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La France flambe : les quartiers populaires consumés par la rage autodestructrice

Par Khider Mesloub

De nouveau, la France est en proie à des tensions. La France s’embrase. Quand ce ne sont pas des meutes de CRS qui provoquent violences et chaos par leurs interventions musclées, ce sont les émeutes de bandes de jeunes désœuvrés qui flambent les infrastructures. Mais point les institutions.

Depuis l’exécution de Naël, toutes les nuits les communes françaises s’embrasent. Les banlieues s’électrisent. Des émeutes éclatent. Chaque matin, les Français, constatent, avec effarement, sur leur écran les désolations, les dégâts de la nuit,

le pillage massif des supermarchés, la destruction des bâtiments institutionnels (mairies), l’incendie des tramways et bus.

Et l’appel au calme du président Macron n’aura pas suffi à éteindre le feu de la colère des jeunes. Au contraire, il s’est propagé de la capitale à la province, notamment à Lille, Amiens, Lyon, ou encore à Toulouse, où une centaine d’individus ont tiré des projectiles sur les forces de l’ordre.

En Ile-de-France, en particulier dans les Hauts-de-Seine, théâtre d’affrontements entre habitants et forces de l’ordre, plus d’une dizaine de voitures et des poubelles ont été incendiées, et des barrières ont été dressées sur la route. Pis. Le poste de sécurité de l’entrée du domaine de la prison de Fresnes a aussi été attaqué au mortier d’artifice par des émeutiers.

Curieusement, l’État policier français investit des centaines de milliards d’euros pour équiper la police et l’entraîner à écraser les émeutes, mais il est incapable d’assurer l’ordre dans les banlieues. Pour assurer la sécurité des milliers de communes menacées d’embrassement par les émeutes, l’État n’a mobilisé ces dernières nuits que 2000 policiers. En revanche, pour une simple manifestation organisée par des travailleurs pacifiques, l’État déploie régulièrement des escadrons de 15 000 policiers pour intimider, terroriser, mater les manifestants.

En tout cas, la France fait face à une situation électrique, faisant resurgir le spectre des émeutes de 2005. On se souvient qu’en 2005, durant l’automne 2005, pendant plusieurs semaines, les banlieues de Paris et d’autres grandes villes françaises avaient été saccagées par le mouvement de révolte, pareillement à la suite de la mort de deux adolescents, Zyed Benna et Bouna Traoré, électrocutés dans l’enceinte d’un poste électrique en cherchant à échapper à un contrôle de police à Clichy-sous-Bois. Au cours de ces trois semaines d’émeutes, près de 10 000 voitures avaient été incendiées, 300 bâtiments publics dégradés ou brûlés. En outre, près de 6 000 personnes avaient été interpellées, dont plus d’un tiers étaient des mineurs, et 1300 écroués. Trois semaines d’émeutes qui auront fait vaciller l’ordre bourgeois. Pour endiguer ces émeutes inédites, le 8 novembre, le gouvernement Villepin avait décidé, en application de la loi du 3 avril 1955, adoptée durant la guerre d’Algérie, de décréter l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire métropolitain. Les préfets reçurent ainsi l’autorisation d’instaurer si besoin le couvre-feu. Et le président de l’époque, Jacques Chirac, avait dû intervenir à la télévision pour rassurer la population tétanisée et apeurée.

Une chose est sûre, ce type d’émeutes est l’expression du sentiment de détresse sociale causée par la décomposition du capitalisme, réduit à investir des milliards pour équiper ses forces de l’ordre afin de pérenniser son système moribond, et non pour équiper ces « forces vives de la nation » en vue de leur assurer un avenir radieux.

Pour autant, par leur absurdité et irrationalité, ces émeutes traduisent le degré du désespoir d’une jeunesse paupérisée privée de toute perspective d’insertion sociale, d’une stabilité professionnelle.

L’absurdité de ces émeutes est manifeste. Car ce ne sont nullement dans les quartiers riches habités par les bourgeois que les jeunes déchaînent leurs actions violentes, mais dans leurs propres quartiers, devenant encore plus sinistrés et invivables qu’auparavant.

Animés d’un esprit de désespoir et de haine, portés par une mentalité façonnée par l’autodestruction et le « no future », générée par la faillite du système capitaliste vecteur d’anomie, les jeunes banlieusards sombrent dans la stérilité émeutière. Dans la culture de la violence gratuite et autodestructrice. L’esprit enfiévré d’une colère aveugle et d’un ras-le-bol désespéré, ils se livrent à des actions violentes absurdes et nihilistes.

Quoique leurs actions émeutières soient compréhensibles, les jeunes se trompent de cibles. Certes, la révolte des jeunes prolétaires des banlieues contre la misère, le racisme, l’oppression, la violence policière, est légitime. Mais ces jeunes ne doivent pas inscrire leur lutte dans une configuration anarchique autodestructrice, mais dans une dynamique collectivement offensive et socialement émancipatrice, en association avec le mouvement ouvrier qui certes est de nouveau combatif, mais, par corporatisme et nombrilisme professionnel, ignore totalement le désarroi de la jeunesse, ses cris de détresse.

En fait, la jeunesse, plus vaillante, accomplit la tâche subversive des lâches adultes travailleurs veules, mais avec l’inconscience et l’immaturité qui caractérisent cette tranche d’âge, avec des moyens de fortune : sa rage enfantine, sa colère autodestructrice. Dans une dynamique d’automutilation infrastructurelle et suicide urbain. Malheureusement, par ses émeutes autodestructrices, elle sera encore plus démunie et appauvrie. Stigmatisée et ostracisée. Car elle n’a pas su détruire les fondements du système responsable de sa déchéance : le capitalisme.

 

 

 

 

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