A la une, Contribution

France :  le droit de tout caricaturer, sauf les symboles et les représentants du sionisme

Par Khider Mesloub

« Nous ne renoncerons pas aux caricatures, aux dessins, même si d’autres reculent », avait proclamé, le 21 octobre 2020, Macron lors d’une cérémonie d’hommage national au professeur d’histoire-géographie, Samuel Paty, décapité après avoir montré à ses élèves des caricatures du Prophète Mohammed QSSL. 

Rappelons que les caricatures exhibées par le professeur Samuel Paty à ses élèves, en guise de support pédagogique, avaient été publiées en 2012 par le journal satirique et sulfureux Charlie Hebdo. Ces caricatures avaient été jugées « ignobles » par l’ancien ministre de l’Education, Luc Ferry. « On n’est pas obligé, pour enseigner la liberté d’expression, de montrer des caricatures qui sont à la limite de la pornographie », avait déclaré le philosophe sur France-info. 

Ainsi, en 2020 le président français Emmanuel Macron défendait la liberté de caricaturer, « quoi qu’il en coûte ». Or, cette liberté d’expression de la caricature semble ne s’appliquer qu’à l’univers culturel et cultuel musulman. En effet, essayez de caricaturer le culte judaïque ou l’Holocauste : vous vous exposez à des poursuites judiciaires, vous encourez une lourde condamnation pénale et financière. 

Quand bien même le juif est parfois présenté dans les dessins de Charlie Hebdo, il n’est jamais seul mais configuré discrètement aux côtés de l’imam et du curé, histoire d’accréditer la propagande selon laquelle les trois religions monothéistes seraient impartialement étrillées, pilonnées, caricaturées en France.  

Sans nul doute, en France, la liberté d’expression s’arrête au seuil des institutions étatiques et des instances judaïques. Toute caricature des instances officielles françaises ou européennes semble sévèrement réprouvée, condamnée. La preuve. On se souvient que le 25 mars 2021, au début de la guerre russo-ukrainienne, l’ambassadeur de Russie à Paris avait été convoqué au ministère des Affaires étrangères à la suite de la publication sur son Twitter de deux caricatures jugées « inacceptables » par les autorités françaises.  

Le premier dessin montrait les Européens à genoux léchant les fesses de l’Oncle Sam, sous le titre « La solidarité européenne en action ». Le second dessin montrait une allégorie de l’Europe malade, agonisante, sous les injections de seringues géantes toxiques (“russophobie”, “néonazisme”, “sanctions”, “Covid-19″, “Otan”, “cancel culture”) administrées par l’Oncle Sam américain et un représentant de l’Union européenne. 

« Ces publications sont inacceptables et le ministère des Affaires étrangères a très clairement fait savoir cela à l’ambassadeur de Russie », avait déclaré le président Macron, furibond. Pour information, sous la levée de bouclier, l’avalanche de commentaires indignés, l’ambassade de Russie en France avait poliment supprimé son tweet. 

On se souvient comment l’Etat français, notamment son institution éducative (les professeurs) et ses organes de propagande médiatique (les journalistes), en dépit des protestations des dirigeants de plusieurs pays musulmans, et de nombreuses manifestations violentes organisées notamment au Pakistan, Bangladesh, Indonésie, Inde, Afghanistan, avait maintenu la publication et la diffusion des caricatures. Les caricatures de Charlie Hebdo continuent d’être fréquemment republiées par les périodiques français. De même, ces caricatures figurent désormais comme support pédagogique à destination des écoles. Paradoxalement, au pays de la liberté d’expression, si des élèves, considérant être offensés par les caricatures, émettent des réserves ou critiques d’ordre pédagogique sur ces caricatures, ils risquent d’être interpellés pour apologie du terrorisme et fichés S.

Les caricatures seraient-elles tolérables en fonction des univers symboliques représentés ?  Comment doit-on interpréter l’indignation des autorités françaises provoquée par la publication des dessins de l’ambassadeur de Russie à Paris ? 

Pourtant, selon les défenseurs de la liberté d’expression, en matière de critique satirique, rien n’est sacré. Notamment en matière artistique, théâtrale. Dans un théâtre, à la télévision ou dans une station radio. Tout est objet de dérision. Aucune autocensure n’est tolérable. Ni aucune censure. La satire est amorale. Elle transcende les considérations morales, éthiques, politiques. Elle fait fi des susceptibilités personnelles, religieuses, politiques.  Par-delà la morale, comme le dirait Nietzsche, voilà sa raison d’être.  

Mais, en France, avec sa caricaturale démocratie hypocrite, badigeonnée de despotismes en toile de fond, la liberté de caricaturer n’est valorisée que pour l’univers culturel et cultuel musulman.  Au vrai, en France, de même que la caricature du culte musulman est le cache-sexe du racisme anti-arabe, de même l’anti-islamisme est la feuille de vigne qui dissimule la haine de l’islam et des musulmans. 

Sans conteste, le propre de la satire n’est pas de plaire mais de provoquer, notamment le pouvoir et la société.  Mais à focaliser à dessein la provocation sur l’univers cultuel islamique, la caricature française, notamment celle diffusée par Charlie Hebdo, vise en vrai les musulmans, outrancièrement ridiculisés, humiliés, figurés dans des postures dégradantes, déshumanisées. 

Comment interpréter le dessin de Riss intitulé « Le Coran c’est de la merde, ça n’arrête pas les balles », qui a fait la une de Charlie Hebdo le 10 juillet 2013, montrant un musulman mitraillé par des balles traversant le Coran qu’il tient contre lui ? Assurément, Charlie Hebdo, périodique longtemps ennemi des institutions dominantes irrévérencieusement caricaturées, est devenu obséquieusement l’allié du pouvoir qui l’a enrégimenté, au nom des valeurs de la République bourgeoise impérialiste française et de la laïcité réputée pour son élasticité idéologique islamophobe, dans sa Croisade contre les Arabes et les musulmans.

Une chose est sûre, en France on a le droit de tout caricaturer, sauf les symboles sionistes. On a le droit de se gausser de tout homme public ou politique, sauf des représentants du sionisme. Sinon, vous êtes accusé d’antisémitisme et passible de poursuite judiciaire. 

C’est la fâcheuse mésaventure arrivée à l’humoriste Guillaume Maurice, après sa chronique diffusée, le 29 octobre dernier, sur France Inter. L’humoriste avait qualifié le Premier ministre israélien, Benjamin Natanyahou, le boucher de Gaza, de « sorte de nazi sans prépuce ». Aussitôt, levée de boucliers de toutes les corporations culturelles, intellectuelles et politiques inféodées au sionisme. Personnalités du monde politique, de la culture ou d’instances religieuses juives ont dénoncé ces propos, les qualifiant d’antisémites. 

Comble du cynisme, y compris le directeur du journal Charlie Hebdo, ce torchon d’ordinaire sectateur de la liberté d’expression, s’était joint à la meute sioniste pour fustiger et condamner Guillaume Meurice. « Comment peut-on encore utiliser des termes si puérils. Ce choix des mots semble particulièrement malvenu. Ce sont des raccourcis. Bien sûr que l’on peut rire de tout, mais il y a une manière de le faire », avait déclaré Riss, directeur de Charlie Hebdo. 

Pour rappel, au début de l’année, à la suite de la polémique soulevée par la publication de ses 35 caricatures du Guide suprême iranien, Ali Khamenei, Riss défendait fermement le droit d’expression : « Jusqu’à présent, nos dessins touchaient aux dogmes religieux. On nous reprochait de ne pas nous en prendre aux puissants. Là, on s’attaque à une figure dirigeante d’un régime dictatorial et cela semble encore poser un problème, ce qui montre la malhonnêteté de cet argument. Nous avons le droit de caricaturer des dirigeants politiques, qu’il s’agisse de Joe Biden ou de Jair Bolsonaro. Dès la naissance du mouvement de contestation, en septembre, on s’est demandé comment marquer notre soutien aux Iraniennes et aux Iraniens qui défendent leur liberté face à la théocratie. Notre réponse, ce sont les dessins, un mode d’expression pacifiste, non violent, contrairement à ce que disent nos détracteurs ».

Apparemment, son droit de caricaturer s’applique à tous les dirigeants du monde entier, sauf à ceux d’Israël, encore moins au premier ministre, le fasciste Netanyahou. 

« Halloween approche et tout le monde commence à chercher un déguisement pour faire peur. En ce moment, le déguisement Netanyahou marche pas mal. C’est une sorte de nazi, mais sans prépuce », avait lancé le chroniqueur, Guillaume Meurice. 

Pourtant, Guillaume Meurice, connu pour son ton irrévérencieux, a fait sa blague sur une personnalité politique d’un pays étranger, à savoir Israël. Ironie de l’histoire, dans son propre (sale) pays, Netanyahou est, depuis plus d’un an, contesté, conspué, fustigé, injurié, caricaturé, taxé de fasciste, par des centaines de milliers de manifestants israéliens, sans soulever la moindre controverse ni condamnation. 

Nous avons la preuve que la France est plus royalement sioniste que le sionisme. La France est devenue une caricaturale nation infectée de sionistes. Un pays émasculé. 

En tout cas, dans le pays de la liberté d’expression à géométrie variable et de soutien inconditionnel au sionisme invariable, depuis quinze jours Guillaume Meurice, outre le fait d’avoir été sanctionné par son employeur, est victime d’un véritable lynchage collectif déchaîné par des sionistes.  Il est poursuivi en justice pour antisémitisme, reçoit quotidiennement des tonnes d’insultes, des menaces de mort. Tout cela, sans soulever aucune indignation ni poursuite judiciaire contre les coupables, probablement tous sionistes. 

Un sénateur français a saisi l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) pour sanctionner Guillaume Meurice pour son sketch sur Netanyahou. Il a dénoncé l’humoriste pour atteinte au « respect et à la dignité de la personne humaine ». Si, pour l’ensemble de la classe dirigeante et politique française, le respect et la dignité humaine sont incarnés par le boucher des Palestiniens, le chef du gouvernement nazi israélien, on comprend mieux la cause de la fascisation de la société française et de la décadence de la France. 

Une chose est sûre, avec la polémique soulevée par le sketch de Guillaume Meurice, la France a dévoilé que la liberté d’expression est restrictive, à géométrie variable. À géographiquement israélienne, autrement dit édito-territorialement sous contrôle de Tel Aviv. La preuve. Ce sont les mêmes qui se mobilisent pour la liberté de la presse, de blasphémer, de caricaturer, qui interdisent les manifestations de soutien au peuple palestinien martyr, de blaguer sur les dirigeants israéliens, leurs intouchables maîtres sionistes, criminels de guerre. 

 

 

Partager cet article sur :

publicité

Dessin de la semaine

Articles similaires