Par Fatima Ben Hachemi
Depuis le coup de force opéré au Niger et l’installation du CNSP avec Tiani à sa tête,un vent de panique a soufflé sur les pays voisins de la CEDEAO et, sur la France. L’épouvante a gagné les affidés et leur maître d’œuvre.
Le néocolonialisme français est certes hors jeu. Il a poursuivi sa politique coloniale sans le colonialisme. Le pouvoir a été transféré totalement et complètement aux transnationales d’origine française (Bolloré, Bernard Arnaut, Lagardere, Bouigues, Orano (ex-Areva), Total etc… ). En somme, le pouvoir colonial a donné l’illusion d’un transfert de souveraineté aux pays anciennement colonisés.
Mais de quelle souveraineté, s’agissait-il ?
Alors qu’ils ont assassiné les dirigeants qui se sont dressés contre leur empire : Ruben Um Nyobe (camerounais, qui fut traqué, défiguré et abattu par une troupe française en 1958 et pour faire disparaître jusqu’à son souvenir, il fut coulé dans du béton ), Felix – Roland Moumié (camerounais) fut empoisonné à Genève par les services des renseignements français, et pas moins de 28 chefs et hommes d’état (Lumumba, Sankara, Boudiaf …) furent supprimés avec les complicités des classes bourgeoises à la solde de l’impérialisme français…
Et lorsque l’on examine le diktat posé par la France coloniale pour accepter de se retirer de l’Afrique, diktat, qu’elle affuble de l’euphémisme : « Accords » au nombre de 11, à l’exigence desquels, elle quittait les 14 pays francophones : le Bénin, le Burkina Faso, la Guinée Bissau, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Togo, le Cameroun, la République Centre-Africaine, le Tchad, le Congo Brazzaville, la Guinée équatoriale et le Gabon, et qui prescrivent : que la dette coloniale doit rembourser les bénéfices de la colonisation, que les finances africaines doivent être gérées le ministère des finances français sans aucun droit de regard de ces pays sur leurs propres finances, avec le franc CFA comme seule monnaie, que la France jouit d’un droit de préemption absolu sur toute vente de terre ou de ressources minières, que toutes les entreprises françaises jouissent de droits prioritaires dans les marchés publics et les appels d’offre, que la France continue de jouir de droits exclusifs dans les formations des officiers militaires et dans la fourniture des équipements militaires, qu’elle a tous les droits pour défendre ses intérêts d’intervenir militairement et de stationner ses troupes en permanence dans les bases militaires, que le français doit être la langue officielle et langue de l’éducation, qu’il est fait interdiction de toute alliance militaire avec d’autres pays ; et qu’il y a obligation de faire alliance avec la France en cas de guerre ou de crise mondiale : c’est au pris de ces « Accords » extorqués par la France coloniale pour accorder la « souveraineté » à ces pays.
On constate, les yeux écarquillés l’état de domination dans lequel la puissance coloniale les maintient et on prend à sa juste valeur le principe selon lequel la liberté ne se donne pas, elle s’arrache.
Une fois ces « Accords » passés en revue , il apparait que l’Afrique est restée sous tutelle et qu’elle n’a aucune, absolument aucune souveraineté.
Mais si la France a gardé les coudées franches, c’est en raison des liens très étroits entre les classes dirigeantes de chacun de ces pays (politique et économique) et l’impérialisme
Et l’image véhiculée de façon méthodique et permanente que les peuples d’Afrique sont dans la misère avec l’induction de l’idée que cette misère frappe tout le monde sans distinction, que personne n’y échappe, avec un tempérament toutefois , la famine ne frappe que les plus démunis.
Partant de cette perfide induction, perçue comme telle par les populations des pays occidentaux subissant passivement le matraquage de leurs médias répétant inlassablement que les aides octroyées par les généreux pays occidentaux sont détournés par les élites gouvernantes des pays africains.
Ces messages répétés à l’infini induisent également l’idée qu’il n’y a pas de classes bourgeoises dans ces pays anciennement colonisés mais seulement des dirigeants qui planquent les avoirs détournés dans les capitales occidentales, ce qui dédouane les transnationales de leurs accointances avec des classes exploiteuses nationales et laisse peser la responsabilité sur les seules élites politiques favorisant uniquement des solutions par des moyens et des méthodes sans incidence profonde au niveau social , c’est-à-dire par notamment des coups d’état ( pas moins de 22 coups d’états ont eu lieu en Afrique depuis 1962), laissant ainsi intactes les structures sociales tribales et religieuses héritées du colonialisme, ce qui assure la perpétuation du néocolonialisme, broyant la classe ouvrière et s’assurant ainsi de l’étouffement de la lutte de classe grâce aux idéologies réactionnaires mettant en conflit les communautés et l’utilisation des groupes qui sèment la terreur.
Il faut garder à l’esprit que les médias et les études effectuées par les think tank sur les structures sociales et économiques des pays d’Afrique, font l’impasse sur l’existence et le rôle des classes bourgeoises ; et il faut raisonner en gardant à l’esprit que leurs études laissent penser que la misère des peuples d’Afrique avec son lot de famine touchent toutes les couches sociales et que tous les africains sont dans la même galère.
Et les pays d’Afrique échappent en grande partie aux scandales relatifs aux grosses fortunes indument amassées, en dehors de quelque- uns tel que Bokassa,les médias français habituellement prolixes en la matière n’en font jamais la UNE de leurs plateaux TV.
L’homme le plus riche d’Afrique Aiko Dangote est Nigerian, alors que la famine fait des ravages au Nigéria, que l’émigration des jeunes fait des drames humains, il n’a jamais fait l’objet d’un podscast pour décortiquer l’origine de sa fortune.
Et pourtant, des familles puissantes en Afrique, il y en a, sinon d’ailleurs la misère et la domination ne s’expliqueraient pas.
Il faut garder à l’esprit aussi le rôle des incursions de l’impérialisme par l’intermédiation des idéologies violentes et réactionnaires tel l’intégrisme religieux qui a été introduit par l’intermédiaire de hordes, instrumentalisant la religion et financés par ces mêmes Etats impérialistes, ceux-là mêmes qui se montrent offusqués de la présence des milices de Wagner , et qui utilisent eux-mêmes des milices identiques à celles de Wagner, et ce depuis bien plus longtemps.
Les hautes instances de l’Etat Français « démocratique et transparent » entretiennent des liens très étroits avec les milieux du crime et de la grande délinquance. Des milices secrètes, : le CNAPS (le conseil national des activités privées de sécurité), et EUROGENDFOR (qui relèvent de l’armée et de la gendarmerie) organisées et structurées sont au service de l’Etat profond.
Ces milices secrètes inconnues de la population française, interviennent aussi bien sur le territoire français dans les moments de grandes crises tels que les Gilets Jaunes ou les émeutes, mais également et surtout à l’extérieur de la France où elles entretiennent des liens logistiques très étroits avec les groupes terroristes (1).Ce sont donc les raisons du maintien de la tutelle économique et politique de la France sur les pays de l’Afrique francophone.
Mais il reste que des questions demeurent en suspens :
Est-ce que les armées des pays du Sahel qui ont secoué le joug de la France ces derniers temps, par des coups d’état, ont librement opéré et indépendamment de toute autre intervention ou tout autre appui ?
Est-ce à dire que la France est hors jeu et que la « démocratie » est victorieuse grâce au secours des EU ?
Ne vous étouffez pas quand vous entendez ceux qui ont massacré et massacrent encore et toujours les peuples des pays qui leur opposent un tant soit peu de résistance, qui osent lever la tête, que le devoir d’ingérence les appelle au secours de la « démocratie ».
Ils utilisent la terreur comme autre moyen de domination par l’intermédiaire de ces hordes qu’ils endoctrinent selon des idéologies élaborées dans les laboratoires de la CIA , qu’ils arment et financent .
Gare à ceux qui osent s’opposer à leurs plans : l’intervention militaire détruira jusqu’aux fondements de la société : l’Afghanistan, l’Irak, la Syrie, le Yémen, la Lybie, la Somalie…, où l’utilisation d’autres moyens tel que l’embargo : Cuba, l’Iran…
Est-ce à dire que les EU, la GB et tous les autres pays dominateurs peuvent entendre que les pays dominés ont le droit de s’insurger et de disposer de leurs destins ?
Est-ce à dire que l’impérialisme occidental a changé de visage et a remplacé le cœur du loup par le cœur d’un ours ?
Est-ce à dire que c’est fini, les peuples d’Afrique et d’ailleurs sont libres de leurs destins et de leur avenir ?
On le sait tous, Ils interviennent pour « la défense de la démocratie », de la « propagation de la défense de la démocratie humaine et civilisée » de la « défense des droits de l’homme », comme ce fut le cas en Amérique latine, plus tard en Irak, en Syrie, au Liban, en Libye…
Les EU sont présents en Afrique, au Sahel où sont stationnées des bases militaires avec des garnisons et des milices (les mêmes milices que celles de Wagner).
Les EU sont encore puissants et leur impérialisme n’est pas encore vaincu.
Ils veulent l’Afrique, toute l’Afrique, ils manipulent encore et toujours les coups d’état là où leurs intérêts doivent les mener et là où leurs intérêts sont en jeu.
La visite de Victoria Neuland suivie de celle de l’ambassadeur Kathleen FitzGibbon au Niger ressemblent plus à des visites de soutien qu’à des visites de mise en garde.
Alors, la partie n’est pas encore gagnée, un impérialisme remplace un autre, l’exploitation continue, le vol des richesses continue ; la misère continue avec son lot de souffrance et de désespoir qui jettent les jeunesses dans les bras de la mort…
- Sylvie CHARLES : Nouvelles Milices du Gouvernement ; https///youtu.be/EHpvPmcCQ1k