Par Djamal YALAOUI
Avocat au barreau de PARIS et correspondant Associé au barreau de ORAN
« Nous, autres, civilisations savons que nous sommes mortelles »
4/ La guerre contre la dette
La guerre n’est que la continuation de la dette par d’autres moyens : la dette est un cancer et la guerre n’en est qu’un métastase. Or le conflit ukrainien a déjà commencé à faire des métastases qui préparent le conflit majeur du 21ème siècle entre les Etats-Unis et la Chine.
Néanmoins, ce cancer se heurte à la majorité du reste de l’humanité qui, à l’image des défenses immunitaires, identifie là une anomalie qu’il faut corriger avant qu’elle n’affecte tout l’organisme. C’est pourquoi le Tiers-États Mondial fait la guerre indirectement à l’Occident, ce qui est un événement inédit.
Si la confrontation USA-Chine passe par une guerre conventionnelle doublée d’un hiver nucléaire le résultat macabre ne sera pas de 300 millions de morts mais de 3 milliards de victimes!!
On connait tous l’adage « la politique étrangère n’est jamais que le reflet de la politique intérieure » et donc le conflit latent entre les USA et la Chine n’est pas a réglé au travers d’une 3ème guerre mondiale mais à l’intérieur de ces deux puissances !
On a vu que la valeur statistique d’une vie humaine pouvait être calculée sous l’angle de la production ou de la consommation de richesses. De même on a constaté qu’un Ukrainien produit beaucoup plus de richesses qu’il n’en consomme, quand il n’est pas mort à la guerre. Pour l’Occident du G7 c’est plutôt l’inverse : en Occident on consomme, statistiquement, davantage de richesses que la part qui devrait lui être attribué par le travail (le travail n’est pas la richesse créée, un youtubeur qui gagne 100.000 dollars par semaine ne produit rien !). Nous sommes, ici, en présence d’un problème, majeur, de répartition entre le capital et le travail. Pour le dire autrement et plus crûment, il devient rationnel (mais toujours pas raisonnable) pour un kleptocratique de détruire des vies quand ces dernières coûtent plus qu’elles ne produisent où plutôt que ces vies coûtent davantage qu’on ne veut accorder à leur travail.
Ce constat est très important : il éloigne de cette image communément répandue qui est de croire que le commerce exige la paix, au-delà de la poudre et des canons !
Croire que le grand Capital pour faire du commerce, privilégie d’avoir des humains pour produire plutôt qu’ils s’entretuent, est historiquement faux, où que les marchands préfèrent la paix à la guerre est l’exception qui confirme la règle.
Pourquoi?
Probablement parce que, encore une fois, vous pouvez considérer votre peuple soit comme un créateur de richesses soit comme un consommateur de richesses. C’est selon qu’il crée davantage qu’il ne consomme ou qu’il consomme davantage qu’il ne crée.
Le système aboutit à cette conclusion de Karl MARX que Jacques FONTANEL résume par la formule suivante : « Les contradictions inhérentes au fonctionnement du Capital conduiront inéluctablement à la fin d’un système, au besoin par l’utilisation des armes qui ont servi à sa survie provisoire. Inéluctablement, le capitalisme développe un processus de globalisation qui, lui-même, est au final belligène, en entretenant quotidiennement une guerre économique qui écrase le prolétariat ou les travailleurs. Les superstructures étatiques participent à l’exploitation en répondant aux attentes du marché et de ses firmes multinationales, ce qui, de surcroît, porte aussi atteinte à une vraie démocratie ».
Nous sommes au sein d’un système capitaliste qui refuse ses crises et qui refuse, donc, de s’adapter : les crises du système capitaliste sont des crises d’ajustement et en refusant de s’ajuster il nous entraine de manière irréversible vers la grande déflagration.
Depuis l’année 2009, on peut estimer à minima que l’Occident à produit 5 fois plus de crédit-dettes qu’il n’a produit de richesses : 5 fois plus de promesses que de capacité à les honorer.
Hélas, mille fois hélas! Zéro multiplié par 6. 000 000 fait toujours zéro !
Nous sommes en présence d’une débauche de capital, tout ce crédit crée c’est du capital, qui fait pression à la baisse sur le salaire réel et qui favorise les comportements de prédateurs dans les relations internationales. Les économies occidentales ne créent plus assez de croissance pour répondre aux attentes du capital, du travail et de leurs partenaires internationaux : le grand Capital, qui est le roi du système, a tout vampirisé !
Nous sommes en présence d’un cercle vicieux, extraordinairement, démoniaque ; au sein duquel la moindre attractivité du travail qui est moins payé plombe, encore, davantage, les perspectives de création de richesses et de croissance économique. Cette spirale infernale ravive toujours plus le mécanisme de prédation et ainsi de suite.
Dieu se rit des hommes qui déplorent les conséquences, dont ils chérissent les causes !
Dans un système où la raison prédomine, les Occidentaux devraient se rendre compte qu’ils ne sont plus des agents économiques qui participent à la création de richesse, commune, mais sont devenus des ayants droits de cette même richesse qui a, déjà, disparu par la magie de la monnaie. Face à cette illusion, les revendications hégémoniques occidentales n’ont qu’une issue : attaquer les armes à la main pour attaquer les pays du Tiers-Etat mondial, plutôt que de corriger leur dérive de l’argent-dette. L’Occident dans sa fuite en avant, aveugle, telle la course d’un rat, n’accepte pas le réel. Il faudrait qu’il accepte la faillite de son système, d’assumer ses pertes, de retrousser ses manches, de corriger les excès de son système capitaliste financier et punir les responsables de ces dérives criminelles.
Si l’Occident global acceptait une reconversion (et non pas un déclassement) de ses économies improductives en créatrice de richesses, il imposerait à un architecte d’intérieur de devenir boulanger, à un banquier d’être à la tête d’une fromagerie, à un responsable marketing d’être un électricien…qui sont des métiers essentiels (et non des professions inutiles) qui nécessitent de réelles connaissances, des compétences, de la maitrise technique ; bref tout l’inverse de la vaste escroquerie qui nous entraine vers une dystopie : l’ « Intelligence » Artificielle !
L’I.A est une fausse révolution, c’est juste de l’intelligence quantitative, ça tourne plus vite mais ça se déconnecte, totalement, du réel : une intelligence d’imbéciles heureux qui tourne dans un vide virtuel et qui ne produit aucune richesse !
Le manuel qui marche va surement plus loin que le cadre de banque assis derrière son écran.
La haute bourgeoisie d’affaires atlantiste préfère sacrifier 300 millions de vies plutôt que 3.000 milliards de dollars, insolvables, et qui de toute évidence finiront dans les poubelles de l’hyper-inflation.
Toute cette dette abyssale cumulée n’est jamais qu’une création, une fiction : l’immense partie n’est composé que des intérêts de la dette, terreau sur lequel elle prospère et qui ne produit que du vide ! Cette pure fiction et vaine promesse sera réglée très probablement et de manière très réelle par des centaines ou milliards de livres de chairs humaine.
Revenons, à présent, à l’origine de notre réflexion et penchons-nous, un court instant, sur l’immense œuvre de Saint Thomas d’Aquin dans laquelle il condamne l’usure car, selon lui, cela revient à faire payer quelque chose qui n’existe pas : « On fait payer du vide, on fait payer rien » ! Saint Thomas d’Aquin qui est sans un doute l’un des plus grand monétariste considère que l’usure est une forme de vol car cela revient à faire payer le temps ; or le temps appartient à Dieu (pour ceux que cette question intéresse, je ne peux que les inviter à lire la Question 78 sur l’usure « seconda secondai » de la Sainte Théologique, c’est absolument remarquable).
Pendant très longtemps la condamnation du système de l’usure par l’église catholique, notamment, a été moquée et réduite à une forme d’obscurantisme, heureusement, dépassée et qui connait une forme de renaissance, ces dernières décennies, compte tenu des limites du capitalisme financier.
Le G7 est devenu le club des 7 pays les plus endettés du monde, tous au bord de la cessation de paiement… Et dans quelques années le G7 aura autant de poids que les îles Féroé. La réalité est bien là : l’Occident ne pèse plus grand-chose et le gendarme du monde en est rendu à faire la circulation à Saint-Tropez ou au festival de Cannes !
La financiarisation, sauvage et outrancière, des économies occidentales via Wall Street et la City, a conduit à une myriade d’escroqueries liées à la dette, qui ont enrichi une poigné d’oligarques-banquiers tout en détournant des billions de milliards de dollars de capitaux vers des entreprises improductives (Sarts-up en tout domaine, plateformes inutiles…Et même les Google, Twitter et consorts…).
Dans le même temps, l’absence d’une politique industrielle cohérente a provoqué la fuite de dizaine de milliers d’entreprises et d’usines qui se sont déplacées.
Le miracle chinois (devenu l’atelier du monde) est, largement, attribuable à la financiarisation et aux politiques de courte vue qui ont permis aux entreprises européennes et étasuniennes de délocaliser leurs industries ailleurs, pour toujours davantage de profits pour les 1% de privilégiés au détriment des 99%, au lieu de les inciter à rester aux Etats-Unis et en Europe.
Aujourd’hui l’économie chinoise dépasse celle des Etats-Unis, et rien de moins qu’une guerre nucléaire ne peut renverser la situation. A défaut, l’Occident devra accepter sa défaite économique et retrousser ses manches pour se remettre à produire, créer, à nouveau, de la richesse manufacturière. Cette hypothèse est, peu probable, car l’Occident a perdu toute notion du temps long conjugué à la sueur du labeur et à la douleur du déclassement mondial, synonyme d’une prise de contrôle de l’économie mondiale par les BRICS et leurs adhérents du sud global.
Les sociétés occidentales sont en train de devenir folles et les fous ont pris le contrôle de l’asile.
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