Par Dr. Rachid TRIDI
Cette année encore la commémoration de cette date historique intervenue un certain 6 mai 1966, dans l’ensemble des unités minières algériennes, constitue un jalon indélébile dans l’histoire économique et politique du pays, relatant le passé, la souffrance et la solidarité des mineurs algériens.
La décision audacieuse, prise par le défunt Houari Boumediene, chef de l’Etat algérien, a marqué une étape décisive dans l’affirmation de la souveraineté nationale sur ses ressources naturelles, longtemps exploitées sous le régime colonial.
Cet acte fondateur a non seulement permis à l’Algérie de reprendre le contrôle de son patrimoine minier, quatre ans après l’indépendance, sur les grandes mines en exploitation, mais a également jeté les bases d’une politique économique plus indépendante et axée sur le développement national.
Dans ce sillage, la nationalisation des mines avait, également, ouvert la voie, cinq années avant, à l’historique nationalisation des hydrocarbures, intervenue un certain 24 février 1971.
Avant l’indépendance, le secteur minier algérien était largement dominé par des intérêts étrangers, principalement français. Des gisements importants de fer, de phosphate, de zinc, de plomb et d’autres minéraux étaient exploités au profit de compagnies étrangères, avec des retombées très limitées pour l’économie locale.
A ce propos, et pour n’évoquer que le minerais de fer, il convient de rappeler que les dizaines de millions de tonnes du minerais de fer en volumes extraits, ont permis des réalisations et ouvrages qui sont en grande partie, sur le sol français, pour ne citer que :
-La charpente du magasin Le Bon Marché à Paris (1876)
-La charpente du lycée Carnot-Le dôme de l’observatoire de nice
-Les Ateliers Berthier à Paris, avec Charles Garnier-Le viaduc de la Souleuvre dans le Calvados
-Le pont-canal de Briare
-La charpente de la statue de la liberté fabriquée en France…etc,
et bien d’autres ouvrages et réalisations, de plus grande importance, ayant servi à l’industrialisation de la France.
La nationalisation est venue donc rectifier une situation qui n’avait que trop durer, en plaçant ces ressources stratégiques sous le contrôle et la gestion de l’État algérien.
Les nouvelles générations ont le droit de savoir, que la mesure de nationalisation des douze principales mines, prises par un vaillant dirigeant, a provoqué une onde de choc dans le milieu des affaires français.
A noter également que la présence des patrons français à la tête des mines algériennes, quatre années après l’indépendance, était ressentie comme la continuité de l’exploitation coloniale et comme une immense humiliation par tous les patriotes sincères et engagés.
Les cadres et techniciens formés pendant la lutte de libération et ceux qui étaient en fonction dans les unités minières se sont trouvés, alors, engagés dans une aventure humaine exceptionnelle en prenant le contrôle de toutes les activités extractives, remplaçant les départs du personnel français, rétablissant ainsi, les niveaux des activités qui ont permis au pays de récupérer sa totale liberté d’action, couronnés par la création de la fabuleuse Société Nationale de Recherche et d’Exploitation Minière « SONAREM ».
La création de la Société Nationale de Recherches et d’Exploitations Minières (SONAREM) le 11 mai 1967 a fini par concrétiser cette volonté de maîtrise nationale. Cette entreprise publique, avait pour missions d’explorer, d’exploiter, de transformer et de commercialiser les richesses minières du pays. La nationalisation et la mise en place de la SONAREM ont permis à l’Algérie de bénéficier plus directement des revenus générés par son sous-sol et d’orienter l’exploitation minière vers la satisfaction des besoins nationaux en matières premières et vers la contribution au développement industriel.
Au fil des décennies, le secteur minier algérien a connu des restructurations et des réorganisations, en fonction des politiques nationales de l’époque, avec la création de nouvelles entreprises publiques et l’évolution des politiques d’investissement.
Aujourd’hui, le groupe industriel minier SONAREM, avec ses douze filiales opérationnelles, regroupe les entreprises publiques du secteur, soutenu par la nouvelle stratégie des pouvoirs publics, poursuit les efforts pour valoriser le potentiel minier du pays et contribuer à la diversification de l’économie algérienne.
L’Algérie ambitionne de développer davantage son secteur minier, notamment à travers l’exploration de minéraux stratégiques et de terres rares, dans le but d’accroître la valeur ajoutée et de réduire sa dépendance aux hydrocarbures.
Il est à rappeler que les mines algériennes, pendant la colonisation française, étaient considérées comme la première source de matières premières pour l’industrie française lui fournissant des quantités très significatives de minerais essentiels tels que le fer, le cuivre, le marbre, le plomb et le zinc.
Les aciers produits à partir du minerai algérien étaient utilisés dans diverses industries en France, notamment la coutellerie, l’armurerie et la fabrication d’instruments chirurgicaux.
La nationalisation des mines en 1966 a marqué une rupture avec ce modèle d’exploitation et a permis à l’Algérie de prendre en main la gestion de ses ressources naturelles pour son propre développement.
Aujourd’hui, avec le groupe SONAREM et la nouvelle stratégie adoptée, plusieurs signaux sont de plus en plus perceptibles annonçant une future transformation globale du secteur qui se prépare à jouer un rôle déterminant dans le développement économique du pays.
Par Dr Rachid Tridi
Ex-cadre dirigeant du secteur minier et Expert en management