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Sanctions occidentales contre la Russie: l’Europe menacée par la récession

En Europe, les regards sont braqués ces derniers jours sur la canicule, et dans quelques semaines, les regards seront braqués sur le rude hiver, les chauffages remplaceront les climatiseurs. Les deux se partagent la crise énergétique que vit le monde comme conséquence du conflit ukrainien et les sanctions occidentales à l’égard de la Russie.

La crise énergétique signifie une hausse des prix, et puisement des stocks. L’Allemagne vient de tirer la sonnette d’alarme. Par la voix de Klaus Müller, le président de l’Agence fédérale des réseaux, l’Allemagne exprime ses inquiétudes quant à la régularité des approvisionnements pour faire face à un rude hiver.

L’Allemagne est actuellement encore dépendante à environ 35% de l’approvisionnement en gaz naturel de la Russie. Pire encore, Klaus Müller est catégorique «l’objectif d’un niveau de remplissage des réservoirs de stockage de gaz de 90 ou 95% d’ici le 1er novembre est, finalement, «irréaliste».

L’hiver du mécontentement arrive. Les avertissements de Klaus Müller se déclinent déjà à travers la réalité conjoncturelle de l’Allemagne. Le journal allemand Die Welt vient d’indiquer qu’en vue de l’hiver, l’Allemagne souhaite remplir au plus vite ses stockages de gaz, mais les installations de stockage ne seront pas complètement remplies. Il donne pour information que l’objectif du gouvernement fédéral et de l’agence du réseau est d’économiser 20% du gaz pour se préparer à l’hiver, mais que «nous sommes actuellement à environ 14% d’économies» et que «nous ne pourrons pas affronter l’hiver sans un effort supplémentaire».

Cette situation est valable pour beaucoup de pays européens, qui se sont alignés sur la position américaine et l’évaluation « irréaliste » de la présidente de la commission européenne  Ursula Von der Leyen. L’Europe est confrontée à la crise énergétique la plus extrême jamais survenue auparavant dans le Vieux Continent. L’Europe est vraiment menacée par une pénurie de gaz au moment où elle en a le plus besoin, c’est-à-dire à la période la plus froide de l’année. La fermeture du gaz russe enverrait certains pays de l’UE en récession, avait prévenu l’institution financière de Bretton Woods le FMI «le PIB de la Hongrie, de la Slovaquie et de la République tchèque chuterait jusqu’à 6%», et que «l’Italie, l’Allemagne et l’Autriche seront également durement touchés».

Et d’ajouter: «Nos travaux montrent que dans certains des pays les plus touchés d’Europe centrale et orientale, il existe un risque de pénurie pouvant atteindre 40% de la consommation de gaz et de réduction du produit intérieur brut pouvant atteindre 6%». Le média britannique The Guardian abonde dans le même sens «L’Allemagne est « au bord de la récession » alors que la crise énergétique ébranle la confiance».

Les prévisionnistes de la Bundesbank prévoient un effet domino en l’absence de sources d’énergie russes en expliquant que dans ce scénario il y aura une défaillance systémique dans les chaînes de production et d’approvisionnement qui à son tour amplifiera l’effet de choc initial de deux fois et demie. Dans ce contexte, le chancelier Olaf Scholz annonce le redémarrage de 16 centrales thermiques au charbon et au mazout qui avait été fermées et de prolonger la durée de vie de 11 autres polluants atmosphériques de ce type.

En conséquence, les Européens vont connaître un hiver difficile qui devrait provoquer des mécontentements au sein de la société. C’est qu’il est impossible d’éviter le rationnement de l’approvisionnement en électricité tant pour les ménages que pour les entreprises. Lorsque les gens vont être confrontés à devoir réaliser un choix en hiver entre manger ou se chauffer l’ampleur des manifestations de rue pourrait dépasser la récente révolte paysanne des agriculteurs néerlandais et celle des Gilets jaunes. L’explosion sociale est presque inéluctable.

Aujourd’hui, il est clair, que les sanctions économiques occidentales, visant la Russie, se sont trompées de cible, car c’est l’Europe qui en fait les frais. La cible des sanctions américaines est l’économie allemande. Il n’y a pas de gagnants en UE dans la guerre des sanctions voulues par les Etats-Unis. Le grand perdant aujourd’hui est la première puissance de l’UE qui est la locomotive de l’intégration européenne: l’Allemagne.

Le Royaume-Uni avec son Brexit semble se porter mieux. «Les usines britanniques ont signalé un ralentissement de la croissance et des nouvelles commandes, alors que la demande s’affaiblissait – tandis que les pressions sur les prix pourraient également diminuer à mesure que les prix des matières premières baissent», indique The Guardian. Il convient de rappeler, que le gaz est la principale source d’énergie pour chauffer et fabriquer de l’électricité en UE, alors que la Russie est son principal exportateur. En 2021, l’UE a consommé 565 milliards de mètres cubes et en a importé 349,1 milliards de mètres cubes, dont 31,24% de Russie.

La hausse des prix du gaz a exercé un immense impact sur l’industrie européenne: les compagnies énergivores ont été confrontées à une réduction de la production, voire à son arrêt à cause des prix élevés du gaz. L’Europe a déjà commencé à passer aux importations de gaz américain, ce qui a fait des États-Unis le plus grand exportateur de gaz naturel liquéfié (GNL) au premier semestre de l’année.

Ces dernières années, bien que les Etats-Unis aient continué d’augmenter les livraisons de gaz en Europe, aucune percée n’a eu lieu: selon les informations disponibles, entre avril 2016 et début 2022, l’UE a importé un peu plus de 60 milliards de GNL américain. Après le début du conflit russo-ukrainien, les importations de GNL ont augmenté, mais en l’absence d’infrastructure les Etats-Unis ne peuvent pas alimenter à court terme l’UE en quantité suffisante de gaz pour devenir une alternative ou pour interdire complétement les importations d’hydrocarbures russes.

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