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December 7, 2025

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Le gratin de la presse française d’extrême- droite invité à Tel-Aviv

Par Nora Abdelkrim

 Invitation tous frais payés, hôtel de luxe, escorte officielle, du 29 octobre au 1er novembre,  des soi-disant « journalistes » français  ont fait le voyage en Israël pour « témoigner » et « informer ». 

En 31 jours de bombardements de la bande Gaza par l’armée israélienne, 41journalistes, majoritairement palestiniens,  ont été tués par les frappes israéliennes, soit  plus d’un par jour. Sur le terrain, dans les tentes de presse, dans leur maison avec leur famille, leurs amis et leurs voisins, dans des abris improvisés, ils sont littéralement traqués et ciblés par Tsahal. Parmi eux, 9 journalistes de l’agence palestinienne d’information WAFA ont été tués depuis le 1er novembre. 

Plus de 50 bureaux de presse ont été détruits complètement ou partiellement, selon l’association des journalistes palestiniens et Reporter sans Frontières (RSF), y compris le bureau de la très officielle Agence France Presse, le 3 novembre. « La situation à Gaza est une tragédie pour le journalisme (…) Avec ces frappes, l’armée israélienne les élimine de fait les uns près les autres, tout en trahissant par des propos inadmissibles son mépris assumé du droit international humanitaire », écrit RSF qui appelle à la protection des journalistes et à ce que le journalistes étrangers puissent y entrer et y travailler librement ».

Le 31 octobre, soit deux jours après l’arrivée des « journalistes » français à Tel Aviv, le ministère de la Santé du Hamas annonçait que 8525 personnes, dont 3542 enfants, avaient été tués à Gaza depuis le 7 octobre. Le 8 novembre, l’armée israélienne est entrée dans Gaza. Plus de 10300 personnes dont 4237 enfants tués depuis le 7 octobre.

Pendant ce temps, invitation tous frais payés, hôtel de luxe, escorte officielle, du 29 octobre au 1er novembre,  des « journalistes » français et des personnalités du mode de la presse ont fait le voyage en Israël pour « témoigner » et « informer ». 

Leur hôte ? Une « ONG » israélienne, KKL,  qui se dit ouvertement « sioniste », mais « indépendante » et « environnementale ». KKL ou Keren Kayemeth LeIsrael soit le Fonds national Juif. 

(27 janvier 2014 – Benny Grantz, chef d’État-Major des Forces de défense israéliennes (Tsahal), ex-ministre de la Défense, et ministre sans portefeuille dans le cabinet de guerre formé par Benyamin Netanyahou  après l’offensive du Hamas,   recevant un certificat du président du KKL, Effy Shentzler. après la plantation d’un olivier sur  un terrain des forces armées.) 

Le but de la visite ?   Précisé sur le compte X de KKL, il consiste à « Constater par eux-mêmes à quoi Israël et sa population sont confrontés, discuter avec des experts et des décideurs israéliens d’opinions diverses et  rencontrer des témoignages d’habitants qui ont survécu à la terrible attaque terroriste du 7 octobre ». 

Les invités ?  Le site français Arrêt sur Image d’analyse et de critique des médias qui a révélé l’affaire, cite parmi eux Amine El Khatmi homme politique dont on connaît en France l’évolution scabreuse du parti socialiste vers un flirt appuyé avec le parti d’extrême droite de Marine Le Pen, et éventuellement journaliste proche du JDD,  André Bercoff, star de 82 ans de Sud-Radio, très critiqué pour son émission « Bercoff dans tous ses états » fleurant bon l’extrême droite, et néanmoins très populaire,  Daniel Kretinsky,  avocat, homme d’affaire, milliardaire tchèque, propriétaire du 2ème groupe de presse français (entre autres Marianne, France Dimanche, Ici Paris, Franc-Tireur, actionnaire  majeur du groupe Le Monde), Frank Tapiro, d’une famille juive espagnole pied-noir très attachée à Israël,  publiciste, intervenant sur de nombreux media,  l’ex-journaliste et auteur Hugues Serraf, éditorialiste d’Atlantico, site d’information classé de droite à « néoconservateur » et « extrême droite », ou encore Élisabeth Lévy, proche d’Alain Finkielkraut avec lequel elle a fondé le magazine et site web Causeur,  classé à droite, voire extrême droite , la journaliste Anne Elisabeth Moutet ou encore Antoine Colonna, rédacteur en chef de la revue d’extrême droite, Spectacle du Monde, dont un des collaborateur n’est autre que Samir Geagea, dirigeant des milices chrétiennes phalangistes, l’un des commanditaires du massacre de Sabra et Chattila, sous la protection de l’armée israélienne, en 1982.   

 À noter, également, la présence du Grand-Rabbin de France par intérim, Olivier Kaufmann qui a récité le Kaddish à Sderot, « devant le poste de police de la ville complètement rasé  après  l’attaque du Hamas », selon la présentation de KKL.  En réalité, le poste de police de Sderot, ville située à une dizaine de kilomètres de Gaza, a bien été complètement rasé par l’armée israélienne mais alors que   les  combattants du Hamas qui s’y étaient introduits, étaient encore à l’intérieur.   

 Les  « 30 (pseudo) journalistes », ont d’abord, à leur arrivée  à Tel-Aviv, été « briefés »  par l’ancien chef de la division Recherche des service secrets de l’armée israélienne, Yossi Kuperwasser,  par un membre de la Knesset Alon Shuster, également ancien président  du Conseil régional Sha’ar HaNegev, zone qui jouxte le nord-est de la bande de Gaza, particulièrement touchée par l’attaque du Hamas, et par Daniel Saada, ex-diplomate de l’ambassade d’Israël en France. 

Les « invités » du KKL ont également rencontré des victimes des attaques du 7 octobre, des proches des otages à Tel-Aviv, des médecins légistes. Ils se sont rendus à la Knesset dont ils ont rencontré le président, ainsi que dans les locaux de la chaîne sioniste i24News du milliardaire  (4 milliards USDollars en 2023) Patrick Drahi. De nationalités marocaine, française, portugaise, israélienne, résidant en Suisse, holding immatriculée à Guernesey, paradis fiscal, Patrick Drahi est également le propriétaire de BMFTV, de RMC, du magazine L’Express et autres media. 

C’est de ce studio qu’André Barcoff a été interviewé en direct par Sud-Radio.  Pas un mot sur ce qui se passe au même moment dans la bande de Gaza. Pas un mot sur les bombardements aveugles, pas un mot sur la politique israélienne de colonisation et de répression des Palestiniens depuis des décennies. Pas un mot sur les conditions de vie dans  la Bande de Gaza transformée en prison à ciel ouvert par le pouvoir sioniste. Bercoff parle de « tensions », de « traumatisme israélien ». « C’est très intéressant, dit-il, les parents sont sous les drapeaux, ce sont les grands parents qui s’occupent des enfants », alors que cela fait  trois semaines que les bombes israéliennes s’abattent sur la la population palestinienne dont les  grands-parents, les parents et les enfants meurent par milliers  !

Quant à Amine El-Khatmine, c’est fascinant ! Il a vu des « scènes figées étonnantes », « une peluche dans une voiture », il a senti des « odeurs de poubelles » qui, malheureusement, ne peuvent plus être ramassées,  et il a vu… « des chats qui ont perdu leurs maîtres, des chiens livrés à leur sort,  une scène surréaliste », insiste-t-il. 

Au-delà  de ces propos que toute personne normalement constituée, quelle que soit son opinion, ne saurait tenir,  les « journalistes » ont bien renvoyé l’ascenseur à leurs hôtes israéliens. Ils sont largement intervenus dans les media, à leur retour,   certains avec une virulence rare, contre les Palestiniens et ceux qui les soutiennent, ou du moins, ceux qui dénoncent l’offensive génocidaire israélienne dans  la Bande de gaza.  « Ceux qui croient soutenir le faible dans la cause palestinienne avalisent le récit médiatique de l’Islam conquérant, antijuif et antichrétien. Ceux-ci seront les prochains sur la liste », écrit, par exemple,  Ivan Rioufol. « Les dommages collatéraux , ces civils gazaouis  qui se prennent à leur tour des bombes sur la tronche, sont difficiles à avaler », écrit Hugues Serraf, mettant en doute le nombre des victimes. 

Que cache l’ONG KKL qui se dit « environnementale »  et « indépendante » de la « maison-mère » à Jérusalem qui a, pourtant, financé les invitations tous frais payés des Français, et des journalises,  hommes d’affaires, élus et autres personnalités régulièrement  invités ? 

La journaliste Sarah Nedjar (France Bleu, France3)  a préféré, en 2022, enquêter  sur la vraie nature de KKL avant de répondre favorablement à l’invitation au voyage, pour finalement dénoncer l’ONG sur son compte Twitter (« Mon journalisme n’est pas à vendre », 19 septembre 2022).  On lui avait «  vendu KKL comme un organisme qui travaille sur le reboisement des terres, quelque chose d’écologique » écrit-elle. En « quelques clics », elle découvre dans un rapport d’Amnesty International 2022, que KKL  est « un organisme qui s’est réapproprié les hectares de terres palestiniennes suite à l’exode de 1948. Amnesty International a, également, pointé du doigt les pratiques de destructions de villages au prétexte du reboisement », dénonce-t-elle,  ajoutant :  « J’ai donc l’honneur et la fierté de vous dire que je ne ferai jamais partie d’un  voyage de propagande, même si vous m’y invitez gracieusement ».

KKL possède, de fait, et gère des milliers d’hectares de terres en Israël, achetées à ou confiées par l’État israélien depuis 1948, avec une accélération durant ces dernières décennies de colonisation à marche forcée. Et derrière ce décor, KKL sert d’agent de propagande sioniste à Tel-Aviv où l’extrême droite au pouvoir utilise sans difficulté ses relais d’extrême droite sioniste en France.

 

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