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Le Chef de l’État a inauguré une stèle commémorative :L’émir Abdelkader à la rencontre de Chamil

Par Hocine Neffah

Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a inauguré, hier, une placette et une stèle commémorative de l’Émir Abdelkader. Cet événement est vu comme un acte profond quant à l’approfondissement des relations algéro-russes et la consolidation des liens historiques à tous les niveaux de la coopération bilatérale.

Ce geste est à lui seul, un message véhiculant les valeurs humanistes dont l’Émir Abdelkader est l’incarnation par excellence. Ériger une stèle à la mémoire de ce grand homme est une reconnaissance saillante du rôle de ce grand personnage au nom de l’Algérie qui se cristallisait par sa résistance et sa lutte armée pour se faire une place dans le concert des nations modernes et indépendants. Les Russes ne laissent rien au hasard, le choix de l’Émir Abdelkader a un lien avec leur histoire durant la période tsariste où le pouvoir autocratique et absolutiste faisait rage. Cette histoire a été faite par un personnage qui partageait le même souci et le même objectif que l’Émir Abdelkader, à savoir le souci de se faire libérer du joug et de la mainmise coloniale et de la domination tsariste. Il s’agit de l’imam Chamil, le chef musulman tchétchène, qui a échangé des lettres avec l’Émir Abdelkader et qui a suivi ce que faisait l’Émir Abdelkader en matière de résistance, de bravoure et de témérité contre l’armée coloniale française.
L’imam Chamil est né dans le Caucase vers 1796, il a commencé a se démarquer de la domination tsariste à l’âge de 33 ans. Il a mené une insurrection contre la Russie tsariste pour recouvrir la souveraineté de la Tchétchènie. Il a eu le même parcours que celui de l’Émir Abdelkader qui a mené une guerre sans merci contre l’occupant français.
Ces ressemblances dans presque tous les aspects de la vie religieuse et militaire ont poussé ces deux personnalités historiques de se connaître à travers des échanges épistolaires. La relation ne s’est pas limitée au stade des échanges de lettres et des missives, elle évolue pour se transformer en une rencontre en Suez. C’était la première et la dernière rencontre entre les deux grands hommes. Ces rapports ont permis d’avoir des liens très soudés entre les deux peuples et civilisations, la première appartenant à l’Afrique du Nord et la deuxième à l’Asie mineure.
Les évènements de Damas ont ouvert les portes grandes à l’Émir Abdelkader pour qu’il soit reconnu comme un grand humaniste et un homme d’un esprit très élevé et raffiné. Chamil était parmi ceux qui ont été subjugués par les exploits et les oeuvres héroïques et humanistes de l’Émir Abdelkader. La lettre envoyée par Chamil en 1860 à l’Émir Abdelkader soulignait: «À celui qui s’est rendu célèbre parmi tous, grands et petits; qui par ses nombreuses et précieuses qualités, se distingue du reste des hommes; qui a éteint le feu de la discorde avant qu’il n’ait eu le temps de se propager; qui a déraciné l’arbre de l’inimité, dont le fruit est, comme toujours, le visage du démon. Que Dieu soit loué, qui a revêtu son serviteur de force et de foi! Nous voulons parler de l’ami sincère et véritable. Abd el-Kader le juste. Salut à toi! puisse le palmier du mérite et de l’honneur porter des fruits en ta personne!…/… Apprends que, lorsque mon oreille a été frappée de ce qui est détestable à l’ouïe, et odieux à la nature humaine – je fais allusion aux évènements récemment arrivés à Damas entre les musulmans et les chrétiens».
C’était l’évènement dramatique qui a déchiré les deux communautés musulmane et chrétienne. Plus que ça, Chamil abordait les choses avec respect absolu à l’égard de l’Émir Abdelkader en lui rappelant que «quand je fus informé que vous aviez abrité les tributaires sous les ailes de la bonté et de la compassion; que vous vous étiez opposé aux hommes qui agissent contrairement à la volonté du Dieu Très Haut, et que vous avez conquis la palme de la victoire dans l’amphithéâtre de la gloire – Succès que vous avez largement mérité – je vous ai loué, comme Dieu le très haut vous louera au jour où la fortune et les enfants seront peu de chose. En réalité, vous avez pratiqué la parole du grand apôtre que le Dieu très Haut a envoyé, en témoignage de compassion, à ses humbles créatures, et vous avez dressé une barrière contre ceux qui rejetaient son grand exemple. Puisse Dieu nous préserver de ceux qui transgresse ses lois! Impatient de témoigner de l’admiration que je ressens pour votre conduite, je me hâte de vous adresser cette lettre, telle une goutte débordant de la fontaine de mes sympathies».
Telle est l’image exprimée par Chamil, le chef musulman du Caucase envers l’Émir Abdelkader. On comprend pourquoi la Russie d’aujourd’hui n’a pas oublié ce grand homme en érigeant une placette et une stèle commémorative en son nom et à son honneur.

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