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ANALYSE

France : encadrement répressif des jeunes et assiégement sécuritaire et judiciaire de leurs parents criminalisés

Dans cette période de marche forcée vers la guerre généralisée, de militarisation de la société, de résurgence du fascisme, mais également d’exacerbation de la lutte des classes, la bourgeoisie française, par le biais de son État, mène une guerre préventive de neutralisation des populations jugées remuantes et dangereuses, accusées par ailleurs de manquer d’engagement patriotique : les jeunes et les classes populaires de confessionnelle musulmane.

Par Khider Mesloub

Dans cette période de marche forcée vers la guerre généralisée, de militarisation de la société, de résurgence du fascisme, mais également d’exacerbation de la lutte des classes, la bourgeoisie française, par le biais de son État, mène une guerre préventive de neutralisation des populations jugées remuantes et dangereuses, accusées par ailleurs de manquer d’engagement patriotique : les jeunes et les classes populaires de confessionnelle musulmane.

Huit mois après la révolte des jeunes des quartiers populaires, la bourgeoisie française, pour qui les révoltes de l’été 2023 lui laissent encore un arrière-goût de peur panique au fond de son palais buccal empestant la haine de classe, a décidé, sous couvert de lutte contre les  « violences des mineurs », de désamorcer cette bombe à retardement, incarnée par les indomptables et rebelles jeunes et les fières et indociles populations paupérisées d’origine immigrée, majoritairement de confession musulmane. 

Huit mois après la révolte des «Gazaouis de France», ces jeunes « désœuvrés » majoritairement issus de l’immigration, concentrés dans des ghettos où ils sont victimes de ségrégation sociale et spatiale systémique, de stigmatisations culturelle et cultuelle, de contrôle au faciès systématique, d’arrestations arbitraires, de violences policières, le gouvernement Macron vient de finaliser son projet de loi « relatif à la responsabilité parentale et à la réponse pénale en matière de délinquance des mineurs », un texte préparé par le ministère de la Justice depuis des mois. Le projet de loi devrait arriver devant le Parlement en juin après sa présentation en Conseil des ministres. En attendant, Gabriel Attal s’est rendu ce jeudi 18 avril à Viry-Châtillon pour dévoiler sur un ton martial les grandes lignes de ce texte de loi (du roi Macron).

À lire les quelques extraits publiés par le quotidien l’Opinion, le texte de loi aura pour finalité, non pas d’aider socialement la jeunesse anomique en perdition, mais de la réprimer plus brutalement. Et, surtout, de châtier la famille, les parents des jeunes turbulents et déviants, dorénavant ciblés par la police et la justice. Instrumentaliser les violences entre jeunes pour criminaliser essentiellement les parents des mineurs auteurs de délits, tout en exonérant la société inégalitaire et l’État français responsable du délitement social et de l’anomie, tel est le fondement de ce texte de loi. 

Ce texte de loi est donc axé essentiellement sur le volet répressif, le registre punitif. Selon l’Opinion, ce nouveau dispositif gouvernemental vindicatif a pour objectif d’octroyer davantage de pouvoirs aux forces de répression, d’aggraver les peines pénales encourues par les jeunes turbulents des quartiers populaires et par leurs parents. Autrement dit, d’ouvrir un nouveau front de guerre. Mais de guerre de classe que la bourgeoisie française belliciste mène férocement aux plus pauvres.

Cette riposte vindicative étatique contre la jeunesse turbulente et remuante vise essentiellement, par la multiplication des moyens répressifs et le durcissement des peines, à préserver l’ordre établi.

Pour le gouvernement Macron, la mère des maux des quartiers populaires n’est pas la pauvreté, mais la maman, le papa, c’est-à-dire la famille (les parents) du jeune déscolarisé, une famille jugée coupable de négligence parentale et de laxisme éducatif.

Et comment le gouvernement Macron compte-t-il remédier au désœuvrement et à la désocialisation des jeunes des quartiers populaires, précipités dans l’engrenage des incivilités et de la délinquance par une société en plein délitement social et naufrage économique ? 

Une fois de plus, le gouvernement Macron propose un dispositif fondé, non pas sur l’encadrement socio-éducatif des jeunes, mais sur l’assiégement sécuritaire et judiciaire de l’ensemble de leurs familles par des policier, des militaires et des juges. Pour le régime policier et militariste macroniste, la France des banlieues ne souffre pas de crise économique, mais d’une crise de l’autorité. 

« Nous avons besoin d’un sursaut d’autorité », a martelé le chef du gouvernement militariste, Attal. « L’autorité et la règle commune sont trop souvent défiées par certains jeunes », a déploré le premier ministre, faisant allusion aux révoltes des jeunes de l’été 2023, toujours pas digérées par la bourgeoisie française apeurée. Aussi, « La République doit contre-attaquer », a-t-il ajouté. Y compris par des moyens les plus répressifs. Ainsi, Attal a sonné la « mobilisation générale » contre les jeunes turbulents et leurs parents. 

Pour discipliner les collégiens des quartiers populaires, Gabriel Attal veut les obliger à être présents à l’école entre 8 heures et 18 heures, quel que soit leur emploi du temps. Pour information, après avoir évoqué « tous les collégiens », Matignon a dû rétropédaler en précisant que cette large plage horaire (50 heures par semaine ; si l’on y ajoute, comme c’est le cas du département de la Guadeloupe, le couvre-feu appliqué à partir de 20 heures, les jeunes n’auront plus aucun laps de temps pour se distraire, se divertir dehors) serait « réservée aux collèges en zone d’éducation prioritaire », c’est-à-dire les quartiers populaires. Le gouvernement oligarchique macronien n’allait pas appliquer les mêmes règles oppressives et répressives aux élèves des classes bourgeoises.

Le gouvernement veut ainsi transformer les établissements scolaires populaires en « structures pénitentiaires », en « goulags éducatifs » (le Goulag désigne le système de camps de travaux forcés, en URSS, où étaient principalement détenus des adversaires supposés du régime. Le régime oligarco-policier macroniste veut embastiller les jeunes élèves des quartiers populaires frondeurs pour les soumettre à des travaux scolaires forcés. Pire, pour conjurer les fréquentes révoltes juvéniles estivales, le chef du gouvernement militariste macroniste, Attal, veut avancer la rentrée scolaire uniquement pour les élèves des quartiers populaires,  c’est-à-dire raccourcir leurs vacances d’été, une mesure éminemment discriminatoire et stigmatisante). Autrement dit, en embastillant les élèves il veut les soustraire à leur famille car jugée inapte et nuisible, « défaillants » selon l’expression euphémistique usuelle du gouvernement. Pire, le chef du gouvernement militariste, Attal, veut transformer les internats en centres de redressement. Il a évoqué sa volonté d’envoyer en internat les élèves « à la dérive ». Là également, le gouvernement militariste macroniste veut arracher les enfants à leurs parents durant toute l’année scolaire. Il veut également transformer le dossier Parcoursup de l’élève en casier judiciaire.  

Les syndicats, vent debout, ont dénoncé cette mesure répressive militariste. La députée LFI Farida Amrani a fustigé « la posture autoritaire » de Gabriel Attal.  Elle se dit « dégoûtée par cette posture autoritaire qui consiste à incriminer sans cesse les parents ».

Pour sa part, Fabien Roussel, le secrétaire national du Parti communiste, a pointé la « violence » des annonces de Gabriel Attal. « On devrait surtout proposer des travaux d’intérêt général aux ministres incompétents, responsables d’un déficit inédit, qui exonèrent les riches et font payer leurs erreurs aux français ! », a réagi sur X Fabien Roussel. Quant à la députée écologiste Sandrine Rousseau, elle a accusé Gabriel Attal de « stigmatiser une jeunesse ». « Les annonces sur la jeunesse du gouvernement sont dramatiques », a lancé sur X la députée écologiste, citant, au passage, le « couvre-feu » décrété par Gérald Darmanin à Pointe-à-Pitre.

De leur côté, les deux principaux syndicats de magistrats (USM et SM) ont exprimé leurs inquiétudes quant aux annonces du Premier ministre pour lutter contre la « violence des mineurs ». Le Syndicat de la magistrature a évoqué des mesures « hautement préoccupantes ». Il s’est inquiété de mesures qui esquissent selon lui une « justice toujours plus expéditive et stigmatisante ». 

Le principal syndicat des éducateurs de la Protection judiciaire de la jeunesse, le SNPESS-PJJ, a quant à lui fustigé la dérive autoritaire du gouvernement. « Un mineur délinquant est avant tout un mineur à protéger », a tenu à rappeler Marielle Hauchecorne, sa co-secrétaire nationale. Elle a estimé que les annonces du Premier ministre tendent à remettre en cause « la primauté de l’éducatif » et de la prévention. En misant sur le tout répressif, le gouvernement mène « une course à l’échalote avec l’extrême droite », a-t-elle ajouté. 

L’UNICEF France a également exprimé sa vive préoccupation à l’égard des mesures répressives annoncées dans le discours de Gabriel Attal. « Alors que le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies a exhorté la France, en 2023, à aligner son système de justice pénale des mineurs sur la Convention internationale des droits de l’enfant, ces nouvelles mesures risquent de porter atteinte aux principes fondamentaux qui favorisent la primauté de l’aspect éducatif sur le répressif et encouragent le relèvement de l’enfant », a souligné Adeline Hazan, présidente de l’UNICEF France, dans un communiqué. 

Ainsi, prétextant vouloir « restaurer la parentalité », le texte de loi cible les parents de mineurs ayant commis des infractions à la loi. D’après L’Opinion, les parents pourraient se voir écoper d’un « stage de responsabilité parentale » ou d’une amende, et pourraient avoir à verser une « contribution citoyenne éducative ». Ils devront également être « solidairement responsables » des dégâts causés par leur enfant, et devront en payer les frais. 

Voilà la riposte vindicative et punitive « à l’israélienne » menée par le gouvernement oligarchique et belliciste macroniste contre la jeunesse turbulente, sécuritairement gazaouisée : bombarder leurs familles à coups de punitions financières, de privation de prestations sociales, les pilonner à coups de multiples sanctions, humiliations, stigmatisations, intimidations, criminalisations.

Au lieu d’aider les parents précipités dans la pauvreté par l’hyperinflation et la défaillance des services publics orchestrés par l’État des riches, le régime macroniste s’acharne à les criminaliser et les sanctionner encore plus durement.

Plus grave, le régime militariste macroniste veut sévir contre les enfants jugés turbulents dès l’école primaire (pourquoi pas dès la maternelle, voire dès leur naissance). Dans son discours musclé, Gabriel Attal a annoncé la création, la rentrée prochaine, de commissions éducatives dès l’école primaire pour proposer des « peines adaptées » aux élèves. Il a rappelé qu’« un décret a été pris en août dernier qui permet les exclusions d’élèves dans le premier degré ». 

Selon l’Opinion le texte de loi prévoit pour les mineurs un durcissement répressif des lois pénales. La loi prévoit l’instauration de nouvelles mesures de privation de liberté contre les mineurs, notamment l’incarcération de ces derniers dans des établissements pénitentiaires. 

Parmi les autres mesures coercitives et restrictives figure, dans l’arsenal répressif gouvernemental, le bannissement numérique, c’est-à-dire la suspension d’un compte pendant six mois. Un véritable blocus numérique. Or, la source des violences qu’instrumentalisent le régime macroniste ne se situe pas dans les réseaux sociaux, comme le colportent les politiciens et les médias français, mais dans un système capitaliste qui ne fait que précariser, stigmatiser et criminaliser les jeunes issus des classes populaires, en particulier de confession musulmane.

De fait, le gouvernement Macron vient de finaliser la rédaction d’un texte de loi punitif inspiré des méthodes vindicatives répressives israéliennes. En effet, à l’exemple des punitions collectives infligées aux Gazaouis par l’État israélien, le gouvernement Macron applique pareillement une politique de châtiment collectif à l’encontre de l’ensemble des membres de la famille de tout jeune déviant.

Enrégimenter les jeunes turbulents ou déviants dans les établissements de redressement ou dans l’armée, astreindre leurs parents à des peines de travaux d’intérêt général, voire, pour certains, les bannir des logements sociaux, telles sont les nouvelles mesures punitives inscrites dans le nouveau texte de loi en voie d’adoption par le gouvernement de Macron. 

Cela étant, les mesures d’encadrement répressif des jeunes et d’assiégement sécuritaire et judiciaire de leurs parents criminalisés décrétées par la bourgeoisie française sont vaines. Car, en dépit de son « opération sursaut d’autorité » visant à se procurer à bon compte un assoupissement des tensions sociales et une neutralisation des agitations juvéniles populaires, la bombe sociale lui explosera infailliblement à sa hideuse figure vérolée de racisme et de bellicisme. 

Khider Mesloub 

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