Église, demeure ce pays de haute culture de la violence et de la haine. (*)

(*) Lire notre article publié dans Algérie54 le 8 février 2023.

 

 

 

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