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L’Occident et le double génocide à Ghaza

Le 1er novembre 2005, l’Assemblée générale des Nations Unies décide d’instituer le 27 janvier comme Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste. La date marque l’anniversaire de la libération du camp de concentration et d’extermination nazi d’Auschwitz-Birkenau. L’Assemblée générale prie par ailleurs les États membres d’élaborer des programmes éducatifs pour adopter les enseignements de l’Holocauste afin de prévenir les actes de génocide.

Par Mohamed Taleb

Le 1er novembre 2005, l’Assemblée générale des Nations Unies décide d’instituer le 27 janvier comme Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste. La date marque l’anniversaire de la libération du camp de concentration et d’extermination nazi d’Auschwitz-Birkenau. L’Assemblée générale prie par ailleurs les États membres d’élaborer des programmes éducatifs pour adopter les enseignements de l’Holocauste afin de prévenir les actes de génocide.

Le 26 janvier 2024, Bruxelles  célèbre la Journée internationale de la Mémoire de l’Holocauste.  Le texte de la déclaration finale de la commission s’embellit d’un mensonge monumental : le camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau aurait été libéré par les troupes alliées et non pas par l’Armée Rouge soviétique. Les Russes sont également exclus de la commémoration de cet événement en cette année 2024 tout comme en 2023. 

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen,  n’y va pas par quatre chemins pour dénoncer « l’agression  contre Israël » du 7 octobre 2023. En déclarant : « plus jamais ça, c’est maintenant…Après les attaques terroristes abjectes perpétrées par le Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, la commémoration de l’Holocauste a pris un nouveau sens. Les Juifs européens vivent à nouveau dans l’angoisse: aucun parent ne devrait avoir peur d’envoyer son enfant à l’école »,  elle forge instantanément le binôme « Hamas-Holocauste » avec, à charge du Hamas, un chef d’inculpation, la répétition du génocide des Juifs, et  lance en même temps le concept d’un antagonisme inexistant (Yasser Arafat et Uri Avneri s’entendaient portant très bien) entre Palestiniens et Juifs et d’une manière générale entre les méchants Arabes et les Juifs (l’historien juif Shlomo Sand  déclarait il y a peu de temps que les Juifs étaient 1000 fois mieux traités en terre d’islam qu’en terre chrétienne).
D’un autre côté, l’Holocauste, une question exclusivement européenne et dont l’exceptionnalité, par rapport à d’autres crimes contre l’humanité, est tant arborée par l’Occident, doit subsister dans la mémoire universelle. Pourtant les sionistes actuels et leurs sponsors occidentaux,  prétendant représenter les Juifs victimes de l’Holocauste, sont les responsables d’actes monstrueux exercés sous nos yeux à Ghaza.
Le sociologue et philosophe juif, Edgar Morin (né Nahoum et agé de 101 ans), écrivait dans le journal Le Monde du 22 janvier 2024 : « …C’est une leçon tragique de l’histoire : les descendants d’un peuple persécuté pendant des siècles par l’Occident chrétien, puis raciste, peuvent devenir à la fois les persécuteurs et le bastion avancé de l’Occident dans le monde arabe ». 

Toutes les réactions violentes (les non-violentes ne figurant pas dans le registre répressif sioniste) de la part d’Israël sont légitimes et soutenues par l’Occident. Le droit à sa défense de l’entité sioniste est un droit sacré pour l’Occident et pour Ursula von der Leyen en premier.  La commémoration est célébrée au moment où le massacre de la population de Ghaza se poursuit.  

Nous rappelons que la nomination de Ursula von der Leyen que l’ancien ministre et de même couleur politique,  Luc Ferry, considère comme  » la plus grande catastrophe qui soit arrivée à l’Europe »,  à présidente de l’Union européenne, a été négociée avec la France, cette dernière récoltant, en échange de son approbation, de la nomination de Christine Lagarde à directrice de la Banque centrale européenne (BCE). Par ailleurs, Ursula von der Leyen a été impliquée dans de multiples scandales en tant que Ministre de la Défense (affaire du recours excessif à des consultants en gestion-2018), pendant la période de la pandémie Covid (contrats douteux de vaccins avec les laboratoires Pfizer-BionTech en 2021) et auparavant pour accusation de plagiat dans le cadre de son doctorat de 1990, nonobstant la décision en 2016 de l’Université de médecine de Hanovre en faveur de la conservation de son titre, le plagiat ayant caractère  bénin. Une décision qui a d’ailleurs soulevé beaucoup de critiques.

Comme lors de la célébration du 8 mai 1945, journée de la libération de l’Europe du joug nazi, 45.000 algériens se faisaient  massacrer en Algérie, dans la région de Sétif, par l’armée et les colons français, Le martyre de la population de Ghaza continue, en cinémascope, avec le soutien inconditionnel de l’Occident (USA, Union européenne)  à Israël. Le « plus jamais ça » n’a de validité qu’en Europe.  

Ursula von der Leyen évoque par ailleurs l’angoisse des Juifs européens qui ont peur d’envoyer leurs enfants à l’école, victimes potentielles d’une «vague d’antisémitisme» provoquée par l’attaque du 7 octobre 2023.  Mais elle se garde bien d’évoquer le nombre d’enfants de Ghaza tués et parfois déchiquetés par les bombardements de l’armée sioniste.  L’évocation de ce massacre d’enfants, plus de 10.000 à ce jour, est qualifiée d’acte antisémite par les sionistes et pro-sionistes et ferait  automatiquement référence à la « légende antisémite  médiévale » selon laquelle les Juifs assassinent des enfants afin d’utiliser leur sang à des fins rituelles (l’origine remonte à l’affaire de Guillaume de 1144 en Angleterre, premier cas de meurtre rituel sous l’accusation du moine chrétien Thomas de Monmouth. L’évolution des événements va mener plus tard, en 1290, à l’expulsion d’Angleterre de tous les Juifs avec une interdiction de séjour qui va durer plus de 4 siècles). 

Pour Samuel Salzborn, commissaire à l’antisémitisme du Land de Berlin, et pour qui l’équation Hamas équivalent à ISIS ou Daech est essentielle,  le Hamas joue sur le registre émotionnel pour inciter à l’adhésion à son  projet destructif.  Divulguer à tout va les photos d’enfants blessés relève d’une vision antisémite.  Dans une vidéo-interview  du 26.10.2023 au journal Welt, Salzborn déclarait tout simplement que « l’étiquette « pro-palestinien » occulte le fait qu’il s’agit de haine envers les Juifs ».  Être pro-palestinien équivaut à de l’antisémitisme selon Salzborn.  Les centaines de milliers de personnes qui ont manifesté dans les rues des villes du monde entier, New York, Londres, Paris, Rome, Berlin, Montréal, Madrid etc. , sont pour lui des antisémites et ont dévoilé leur haine des Juifs. Pia Lamberty, membre du  CeMAS (Centre pour le Monitoring, Analyse et Stratégie-Berlin) soutient que « l’affirmation selon laquelle Israël commet un génocide est basée sur un récit antisémite qui est exploité pour diaboliser Israël. ».
Que diraient-ils sur  les propos tenus par le général sioniste Ghassan Alian (voir captures d’écran  tableau ci-dessous) sur les Palestiniens : « pas d’électricité, pas d’eau, que des dégâts… vous vouliez l’enfer, vous aurez l’enfer» pendant que Yoav Gallant les traitait d’animaux humains en plus d’être des terroristes.

La promesse de Ghassan Alian a été tenue. L’armée sioniste a créé, avec le soutien occidental, l’enfer à Ghaza. Réseaux sociaux et sites alternatifs dévoilent le niveau d’intensité des crimes contre l’humanité commis par l’entité sioniste et le soutien à ces crimes par les gouvernements des États-Unis et de l’Union européenne lesquels qualifient toute condamnation de ces crimes à de l’antisémitisme. Israël n’a, depuis sa création en 1948,  jamais respecté le droit international, et le soutien des gouvernements occidentaux au génocide de Ghaza, est le témoignage de leur immense hypocrisie quant à leur politique à l’égard du droit international ou des droits de l’homme.  

La Russie, dans le conflit avec les USA via l’Ukraine, a fait l’objet, dès le début, de la part des Occidentaux, de condamnations au niveau de toutes les instances internationales, Nations Unies, Conseil de Sécurité, Cour de justice internationale, Cour pénale internationale etc. Des sanctions multiformes ont été adoptées pour punir et faire chuter la Russie.

Selon  IPC Global Initiative, la situation à Ghaza est catastrophique mais les appels, tous azimuts pour un cessez-le-feu, demeurent vains. Le tableau ci-dessous nous illustre la situation qui concernera bientôt 100% de la population de Ghaza : 

L’Union européenne est d’une surdité sans limites devant la sonorité des actes commis par l’entité sioniste sur la population de Ghaza,  qui plus est, prennent des proportions inquiétantes même en Cisjordanie. Un hôpital civil à Djénine (Cisjordanie) a été attaqué par des soldats israéliens déguisés en civils et en personnel médical et ont tué trois Palestiniens, soi-disant terroristes. Aucune réaction ou condamnation de la part de gouvernements occidentaux n’a été enregistrée.

Le deuxième génocide

La décision de la Cour internationale de justice des Nations Unies (CIJ) concernant le procès de l’Afrique du Sud contre Israël pour génocide à Ghaza (séances tenues le 11 et 12 janvier 2024 à La Haye) et rendue publique le 26 janvier 2024, indique dans une ordonnance, qui a un caractère obligatoire, les mesures conservatoires dont trois sélectionnées ci-dessous:

1) Par quinze voix contre deux, 

L’État d’Israël doit, conformément aux obligations lui incombant au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir la commission, à l’encontre des Palestiniens de Gaza, de tout acte entrant dans le champ d’application de l’article II de la convention, en particulier les actes suivants :

a) meurtre de membres du groupe ; 

b) atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;

c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; et 

d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;

3) Par seize voix contre une, 

L’État d’Israël doit prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir et punir l’incitation directe et publique à commettre le génocide à l’encontre des membres du groupe des Palestiniens de la bande de Gaza ;

4) Par seize voix contre une, 

L’État d’Israël doit prendre sans délai des mesures effectives pour permettre la fourniture des services de base et de l’aide humanitaire requis de toute urgence afin de remédier aux difficiles conditions d’existence auxquelles sont soumis les Palestiniens de la bande de Gaza ;…

À noter que la présidente du jury, Mme Joan E. Donoghue, depuis 2007 au sein du Département d’État américain, depuis 2010 à la CIJ et depuis 2021 présidente de la Cour, a voté « pour » à toutes les mesures conservatoires.

Les Sud-Africains expriment leur satisfaction quant au résultat de leur requête et la direction politique du Hamas estime que la décision de la Cour apporte un changement décisif qui permet de mener vers l’isolement d’Israël et de dévoiler ses crimes à Ghaza. Mais aucune indication en direction d’un cessez-le-feu – demandé au niveau de toute la planète- n’a été formulée par la Cour confortant un tant soit peu ainsi la position israélienne quant au droit à sa défense, tout en conseillant l’État d’Israël de s’abstenir de tout acte à caractère génocidaire à l’encontre de la population de Ghaza.
Une décision, occidentale au fond, qui n’appelle pas à un cessez-le-feu immédiat pour mettre fin au massacre et à la destruction.

Mais la démarche de l’Afrique du Sud reste unique en son genre et marque un changement de paradigme dans l’histoire de la Cour internationale de justice, une institution dominée sinon régie jusqu’à présent par l’Occident. Elle met en lumière les contradictions morales et la logique du double standard dans lesquelles s’enfonce le monde occidental qui participe au génocide de Ghaza, commis par un État dont la population est issue elle-même d’un génocide (nous revenons à la déclaration d’Edgar Morin citée plus haut).
La décision de la Cour représente un coup fatal à l’arrogance sioniste et à ses sponsors occidentaux, mais ne disposant d’aucun moyen de coercition, Israël n’a pas l’intention de s’incliner devant la décision de la Cour d’autant plus  qu’il n’a jamais respecté une quelconque résolution des Nations Unies. Le martyre de la population de Ghaza continue dans les faits devant l’indifférence de l’Occident.

Pour détourner l’attention sur les décisions de la CIJ, Benjamin Netanyahou atteint le sommet de l’infamie et présente au chef de l’Agence UNRWA, Philippe Lazzarini, un dossier portant sur l’implication présumée de 12 employés de l’Agence dans l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023. L’aide financière provenant de plusieurs pays est immédiatement suspendue.

La nouvelle est relayée par la presse du monde entier.

La capture d’écran ci-jointe porte une indication erronée : en 1948/49 il était question d’un conflit israélo-arabe à la suite du nettoyage ethnique qui a débuté avant la déclaration d’indépendance de l’État sioniste, le 15 mai 1948.

Les Protocoles de Rhodes de 1949 ont mis fin au conflit et délimité (Ligne Verte), à l’avantage de l’entité sioniste (avec la nouvelle configuration géographique, Israël contrôle 81% de la Palestine historique face aux 54% attribués lors du partage onusien de 1947) prise comme base pour les Accords d’Oslo de 1993.

Avec la résolution 194 de décembre 1948, les Nations Unies mettent en place l’Agence UNRWA (United Nation Relief and Works Agency) pour la prise en charge des 800.000 réfugiés palestiniens victimes de l’épuration ethnique. 

Les réfugiés palestiniens sont actuellement près de 6 millions d’âmes distribuées sur plusieurs territoires, la Jordanie, le Liban, la Syrie, la Cisjordanie et la Bande de Ghaza.

Le graphique ci-dessous illustre la nature de l’aide financière mise à disposition de l’UNRWA par les principaux pays :

soit au total 892 millions de dollars. 

Pendant que l’Union européenne décide l’octroi de 50 milliards d’euros à l’Ukraine,  les États-Unis, le Canada, l’Australie, le Japon, l’Italie, le Royaume-Uni, la Finlande, l’Allemagne, les Pays-Bas, la France, la Suisse, l’Autriche, la Suède, la Nouvelle-Zélande, l’Islande, la Roumanie, l’Estonie, la Suède, 18 pays avec en plus l’Union européenne, décident d’affamer la population  de Ghaza, déjà victime de génocide (Le Parisien du 4 février 2024 : 27.365 morts et 66.630 blessés), et celle se trouvant dans les autres pays d’accueil des réfugiés. La population de Ghaza, soumise à une dose hebdomadaire de 6.000 bombes israéliennes,  est déjà confrontée à la famine, à la privation, aux maladies. 

Cette punition collective de la part des pays donateurs, occidentaux en grande majorité,  relève aussi du crime contre l’humanité et du crime de génocide, signe de l’effondrement moral de l’Occident. Le Hamas et les résistants palestiniens, avec peu de moyens,  ont sérieusement ébranlé le système occidental et son enfant chéri au Moyen-Orient.

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