Le Maroc, premier producteur mondial de cannabis, a fait de la régularisation à des fins médicales et industrielles l’un de ses atouts économiques : une culture au profit de la pérennisation du régime néoféodal du Makhzen et qui contribuera à augmenter la richesse du roitelet des pauvres.
Si l’Algérie continue de condamner et de dénoncer la guerre de la drogue menée par le régime du Makhzen contre le peuple algérien, l’Espagne que la légalisation de ce trafic est une réelle menace pour elle et toute l’Europe.
Les champs cultivés du Rif, la région montagneuse marocaine frontalière de l’Espagne, se préparent actuellement pour la récolte, la deuxième depuis que le régime du Makhzen a légalisé le cannabis , soulignent plusieurs médias ibériques.
« Des rapports internationaux, y compris ceux des agences de l’ONU, indiquaient que 40 % du haschich consommé dans le monde et 80 % de celui consommé en Europe provenaient du Maroc. Cette situation a conduit les humbles cultivateurs et leurs familles à devenir les otages des barons de la drogue, contraints de continuer à les approvisionner sous la menace, et d’utiliser des semences hybrides importées d’Europe pour augmenter la productivité des parcelles », indique le journal espagnol El Independiente., citant une source marocaine.
Le Maroc a continué à se classer au premier rang mondial en termes de production et de commercialisation de cannabis et de ses dérivés, selon les rapports de l’Organe international de contrôle des stupéfiants de l’ONU.
« On estime que 140 000 cultivateurs de cannabis sont des cultivateurs et, avec leurs familles, plus d’un million de personnes dépendent de cette économie illicite. La culture du cannabis est depuis des décennies un moyen de compenser l’échec des politiques de développement dans le Rif, une région montagneuse au relief très accidenté », reconnaît le journaliste d’investigation marocain Hicham Mansouri.
En 2023, le Maroc a produit 294 tonnes de cannabis auprès de 32 coopératives comprenant 430 agriculteurs sur une superficie totale de 277 hectares dans les régions montagneuses du Rif. Les rendements ont été estimés entre 1 et 2,7 tonnes par hectare. Jusqu’à présent en 2024, 2 800 licences ont été accordées contre 700 l’année dernière. La superficie cultivée légalement s’élève aujourd’hui à 2 400 hectares.
Citée par El Independiente, une source du ministère marocain de l’Intérieur, sous couvert de l’anonymat « L’amnistie est vraiment surprenante, mais elle reflète la tendance que le Maroc essaie de suivre, passant d’investissements secrets à des investissements directs dans le haschisch ou la drogue ».
Et de poursuivre, « Le Maroc a investi massivement dans le trafic de drogue, exploitant ses avantages financiers pour acheter des pays et changer des positions qui servent ses intérêts, en particulier en Europe, en Afrique et en Amérique latine », , avertissant que « de hauts responsables du gouvernement marocain sont impliqués dans le trafic de drogue », comme le montrent des cas tels que les scandales de « El Escobar du Sahara », du parlementaire marocain Abdenabi Bioui, alias « El Maltese », qui éclaboussent des membres de l’élite politique et sportive marocaine, des hommes d’affaires, des notaires et des policiers pour avoir transporté des centaines de tonnes de haschich du Maroc vers l’Afrique du Nord et le Sahel.
D’ailleurs, La justice makhzenienne avait durci la peine de prison prononcée à l’encontre du Youtubeur marocain Mohamed Reda Taouini, qui avait accusé le ministre marocain de la justice Abdellatif Ouahbi de faire partie de la famille des narcotrafiquants en évoquant ses liens étroits avec les réseaux du trafic international de drogue.
Pour la source anonyme du média ibérique, la grâce royale décrétée le 20 août dernier par le commandeur des croyants à l’égard des trafiquants de drogue « a un arrière-plan économique et social, mais elle représente aussi une nouvelle transition d’une étape à l’autre dans le traitement de la culture du cannabis » qui bénéficie aux jeunes Marocains. « qui sont les consommateurs », et cela a des conséquences pour « les pays voisins comme l’Espagne, l’Algérie, la Mauritanie, puis l’Afrique et l’Europe, car les quantités cultivées vont doubler et il faudra trouver de nouveaux et grands marchés ».
« Le pays le plus touché est l’Espagne, notamment en raison de la proximité, ainsi que de l’existence de réseaux au sein des services de sécurité, de sorte que la quantité de cannabis va se multiplier de manière étonnante dans les années à venir. »
La même source désigne les ports de Nouakchott et les villes espagnoles proches des côtes marocaines comme points de sortie de la drogue, ainsi que « les camions qui transportent le poisson marocain et sahraoui vers l’Europe ». « L’argent de la drogue passera par un vaste processus de blanchiment à travers le réseau de trafic de drogue en Espagne et les magasins en France, en Belgique et aux Pays-Bas, puis la relation entre le commerce automobile avec l’Afrique et cet argent qui circule de la Belgique vers la Mauritanie et Casablanca. »
L’implication des structures étatiques marocaines dans le trafic de drogue n’est pas surprenante. Comme l’explique Mansouri dans son livre Au cœur d’une prison marocaine : enquête dans le royaume de tous les trafics, « plusieurs rapports ont remis en question la capacité du Royaume à lutter contre le cannabis et ont même mentionné son implication dans la gestion de ce produit ». En 1994, un rapport présenté à l’Union européenne par l’Observatoire géopolitique des drogues pointait l’implication des autorités marocaines dans le trafic de haschich, dénonçant la complicité jusqu’au « premier cercle du pouvoir » .
Dans une précédente interview accordée à El Independiente, l’ancien officier marocain Abdelilah Issou,avait accusé les services de sécurité du Makhzen d’être en liens étroits avec les barons de la drogue.
« Tant qu’il y aura du trafic de drogue au Maroc, il restera le même. Pour que les bateaux partent, il faut non seulement payer l’armée, les unités d’infanterie le long de la côte, mais aussi la Marine et la Gendarmerie maritime. Tout le monde doit être payé. Ils sont tous complices. Le marché fonctionne comme ça » dira-t-il.
Pour Hicham Mansouri, le haschich circule allègrement dans les prisons marocaines, transporté par les familles en visite ou les fonctionnaires et jeté de l’étranger. « La cellule n’est ni ventilée ni ensoleillée. La nuit approche, le sol est encore humide et les mauvaises odeurs ne cessent de s’aggraver. Les détenus n’accordent pas beaucoup d’importance à tout cela. Ils étendent leurs matelas sur le sol mouillé et s’allongent pour jouer aux dames, aux cartes et fumer du cannabis tout en regardant les marmites bouillantes », écrit-il.
« Dès le premier jour, j’ai été surpris de voir des prisonniers consommer les mêmes produits pour lesquels beaucoup d’entre eux ont été emprisonnés, en particulier le cannabis », se souvient-t-il.
« Des conversations avec ses compagnons de cellule permettent de comprendre les tentacules du trafic de drogue, présent dans toutes les couches de la société marocaine » poursuit Hicham Mansouri.
Aujourd’hui, la communauté internationale est interpellée face à cette guerre que mène le régime du Makhzen contre ses voisins et leurs peuples.