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 Les journalistes palestiniens, cibles privilégiées de Tsahal

 Par  Nora Abdelkrim

Selon le Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ) et le Syndicat des journalistes palestiniens (SJP) basé en Cisjordanie occupée, dix journalistes palestiniens et un Israélien ont été tués dans les neuf premiers jours du conflit, deux ont disparu et vingt ont été blessés. Les journalistes palestiniens qui couvrent les attaques terrestres et  aériennes des forces armées israéliennes à Gaza et en Cisjordanie, en première ligne, sont particulièrement exposés aux risques. Les  journalistes sont pris pour cibles par les forces israéliennes alors que ce sont « des civils accomplissant  un travail important en tant de crise », a déclaré Sherif Mansour, le coordinateur du CPJ pour le Programme Moyen Orient/Afrique du Nord. Des citoyens qui « font de grands sacrifices » et pour lesquels « des mesures de sécurité doivent être prises pour arrêter ce lourd bilan ».

Le CPJ a publié, également, la liste des journalistes tués sur le terrain. Une façon de leur rendre hommage :

7 octobre

Tués

Yaniv Zohar, photojournaliste israélien du journal Israel Hayom, tué  en mission lors de l’attaque par le Hamas du kiboutz Nahal-Oz

Mohammad Al-Salhi, photojournaliste de l’agence de presse Fourth Authority, tué en mission près d’un camp de réfugiés palestiniens au centre de la bande de Gaza, selon l’agence officielle palestinienne Wafa

Mohammad Jarghoun, journaliste de Smart Media, tué dans la zone Est de Rafah, à la frontière égyptienne

Ibrahim Mohammad Lafi, photojournaliste de Ain-Media, tué au check point d’Erez,  seul point de passage entre Israël et Gaza

Détenu par l’armée israélienne                                                                                                                                                         

– Nidal al-Wahidi, photojournaliste de la chaîne Al-Najah

Disparus

Haitham Abdelwahid, photojournaliste palestinien de Ain-Media

Roee Idan, photojournaliste israélien dont la femme a été tuée, sans doute pris en otage par le Hamas avec sa fille de 3 ans. Il travaillait ce jour-là, selon le CPJ.

Blessés

Ibrahim Qanan, correspondant de la chaîne AL-Ghad, blessé par un éclat d’obus à Khan Yunis dans le sud de la bande de Gaza.

Firas Lutfi, correspondant de Sky News Arabia, agressé à coup de crosses de fusil par la police israélienne, avec d’autres journalistes de la chaîne dans la zone sud de la ville d’Ashkelon, selon des membres de l’équipe. Forcé de se déshabiller et de quitter la zone sous escorte policière.

8 octobre

Tué

Assaad Shamlakh, journaliste free-lance, tué avec neuf membres de sa famille au cours d’un raid aérien israélien dans leur maison de Sheikh Ijlin, banlieue sud de Gaza, selon The Legal Agenda, une organisation indépendante basée à Beyrouth, et BBC Arabic

9 octobre

Tués

Saeed al-Taweel, rédacteur en chef du site Al-Khamsa News, tué par un raid aérien israélien dans une zone abritant plusieurs organes de presse dans le district de Rimal, ouest-Gaza, particulièrement la Tour Hiji.

Mohammed Sobh, photojournaliste de « Khabar » News Agency, tué également dans le bombardement de Rimal

Hisham Alnwajha, journaliste de « Khabar » News Agency tué dans le même bombardement.

11 octobre

Tué

Mohamed Fayez  Abu Matar, journaliste free-lance tué lors d’une frappe aérienne à Rafah, dans le sud de Gaza 

12 Octobre 

Tué

– Ahmed Shehab, journaliste de la radio  Sowt-Al Asra, (La voix des prisonniers), tué dans sa maison avec sa femme et ses trois enfants, par une frappe aérienne israélienne, à Jabalia, dans le nord de Gaza

13 octobre

Tués

Husam Mubarak, journaliste de la radio du Hamas, Al Aqsa Radio, tué par une frappe israélienne dans le nord de Gaza

Issam Abdallah, videojournaliste basé à Beyrouth pour Reuters, tué au cours d’un bombardement israélien à la frontière libanaise. Il couvrait avec un groupe de journalistes les échanges de tirs d’obus près d’Al-Shaab, dans le sud-Liban entre les forces israéliennes et un groupe du Hezbollah libanais.

Blessés

Tous les journalistes qui suivent ont été blessés au cours du même bombardement que celui qui a tué Issam Abdallah au sud-Liban :

Thaer Al-Sudani, journaliste de Reuters, 

Maher Nazeh, journaliste de Reuters                                                                                                     

Elie Brakhya, journaliste d’Al Jazeera TV

Carmen Joukhadar, journaliste d’Al Jazeera TV

Christina Assi, photojournaliste pour l’Agence France Presse (AFP)

Dylan Collins, videojournaliste de l’AFP

Prendre pour cible les journalistes et les media palestiniens est une pratique des forces armées israéliennes depuis la première Intifada, particulièrement. Arrestations, détention administratives sans limite, torture, disparitions, bagnes dans le désert du Neguev, contrôle quotidien et censure systématique, destruction des locaux et équipements des media palestiniens, cela fait des dizaines d’années que le gouvernement sioniste met tout en œuvre pour priver les Palestiniens et le reste du monde de leur droit d’expression et à l’information. 

Le 3 juillet 2023, par exemple, Amid Shehadeh et Rabi Munir, journalistes de la chaîne qatari Al-Araby couvrait une opération des Forces israéliennes de Défense (IDF) contre des militants du camp de réfugiés de Jenin, en Cisjordanie, lorsqu’un véhicule militaire a détruit complètement leur matériel. Les journalistes durent se réfugier dans une maison avec des confrères turcs et russes avant d’être escortés par des représentants de la Croix Rouge et du Croissant Rouge et évacués par ambulance à l’hôpital. Douze Palestiniens ont été tués, ce jour-là, au cours de l’opération des Forces armées israéliennes, selon les Nations Unies. 

À Jenin comme dans le reste de la Palestine occupée où les Forces israéliennes interviennent régulièrement, les attaques contre les journalistes sont fréquentes et meurtrières. Le 11 mai 2022,   la célèbre journaliste  américano-palestinienne d’Al-Jazeera, Shireen Abu Akleh était tuée d’une balle tirée par un soldat israélien, en pleine rue,  alors qu’elle se trouvait à Jenin en reportage sur les conséquences d’un récent raid militaire israélien. Toutes les preuves de la responsabilité d’un soldat israélien et de la volonté de tuer la journaliste  ont été apportées suite aux témoignages et aux enquêtes menées par des grands media internationaux tels que le Washington Post ou le New York Times, ainsi que par le Comité de l’ONU pour les Droits de l’Homme.  Sans suite.  En outre, le cortège des  funérailles de la journaliste internationalement connue pour être la voix des Palestiniens en territoires occupés, a été violemment attaqué par les forces de police. 

Plus de cent membres du Congrès américain ont demandé une enquête officielle américaine suite à une lettre signée par plus de 60 organisations – y compris des organisations juives comme Center for Jewish Nonviolence ou Jewish Voice for Peace Action –    envoyée au Congrès. La pétition demandait  de soutenir la demande d’enquête non seulement sur les véritables responsables de ce crime, mais, également, sur l’utilisation des fonds américains versés à l’armée israélienne. « Les États-Unis d’Amérique ont une obligation morale et légale de garantir que leur aide militaire n’est pas  utilisée pour soutenir les actions qui violent la loi internationale sur les droits  humanitaires et humains », peut-on lire. « L’assassinat de Shireen Abu Akleh  fait partie d’un modèle systémique d’abus des droits humains contre les Palestiniens et la liberté de la presse par l’armée israélienne », écrivent les signataires. Depuis plus de vingt ans, le Comité de Protection des Journalistes a enregistré au moins vingt cas d’assassinat de journalistes tués par l’armée israélienne, majoritairement palestiniens.  Malgré les enquêtes menées par les forces armées, personne n’a été jugé, ni tenu responsable de ces assassinats .

Pour la première fois, une plainte a été déposée auprès du Bureau du Procureur général de la Cour pénale internationale de la Haye. Elle est  signée par la famille de Shireen Abu Akleh, le Syndicat des journalistes palestiniens et la Fédération internationale des Journalistes. 

 Lire aussi  https://cpj.org/reports/2023/05/deadly-pattern-20-journalists-died-by-israeli-military-fire-in-22-years-no-one-has-been-held-accountable/ 

                                                                                                                                                               

                                                                                                                   

                                                                                                       

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