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MBS en souverainiste , Biden et la désindustrialisation de l’Europe

Coup dur pour l’hégémonie américaine, l’Arabie Saoudite n’a accordé aucun intérêt aux menaces de l’administration américaine de Biden, voire aux députés démocrates, et a décidé en  compagnie des membres de l’OPEP+ de  réduire la production pétrolière de deux millions de barils/ jour, une décision qualifiée par les américains d’estocade et de soutien à la Russie dans sa guerre en Ukraine.

L’Opep+ a décidé ce 5 octobre d’une coupe drastique des quotas de production de pétrole pour soutenir les prix, s’attirant aussitôt les foudres de la Maison Blanche qui a accusé le cartel de «s’aligner» sur Moscou.

A bord de l’avion Air Force One, la porte-parole de la Maison Blanche Karine Jean-Pierre a enfoncé le clou. «Il est clair qu’avec sa décision», l’alliance «s’aligne avec la Russie», a-t-elle déclaré. C’est «une erreur».

Dans le même cadre, trois démocrates de la Chambre des représentants ont présenté un projet de loi visant à mettre fin à la présence de troupes américaines en Arabie saoudite et dans les Émirats arabes unis (EAU), en réponse à l’annonce faite cette semaine par l’OPEP et ses alliés de réduire la production de pétrole.

L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, qui représentent ensemble environ 30 % des réserves mondiales de pétrole brut, comptent quelque 5 000 soldats américains stationnés sur place. Outre le retrait de ces troupes et des systèmes de défense antimissile américains des deux pays, la législation introduite par les représentants Sean Casten (D-Ill.), Tom Malinowski (D-N.J.) et Susan Wild (D-Pa.) prévoit le transfert de toute la technologie et des systèmes de défense américains ailleurs dans la région. « Cette décision marque un tournant dans nos relations avec nos partenaires du Golfe (Persique). Si l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis espèrent maintenir une relation avec les Etats-Unis qui leur a été extrêmement bénéfique, ils doivent faire preuve d’une plus grande volonté de travailler avec nous – et non contre nous – pour faire avancer ce qui est maintenant notre objectif de sécurité nationale le plus urgent : vaincre l’agression de la Russie en Ukraine », ont déclaré les trois législateurs américains dans un communiqué.

Le président américain Joe Biden s’est rendu dans le royaume en juillet pour demander à ses dirigeants d’augmenter la production de pétrole.

MBS, sur la bonne voie de la souveraineté

Le Prince héritier saoudien Mohamed Bin Salmane MBS confirme à travers cette décision de l’OPEP+, que sa rupture avec l’administration Biden est consommée. Une administration qui n’a pas cessé de l’épingler sur le dossier le respect des droits de l’homme( affaire de l’assassinat de Jamal Khashoggi) qualifiant même MBS de paria. Aujourd’hui, ce dernier est devenu plus fréquentable, et sera plus fort si son pays intègre le BRICS. Sa décision de réduire la production pétrolière arrive au mauvais moment pour les démocrates donnés vaincus dans les élections de novembre à mi-mandat de Biden.

Washington de plus en plus critiqué par ses alliés

A l’occasion d’un entretien accordé à un journal local Neue Osnabrücker Zeitung, le ministre allemand de l’Economie Robert Habeck a regretté le prix élevé du gaz commercialisé par les Etats-Unis mais également par des pays dits «amis».

Le ministre allemand de l’Economie a déploré ce 5 octobre les prix élevés exigés par les pays «amis» de l’Allemagne, Etats-Unis en tête, pour fournir le gaz permettant de compenser la fin des livraisons russes. «Certains pays, mêmes amis, réussissent parfois à obtenir des prix astronomiques», indique  Robert Habeck . «Cela pose problème» ajoute-t-il. «Les Etats-Unis se sont tournés vers nous lorsque les prix du pétrole ont explosé […]. Je pense qu’une telle solidarité serait également utile pour amortir les prix du gaz», a-t-il jugé.

L’Europe perd son industrie, au profit des USA

L’abandon du gaz russe coûtera cher à l’Europe , et ce n’est pas aléatoire si la Commission européenne avait  estimé à 565 milliards d’euros le coût du non-emploi du gaz russe et le passage aux énergies renouvelables. Selon ce plan, à partir de 2027, l’UE installera des panneaux solaires sur tous les bâtiments commerciaux et publics, et à partir de 2029, leur installation est prévue sur les nouveaux bâtiments résidentiels. Est-ce que l’UE réussira une telle réorientation énergétique et pourquoi risque-t-elle de perdre son industrie et de devenir une union agraire? .

Les panneaux solaires pourraient-t-il se substituer au gaz russe durant le rude hiver,  pour la production de chaleur et d’électricité. Croire que pendant l’hiver les panneaux solaires vont produire de l’énergie est une idée exotique. Il y a souvent un temps nuageux et des heures de clarté courtes. Pour cet objectif, il sera nécessaire de construire une forte quantité de tels panneaux solaires, provoquant des investissements nettement plus importants que les 565 milliards d’euros annoncés.

Conséquence de l’abandon du gaz russe: le plus grand constructeur automobile européen, Volkswagen (VW), annonce qu’il déplacera sa production hors d’Allemagne si la pénurie de gaz dure plus longtemps que cet hiver. L’entreprise possède des installations de production en Chine et aux Etats-Unis, où les prix de l’énergie sont beaucoup moins chers qu’en Allemagne. VW peut subir une année des pertes en Allemagne, mais elle peut ensuite augmenter progressivement sa production en dehors de l’UE, tout en réduisant sa production au sein de l’UE.

Autrement dit, si les prix du gaz en Europe restent élevés pendant plusieurs années, les entreprises européennes commenceront à transférer leur production là où l’énergie est moins chère. C’est le cas pour les industries énergétivores comme les industries automobiles, de chimie, métallurgie des non-ferreux ou d’autres secteurs. De grandes multinationales déclarent déjà qu’elles réduisent leurs investissements en Europe et les augmentent en Amérique, où le coût de l’énergie est plusieurs fois inférieur.

Apparemment , cet état de fait mène directement vers la désindustrialisation de l’Europe contrainte de réduire sa consommation d’énergie. Mais, le bien-être économique de l’UE repose sur son industrie. Si nous assistons à la dégénérescence de l’industrie, les Européens seront confrontés à une grave baisse du niveau de vie. De plus, il sera difficile de financer l’énergie verte vers laquelle l’UE veut passer. Un système d’énergie renouvelable est moins efficace qu’un système traditionnel et a besoin de subventions pour fonctionner. Alors, où Est-ce que l’UE trouvera de l’argent s’il n’y a pas d’industrie?

Pendant la crise énergétique des années 1970 et 1980, les Etats-Unis étaient dans la même grave crise énergétique que l’Europe mais la Chine n’existait pas encore en tant que puissance économique mondiale. Aujourd’hui, les choses ont changé et aux Etats-Unis, les prix de l’énergie sont plusieurs fois inférieurs à ceux de l’Europe, et une économie forte a émergé face à la Chine, où les prix de l’énergie sont également nettement inférieurs à ceux de l’Europe. Cela crée des opportunités pour le flux d’activité économique de l’Europe vers les Etats-Unis et la Chine, ce qui n’était pas le cas dans les années 70.

Les principaux bénéficiaires de toute cette situation en Europe et de son rejet du gaz russe sont les Etats-Unis et la Chine, mais aussi la Russie qui est en train d’adapter son marché ailleurs et autrement. Le marché européen des ventes se contractera sérieusement en raison de la désindustrialisation. L’Europe payera sans aucun doute le prix de ses choix hasardeux , la myopie de ses dirigeants devenus des girouettes par excellence de l’Oncle Sam.

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