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Zimbabwe : Sortie de crise ?

Par Nora Abdelkrim

Selon un récent rapport de la Banque Mondiale publié le 25 septembre, le Zimbabwe semble être en train de sortir lentement de la crise économique profonde laissée en héritage par le président Robert Mugabe, l’historique combattant de la libération, mais également, despote resté au pouvoir  de 1987 à 2017.

Les mesures prises depuis 2017 dans le secteur agricole commencent à porter leurs fruits.  On se souviendra comment la réforme agraire de Robert Mugabe, en 2000, dans un contexte de sécheresse exceptionnelle, consistant à donner aux paysans africains les terres agricoles de 4000 à 4500 agriculteurs et grands propriétaires zimbabwéens d’origine européenne,  avait plongé dans la famine le peuple de cette puissance agricole, grenier à blé  de l’Afrique et exportatrice.

En mars 2017, face à l’échec de cette réforme démagogique mal préparée et précipitée, dont les premiers bénéficiaires de la redistribution des terres avaient été les corrompus proches de Robert Mugabe, son successeur, Emmerson Mnangagwa, avait annoncé une « réforme de la réforme » et une éventuelle indemnisation des agriculteurs expropriés. Depuis, certains fermiers « blancs » ont été autorisés à récupérer des terres à travers des partenariats locaux.

En 2022, le pays a enregistré sa plus forte récolte de blé, soit 375000 tonnes, atteignant ainsi l’autosuffisance qui lui permet d’économiser 300 millions de dollars, dans un contexte où les pays africains souffrent du blocage des céréales russes et ukrainiennes.

Tout n’est pas réglé pour autant. Le Grain Marketing Board, organisme créé par l’État qui gère les question d’engrais, de semences et de commercialisation des récoltes, connaît un certain nombre de difficultés qui freinent la rétribution des producteurs ou la commercialisation de la production.

Comme le blé, la production de pommes de terre vient d’atteindre un taux d’autosuffisance de 100 %, rapporte le quotidien zimbabwéen The Herald qui souligne qu’en 2016, le Zimbabwé importait la quasi totalité des pommes de terre de table. Les secteurs de la recherche en matière de semences et de nouvelles variétés très actifs, ont, également, largement contribué à cet « exploit ».

Outre les performances dans l’agriculture qui éloignent, pour l’instant, le spectre de la famine, la Banque mondiale note que « le Zimbabwe possède des ressources minérales et naturelles qui peuvent, si elles sont bien gérées, soutenir les objectifs de développement ». Les exportations de minéraux ont bénéficié de la hausse des prix mondiaux. Avec le développement du tourisme, ces deux secteurs  contribuent, aux côtés de l’agriculture, à un PIB de 6,5 % en 2022.

La Banque mondiale note que le déficit budgétaire a été contenu en 2022, mais les opérations quasi budgétaires se sont poursuivies. « Les dépenses supplémentaires, principalement consacrées aux investissements publics, à l’achat de céréales et à la protection sociale, ont été motivées par l’inflation et ont été compensées par une hausse des revenus ». Les revenus ont augmenté en raison de l’inflation élevée et des gains de valeur du taux de change, car certaines taxes étaient perçues en dollars américains. « Le solde budgétaire était excédentaire au premier semestre 2023, le gouvernement ayant ralenti ses dépenses pour contenir l’inflation et les pressions sur les taux de change. Le gouvernement a transféré toutes les opérations quasi budgétaires (QFO) de la Banque centrale au Trésor, ce qui augmentera les paiements d’intérêts au cours du second semestre 2023. L’excédent du compte courant s’est rétréci au cours du premier semestre 2023 en raison du creusement du déficit commercial. a dépassé la croissance des envois de fonds ».

Après s’être fortement déprécié entre le début de l’année 2022 et mai 2023, le taux de change du marché parallèle a commencé à s’apprécier en juin, tombant en dessous de 35 % en juillet 2023, contre plus de 100 % en mai 2023, reflétant en partie l’impact d’une politique monétaire restrictive et du ralentissement  des activités quasi fiscales. L’écart entre les taux de change officiels et ceux du marché parallèle reste instable, note le rapport.

Malgré ces bons indicateurs, la Banque mondiale conclut qu’ en dépit du déclin de l’extrême pauvreté qui avait atteint un pic en 2020, « celle-ci reste importante dans le contexte d’une production agricole cyclique et de prix des produits alimentaires élevés ». Le rapport souligne, également, que l’inflation persistante, la forte dépendance de l’agriculture de faible productivité et les catastrophes ponctuelles comme la sécheresse, les catastrophes naturelles et la pandémie du Covid-19 ont contribué au taux élevé de pauvreté et de vulnérabilité. Enfin, la dette et les intérêts insoutenables envers les institutions financières (Banque mondiale et Fonds monétaire international) continue, comme dans nombre de pays dans le monde sous le joug de ces structures vampiriques,  de freiner le potentiel de croissance.

                                                                                                                 

 

                                                                                                                                      

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