Le couple Dounia et Adnan Filali sont deux journalistes marocains, défenseurs des droits de l’homme et réfugiés politiques bénéficiant de la protection du HCR (en vertu du mandat strict des articles 5 et 6 de la Convention de Genève de 1951) symbolise le combat pour la liberté et la dignité humaine face à la persécution d’Etat exercé par le régime néoféodal du Makhzen.
Aujourd’hui, le couple Filali fait face à la persécution d’Etat du régime néocolonial français, protecteur de la royauté alaouite. Dans cette inerview accordée à Algérie54, Dounia et Adnane Filali, nous livre leur quotidien cauchemardesque, imposé par un régime néocolonial qui vante être de la lumière, de la liberté d’expression. La persécution d’Etat est le mot d’ordre imposé par le très controversé ministre français de l’Intérieur Bruno Retailleau et son préfet de police de Paris Laurent Nunez pour plaire au Commandeur des croyants qui a vendu son pays au plus offrant.
en raison des persécutions qu’ils ont subies et subissent encore aux mains du régime marocain et ses services de renseignement, précise la même source.
Algérie 54: Dans un communiqué en date du 22 mai 2025, vous tirez la sonnette d’alarme sur les persécutions à votre égard (le couple Filali) de la part des autorités françaises.
Quel genre de persécutions?
Le couple Filali: Pour en revenir uniquement aux événements récents évoqués dans le communiqué — car développer le reste ici serait bien trop long —, la persécution administrative que nous subissons est systématique.
Nous avons légalement droit au séjour en France. Plusieurs jugements ont été rendus en ce sens depuis 2023, mais jamais la préfecture de Paris n’a voulu les appliquer. Récemment, notre assurance maladie a été retirée arbitrairement. Lorsque nous avons contacté leurs services, on nous a expliqué qu’il s’agissait d’un « contrôle aléatoire » et que, pour la réactiver, il nous fallait présenter une pièce d’identité. Or, la préfecture refuse illégalement de nous en délivrer une.
Nous ne pouvons effectuer aucune démarche administrative, même si nous souhaitons quitter le pays : en tant que réfugiés politiques, nous avons besoin d’un document de voyage que seule l’administration française est en mesure de nous fournir.
D’une certaine manière, nous sommes prisonniers en France. Et il n’est pas exclu que cela soit une volonté délibérée des autorités françaises, afin de nous maintenir sur leur territoire dans des conditions indignes, pour mieux démontrer au régime marocain leur collaboration active.
Imaginez : au lieu d’exécuter les décisions de justice, ils nous infligent des OQTF (Obligations de Quitter le Territoire Français), dans l’illégalité la plus totale, malgré notre double protection en tant que réfugiés politiques.
C’est une aberration, tant du point de vue du droit que de celui de la dignité humaine.
Algérie54: Vous accusez publiquement le ministre français de l’Intérieur Bruno Retailleau et le Préfet de police de Paris Laurent Nunez, d’être les acteurs clés de ces persécutions, dans le cadre de ce qui est appelé rapprochement maroco-français?
Le couple Filali: Oui, nous mettons en cause Bruno Retailleau et le Préfet de police de Paris Laurent Nunez, car ce sont eux qui portent la responsabilité directe de notre situation. Ils n’exécutent jamais les décisions judiciaires rendues en notre faveur.
Il est flagrant que ces autorités locales sont les principaux responsables. Ils interviennent en bout de chaîne, mais même si ce que nous subissons s’inscrit dans une logique de persécution d’État, ils en sont les agents actifs.
Nous disposons de preuves formelles et officielles — des documents émanant de leur propre ministère — stipulant noir sur blanc que le couple Filali représente un danger pour les relations bilatérales franco-marocaines. Vous pouvez donc imaginer le type de traitement que nous avons pu subir suite à une telle note formulée à notre encontre.
Algérie 54: Comment expliquez-vous les deux poids deux mesures concernant votre cas par rapport à ceux présentés comme des “opposants ” algériens Boualem Sansal et Amir dz, et qui bénéficient d’une large mobilisation en France, sur les plans médiatique, politique et diplomatique dans le cadre de la crise entre Alger et Paris. Quelle lecture faites-vous de ce deux poids deux mesures au nom du respect des droits de l’homme et de la liberté d’expression?
Le couple Filali: L’Algérie, aujourd’hui comme par le passé, est un pays souverain, non aligné et indépendant. La France protège les opposants algériens afin de conserver un levier de pression .
C’est tout le contraire avec le Maroc, qui reste, dans les faits, sous une forme de tutelle ou de protectorat français. La France continue de jouer un rôle de « protecteur » vis-à-vis du régime marocain, et c’est dans ce cadre qu’elle nous réprime — pour son compte.
Elle l’a déjà fait par le passé avec Mehdi Ben Barka, victime d’une élimination physique. Aujourd’hui, c’est contre nous : une élimination symbolique et administrative. Mais la finalité reste la même.
Algérie54: Quel message, comptiez-vous adresser à l’opinion publique internationale?
Le couple Filali: Nous avons connu la liberté et le respect de nos droits en Chine, pays qui nous a accordé le statut de réfugiés politiques. Nous sommes les premiers Marocains de l’histoire à bénéficier de ce statut en Chine qui continue aujourd’hui de nous protéger contre tout risque de refoulement vers le Maroc.
En revanche, en France, nous faisons face à une persécution constante et à un écrasement quotidien de nos droits, orchestrés par les mêmes autorités supposées garantir notre protection.
Il est temps de remettre en question certains discours propagandistes qui désignent certaines nations comme des « dictatures ». L’oppression, nous la vivons ici et maintenant, au cœur même d’un pays européen.
La liberté et le respect, nous ne les avons véritablement expérimentés qu’en Chine — un pays souvent qualifié de dictature, alors qu’il devrait, à bien des égards, inspirer ceux qui, tout en le condamnant, perpétuent eux-mêmes des pratiques répressives et violent ouvertement les droits fondamentaux ainsi que le droit international.
Entretien réalisé par M.Messaoudi et Z.Habibi