L’Algérie occupe une position stratégique pouvant lui permettre de contribuer à la concrétisation des objectifs de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), à travers la connectivité du continent et le développement logistique régional, tout en garantissant la réduction des coûts de transport, notamment maritimes, ont souligné jeudi à Alger des experts et des professionnels du secteur maritime.
Ces experts s’exprimaient lors de la 3e édition de la Conférence sur l’économie maritime, organisée par le World Trade Center Algiers (WTCA) et le cabinet Global Trade Support (GTS), sous le thème “L’économie maritime au service de l’intégration africaine : connectivité, investissements et gouvernance durable pour la réussite de la ZLECAF”.
Dans ce contexte, le directeur général du WTCA, Ahmed Tibaoui, a rappelé que “l’Algérie, avec près de 1.200 km de façade maritime, occupe une position stratégique entre la Méditerranée et l’Afrique subsaharienne, ce qui constitue un atout majeur pour contribuer à la connectivité du continent, au développement logistique régional et à la réduction des coûts d’échanges intra-africains”.
M. Tibaoui a mis en avant, dans ce sens, les efforts de l’Algérie ces dernières années pour le développement de ses infrastructures logistiques et maritimes, notamment à travers la modernisation des grands ports, ainsi que la création de zones logistiques connectées aux corridors routiers et ferroviaires, dont plusieurs orientés vers les pays du Sahel.
L’Algérie a également mis en place des facilitations des échanges grâce à la digitalisation progressive des procédures portuaires et douanières, lui permettant, a-t-il poursuivi, d’aspirer à devenir “un pont maritime et logistique entre l’Europe et l’Afrique”.
Dans le même esprit, l’expert et ancien DG de Serport, Abdelkrim Rezal, a assuré que “l’Algérie a relevé le défi, dans le cadre de la Zlecaf, de construire des infrastructures logistiques multimodales intégrées, résilientes et durables, afin de favoriser l’intégration africaine et d’accompagner les politiques de diversification de l’économie et de promotion des exportations”.
Ces projets engagés vont réduire, a-t-il fait savoir, les coûts logistiques des échanges commerciaux de “20 % à 10% ” et permettrait à l’Algérie de se positionner comme un “acteur logistique de premier ordre”.
M. Rezal a rappelé que l’Algérie a entrepris une stratégie de modernisation de sa flotte de navires en vue de couvrir 25 % du trafic global, à travers l’acquisition de porte-conteneurs pour le transport maritime à courte distance (short sea shipping/feedering) et pour la navigation hauturière (deep sea), de navires vraquiers pour le transport du ciment, du clinker et des céréales, de navires rouliers pour le transport de produits frais, ainsi que de navires rouliers à passagers.
Le même intervenant a présenté les potentialités actuelles de l’Algérie dans le domaine maritime, avec une flotte sous pavillon national composée de 34 navires marchands d’un âge moyen d’environ 11 ans.
Pour sa part, le directeur général de la compagnie Cnan Med, Noureddine Koudil, a mis en avant la place de l’Algérie en Afrique et qui bénéficie d’une position stratégique, lui permettant de devenir “un futur pôle logistique” et une zone naturelle de connectivité entre le continent, et les pays européens et de la Méditerranée.
“Le marché africain nous appelle et nous intéresse pour que nous soyons parmi les premiers acteurs du commerce interafricain. L’Algérie est également à l’avant-garde en matière de révolution numérique et de centres logistiques grâce à un réseau multimodal permettant l’écoulement rapide des produits”, a-t-il soutenu.
==Faible part de l’Afrique dans le marché maritime mondial==
Lors de cette conférence, les intervenants ont souligné le rôle stratégique de l’économie maritime dans l’intégration régionale et le développement du commerce intra-africain, ainsi que la nécessité de mobiliser les investissements dans les infrastructures portuaires et de promouvoir des partenariats stratégiques dans la logistique, l’industrie navale et les services maritimes, afin de soutenir l’essor de compagnies africaines capables d’accompagner la croissance des échanges du continent.
Dans ce cadre, Chidi Ileka, représentant du groupe de la Banque africaine d’Import-Export (Afreximbank), a indiqué que le secteur maritime est la “colonne vertébrale” du commerce africain : “Sans ports modernes, sans logistique efficace et sans intégration réglementaire, la Zlecaf ne pourra pas atteindre son plein potentiel”.
La Zlecaf représente, selon lui, un marché unique à fort potentiel de 1,3 milliard de personnes et plus de 3.500 milliards de dollars de PIB. Elle vise à accroître le commerce intra-africain, qui reste limité à seulement 16 % (contre 60 % en Europe) et à stimuler la croissance du flux de marchandises.
Evoquant les enjeux du secteur maritime africain, il a précisé que l’Afrique ne possède que 1 % de la flotte commerciale mondiale et dépend largement de navires étrangers, ce qui renchérit les coûts logistiques (jusqu’à +50% par rapport à la moyenne mondiale), fragilise les chaînes d’approvisionnement et limite la compétitivité des exportateurs africains.
Parmi les défis, il a cité la congestion portuaire, les capacités insuffisantes, le manque de main-d’oeuvre qualifiée, la faible digitalisation et les divergences réglementaires entre les pays africains.
Ce secteur nécessite, a-t-il souligné, des investissements annuels estimés à 14,2 milliards de dollars pour moderniser les infrastructures existantes, assurant que le trafic portuaire pourrait augmenter de 40% sous l’effet de la Zlecaf.