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Le centrisme dictatorial de la démocratie bourgeoise française

De manière générale, dans les pays capitalistes prétendument démocratiques, notamment en France, l’activité politique est le fait du grand capital multinational. Et cette activité politique se matérialise sous la forme de partis politiques bourgeois (du centre, de gauche et de droite), représentant chacun une faction de la classe dominante nationale (la grande – la moyenne – la petite bourgeoisie), bras exécutif local, national et mondial du grand capital qui coordonne, lui, l’ensemble de la scène politicienne.

Par Khider Mesloub

De manière générale, dans les pays capitalistes prétendument démocratiques, notamment en France, l’activité politique est le fait du grand capital multinational. Et cette activité politique se matérialise sous la forme de partis politiques bourgeois (du centre, de gauche et de droite), représentant chacun une faction de la classe dominante nationale (la grande – la moyenne – la petite bourgeoisie), bras exécutif local, national et mondial du grand capital qui coordonne, lui, l’ensemble de la scène politicienne.

Dans ces pays développés dits démocratiques, encadrés par un «curseur gouvernemental normatif», au-delà de la droite et de la gauche, pour disqualifier, voire criminaliser tout courant ou parti politique dissident et antisystème, la bourgeoisie a créé les vocables «extrême», «extrémiste», «extrémisme».

La bourgeoise occidentale, notamment française, a délimité discrétionnairement la légitimité de la gouvernance dans un espace politique fondé exclusivement sur le libéralisme et ses variantes idéologiques représentées par les partis de la droite et de la gauche du capital, en passant par le centre. Au-delà de ses formations politiques légitimées par le capital, les autres partis sont qualifiés d’extrémistes. En France, un parti dissident ou antisystème est toujours catalogué d’extrémiste.

L’emploi des termes extrême, extrémisme, extrémiste, outre le fait d’être péjoratif, induit, par le seul fait de leur énonciation, une réprobation morale, implique une disqualification politique, une condamnation électorale, une criminalisation potentielle, une proscription inéluctable, une incarcération possible.

Comme on l’observe aujourd’hui en France, avec le Rassemblement national et LFI, dorénavant lynchés, excommuniés, criminalisés par les tenants de la démocratie bourgeoise en crise, sous l’accusation d’extrémisme brandie pour les besoins de la cause : celle de la purgation de ces partis politiques jugés insuffisamment fiables pour la marche forcée vers la guerre militaire décrétée par le capital national français et la guerre sociale menée contre l’ensemble de la population laborieuse.

Ainsi, dans une démocratie marchande, en vigueur dans les pays capitalistes développés anciennement établis et pourvus d’une puissante industrie de conditionnement des esprits, le curseur de la «normalité gouvernementale» est fixé discrétionnairement au «centre politique libéral» avec, pour donner l’illusion d’une pluralité de courants politiques, une légère extension vers la droite et la gauche. C’est ce qu’on pourrait qualifier de centrisme dictatorial car la doctrine libérale reste sa référence essentielle, au-delà de laquelle aucune politique économique radicalement socialiste ou communiste ne peut exister. 

On a affaire à une démocratie marchande dominée par un Parti Unique élargi, s’étendant du courant politique du centre à la gauche et la droite du capital. 

La dissidence est repoussée au-delà de ces deux courants politiques droite et gauche. Pour désigner cette dissidence, l’Etat capitaliste démocratique emploie délibérément une terminologie dépréciative, disqualifiante, criminalisante. Des termes péjoratifs et effrayants, notamment «extrême», «extrémiste», «extrémisme». Bien évidemment, c’est la classe dominante (le capital) qui détermine la «centralité gouvernementale», fondée, il va de soi, sur le libéralisme, l’intangibilité de la propriété privée et du salariat.

En d’autres termes, en démocratie marchande, l’éligibilité réelle (et non fantasmée, incarnée par les lilliputiennes organisations politiques tolérées uniquement pour faire de la figuration, donc sans aucune chance d’accéder au pouvoir) aux instances législatives et, à plus forte raison, présidentielles, est agréée exclusivement pour les formations politiques gravitant autour du centre et s’étendant à la droite et la gauche de l’échiquier politique libéral, un échiquier politique sous l’emprise du capital.

Avec la dictature stalinienne, on avait droit au centralisme démocratique ; avec la démocratie bourgeoise française, nous avons affaire au centrisme dictatorial. Pour rappel, le centralisme démocratique signifie que les décisions politiques prises lors des processus de vote sont contraignantes pour tous les membres du parti politique, elles doivent être appliquées par tous. Le centralisme démocratique implique notamment la soumission de la minorité à la majorité dans l’application de la ligne politique définie par le parti.

Quant au centrisme dictatorial à la française, ses orientations politiques et son programme économique capitaliste s’imposent sans discussion à tout le peuple. Le centrisme dictatorial implique donc la soumission de la majorité du peuple à la minorité bourgeoise dans l’application de la ligne économique définie par le capital.

En France, c’est toujours l’état-major central du grand capital qui dicte le tempo et les thèmes de campagnes électorales. Entre un parti politique de droite, de gauche ou du centre, seule diffère la phraséologie. Tous trois défendent les intérêts du capital.

De manière générale, le centriste est un homme politique opportuniste, qui évolue de la gauche vers la droite au gré des circonstances et par ambition personnelle. Il alterne entre progressisme bourgeois et conservatisme étroit. Il œuvre à la conciliation entre travail et capital, évidemment au profit et sous la coupe du capital.

Dans les pays capitalistes développés dit démocratiques, en particulier en France, si un électorat s’avise à relever la tête pour voter pour des candidats dissidents et antisystèmes, il est aussitôt accusé d’extrémiste. Il est ostracisé, excommunié. Autrement dit, ces électeurs antisystèmes sont considérés comme des pestiférés.

N’est-ce pas ce qu’on a observé avec les électeurs du Rassemblement national et de LFI, traités comme des pestiférés parce qu’ils ont voté pour des candidats de leur choix ? Ainsi, en France, l’Etat des riches tout comme les médias, partisans du centrisme dictatorial, ne respectent pas la souveraineté du «peuple électeur dissident».

Paradoxalement, quand il ne participe pas aux mascarades électorales, le peuple est fustigé pour son abstentionnisme. Quand il se résout à voter pour des candidats dissidents ou antisystèmes, il est également fustigé. Quand il manifeste sa colère par la «révolte de rue», il est bastonné. Quand il exprime son mécontentement par la «révolte du vote», il est piétiné : son suffrage est bafoué, ses représentants élus excommuniés, privés de leur victoire.

Le centrisme dictatorial cultive ainsi le déni démocratique, l’extorsion électorale, la captation du suffrage des citoyens dissidents, qui rime avec décapitation politique des votants.

De là découle que la démocratie française peut être définie comme un mode de gouvernance de l’entre-soi bourgeois élargi, dont le «curseur gouvernemental normatif» est positionné au centre et s’étend légèrement à la gauche et à la droite du capital.

Au-delà, point de salut pour les «mauvais électeurs», les têtes brûlées de la dissidence électorale. La dictature démocratique, incarnée par le centrisme dictatorial, s’abat sur leur tête, abat leur naïve prétention à s’imposer par les élections, à imposer leur volonté politique par le suffrage. C’est la ligne rouge à ne pas franchir.

En France, la classe dominante, de tous les temps, dans les périodes de crise de gouvernance et de remise en cause de son ordre établi, s’est acharnée à disqualifier le combat politique des authentiques opposants. En particulier, par le recours à une rhétorique extrêmement outrageante et diffamatoire, notamment par l’usage de termes réservés ordinairement aux criminels de droit commun. Actuellement, c’est LFI qui subit une campagne de diabolisation, est victime de diffamation. LFI est accusé d’apologie de terrorisme, d’antisémitisme, d’être un parti dangereux pour la «démocratie».

Toujours est-il que, pour neutraliser la dissidence légitime du peuple, la classe dominante française a toujours employé, d’abord les injures ordurières, ensuite les balles meurtrières.

Khider MESLOUB 

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