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Mohamed Laïchoubi : «L’Algérie doit déterminer une stratégie de réponse, complémentaire avec les acteurs arabes, pour contrecarrer les dessins israéliens»

En plus de l’enjeu démographique que représente l’Afrique, son fort potentiel économique attire l’intérêt des grandes puissances. « L’Algérie est au cœur des géostratégies, d’abord, de par son rôle diplomatique majeur dans la résolution des conflits armés, mais surtout, elle peut constituer un hub énergétique majeur avec le Nigeria, le Soudan, la Libye… Ce potentiel est un enjeu qui attire des acteurs, notamment la France, qui essaye de mettre en échec tout le potentiel algérien au bénéfice d’une politique franco-marocaine en l’Afrique de l’Ouest », résume le spécialiste en géopolitique, Mohamed Laïchoubi.

Mais selon l’ancien ministre et diplomate, qui livre son analyse, ce lundi matin, dans l’Invité de la rédaction de la Chaine 3 de la Radio Algérienne, « cette politique francomarocaine est mise en échec car les opinions publiques en Afrique ont évolué avec un fort sentiment antifrançais». Ce qui fait, selon l’expert, que « l’espace occidental, notamment les américains, se demandent comment suppléer à la faiblesse de l’acteur majeur ». Il souligne qu’aujourd’hui, « les grandes puissances n’envisagent plus de conflit nucléaire entre elles, mais vont certainement s’affronter sur des espaces intermédiaires ».

Dans cette équation, l’Algérie se trouve « au cœur de la géostratégie », assure Mohamed Laïchoubi. Ceci, « les puissances du Moyen-Orient le savent », ce qui explique, selon lui, la multiplication des contacts.

Laïchoubi : « l’Algérie et le Qatar illustrent la complémentarité géostratégique entre le Moyen-Orient et le Maghreb-Sahel »

L’expert estime intéressant de relever que « les grands acteurs du Moyen-Orient se retrouvent aujourd’hui au Sahel, notamment avec l’intrusion d’Israël ». Il juge que « la realpolitik dicte un retour vers l’espace arabe et l’Algérie est un acteur majeur parce qu’il est au cœur de l’inversion géostratégique qui se passe au Sahel et devient un arbitre des grandes solutions », et que « l’Algérie et le Qatar illustrent la complémentarité géostratégique des deux régions, Moyen-Orient et Maghreb-Sahel, qui n’est plus à prouver ».

Il poursuit : « le Qatar est un partenaire stratégique et un acteur géopolitique majeur. Même si sa stratégie en Syrie, en Libye et au Sahel a été mise en échec, le Qatar est un acteur qui développe une intelligence incontestable et qui a tiré les conclusions sur l’espace arabe où, l‘enjeu devient de déterminer quelles sont les compatibilités que les grands acteurs peuvent mettre ensemble ? »

Laïchoubi : « la vision de la diplomatie algérienne devient extrêmement attractive »

« Ces acteurs du Moyen-Orient se sont aperçu que l’évolution du dossier syrien n’a pas été comme ils l’estimaient, et que la stratégie de prééminence occidentale et de fermeture de la méditerranée au détriment de la Russie a été totalement mise en échec », développe le conférencier, qui relève que « le rôle intelligent de l’Algérie et de sa diplomatie, son équidistance avec les grandes puissances et sa philosophie de non-alignement commencent à intéresser certains pays arabes ».

En ce sens, il estime que la diplomatie algérienne est un exemple à suivre : « la vision de la diplomatie algérienne devient extrêmement attractive, c’est ce qui fait qu’un certains nombre de rapprochements peuvent se faire plus facilement ».

Pour le conférencier, le but n’est pas d’être d’accord sur tout, mais de s’inscrire ensemble dans des politiques d’intérêts communs : « avoir une bonne lecture des évolutions géostratégiques, prendre les bons rendez-vous et mettre en place un espace de dialogue et de concertation pour créer un espace de compatibilité et pour éviter que ces grands développements ne se fassent au détriment des pays arabes ».

Les pays arabes, le Sahel et le nord de l’Afrique sont ce qu’il qualifie « d’espaces moues », que les géo-stratèges définissent comme étant « des espaces à fort potentiel ». « C’est le cas », confirme l’expert, qui rappelle que « l’intégralité des grands détroits géostratégiques se situe dans le monde arabe : Bab El Mandeb, Ormuz, Suez, Gibraltar, la Corne de l’Afrique, en plus du potentiel énergétique majeur…etc ».

Selon lui, face à ce contexte géopolitique difficile et agressif, « l’espace arabe évolue en maturité avec une plus grande lecture de la realpolitik, car certains pays arabes sont entrainés dans des stratégies qui ne sont pas les leurs et se retrouvent mis en échec avec beaucoup de pertes financières. » Il cite à titre d’exemple l’Arabie Saoudite qui « développe une relation plus critique avec la Russie avec davantage de compatibilités », il explique que « ces pays s’aperçoivent qu’il faut maintenant se focaliser sur leur propre développement ».

« L’espace international est également devenu un élément déterminant pour les politiques intérieures», insiste l’expert. Conséquence, selon lui, « une bonne lecture des évolutions internationales devient un élément fondamental ».

 

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