A la une, Contribution

Tranches de vie palestiniennes

Par Mil Boumaza

Cette nuit, vendredi 27 octobre 2023 — Perdu, hagard, un enfant de 4 ans se tient debout au milieu des décombres.

Brusquement arraché de son sommeil par une puissante frappe de l’armée sioniste qui a pulvérisé son petit chez-lui, il est stupéfait de se trouver à découvert et de ne pas retrouver ce qui faisait, il y a quelques heures à peine, la chaleur de son modeste foyer : son petit édredon, son doudou, sa famille. Il est encore plus effaré de voir tout un groupe d’adultes s’affairer autour de lui et lui tenir des propos qu’il ne saisit guère.
En effet, des secours accourus au bruit des détonations lui assurent, dans un ton se voulant réconfortant, qu’il n’a plus rien à craindre, qu’il est courageux et qu’il vont s’occuper de lui dorénavant. Effrayé de cette sollicitude d’étrangers qu’il n’avait jamais vus auparavant et ne comprenant pas pourquoi sa maman ne vient toujours pas, il se met à pleurer au milieu de toute cette agitation folle et désordonnée. Sans doute comprend-il confusément qu’il est désormais orphelin et seul au monde.
Là-bas, une femme qui tient un petit bras couvert de fine poussière blanche mêlée de sang déjà séché court dans tous les sens, comme possédée. Couvrant de baisers frénétiques cette relique sacrée, elle n’a de cesse de rechercher les restes de celui qu’elle cherissait plus que tout au monde et dont, entre ses bras il y a quelques minutes seulement, elle sentait la douce chaleur et l’odeur si particulière de bébé.
Une seule pensée occupe tout son être : retrouver son adorable petite tête d’ange. Sans doute espère-t-elle, une fois ce petit corps reconstitué, lui redonner vie par je ne sais quelle formule magique ou par la force de son amour maternel. Elle ne sait pas encore que ce petit corps de chérubin, tout à l’heure blotti contre elle et maintenant éparpillé aux 4 vents, est parti aux cieux à sa place pour la protéger d’un éclat d’obus. Elle qui aurait donné sa vie plus de mille fois et souffert mille tortures pour son enfant, pourra-t-elle supporter la torture de cette seule pensée ?
Vendredi 6 octobre 2023 — Des colons sionistes tirent sur des fenêtres cloués de planches de bois en guise de barricade. A l’intérieur de l’appartement, on entend des cris de terreur de femmes palestiniennes qui se jettent à terre avec leurs enfants, les couvrant de leur corps pour les protéger des balles sifflantes et rasantes. Celles-ci s’abattant sur les murs les criblent de trous ainsi que les portraits qui y étaient accrochés, comme tuant symboliquement, en attendant de l’assassiner physiquement, cette famille qui ne veut pas quitter la maison de leurs aïeux.
A quelques pas de là, un petit écolier palestinien de 8 ans, se rendant ou revenant de cours, est mis en joue, dans ce qui avait toute l’apparence d’une embuscade, par un groupe de militaires sionistes. Terrifié par toutes ces armes pointées sur lui dans une ruelle déserte et par cette agression subite d’adultes auxquels il n’aurait pas même songé comparer ses faibles forces, il n’a pu contenir ses sphincters et mouille son pantalon.
Ses tortionnaires, grisés de leur bravoure et d’un sentiment de puissance devant cette « déroute » de leur ennemi, et triomphant de sa « capitulation », ne laissent pas de railler leur victime :  » Est-ce donc là toute la vaillance et la combativité de ces Arabes ? »
Quant à notre malheureux petit écolier, dont le père, aussi loin qu’il se souvienne, a été jeté en prison pour s’être mis en colère contre un colon et le frère a perdu la vie dans une altercation avec un soldat de l’entité, il ne songe qu’à retourner auprès de sa mère, son humiliation étant à cette heure secondaire, avant de resurgir, sans doute plus tard, avec une douloureuse et acerbe acuité.
Ainsi, que ce soit en temps de guerre ou de « paix », le quotidien des Palestiniens est constamment sous le joug et la menace des armes et soumis à la violence et l’impunité de geôliers se croyant au-dessus de toute loi. Souffrances, douleurs et humiliations sont le lot de ce peuple, dont le seul tort est d’exister tout simplement.
Alors qu’en cette heure de folie meurtrière de l’entité sioniste soutenue par les puissances occidentales et le silence, voire la complaisance de certains autres pays, en cette heure terrifible où l’on assiste à une insupportable boucherie, des milliers de Palestiniens ont fait le choix de demeurer sur la terre de leurs ancêtres, s’exposant aux bombardements aveugles et criminels de Tsahal.
Interrogé à ce sujet, Zyad Medoukh, professeur de français à Gaza, répond avec une détermination déconcertante de sérénité : « Je préfère mourir debout dans mon pays que de subir une seconde Nakba ». Il déclare par ailleurs que des milliers d’intellectuels, des universitaires, des étudiants, des écrivains, etc ont également fait ce choix. « Car nos bourreaux peuvent bien nous tuer mais ils ne pourront pas tuer une idée, ni la justice, et encore moins notre juste cause ».
Jamais cette devise ne pourra trouver meilleure illustration et meilleur exemple que dans le peuple palestinien : « La patrie ou la mort, nous vaincrons« 

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