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December 27, 2025

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Brahim Mouhouche: Le stockage céréalier, clé de l’indépendance agricole de l’Algérie

Le projet de construction de 16 silos de stockage et les précipitations exceptionnelles de cet automne dessinent les contours d'une stratégie agricole ambitieuse visant la souveraineté alimentaire.

Le projet de construction de 16 silos de stockage et les précipitations exceptionnelles de cet automne dessinent les contours d’une stratégie agricole ambitieuse visant la souveraineté alimentaire.

C’est ce qu’a abordé, ce mardi, le professeur Brahim Mouhouche, membre du Conseil supérieur de la recherche scientifique et des technologies, lors de son passage à l’émission « L’invité du jour » de la Chaîne 3 de la Radio algérienne, cernant les enjeux majeurs de l’agriculture nationale. Au cœur de ses préoccupations : le stockage des céréales et les conditions climatiques favorables qui se présentent cette année.

Le stockage, une arme stratégique

Le projet de réalisation de 16 silos pour le compte de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC), dont la livraison est prévue avant la fin du premier semestre 2026, constitue selon l’expert une avancée déterminante pour le pays. «C’est une arme. C’est une sécurisation du pays», affirme sans détour le professeur Mouhouche. Pour lui, un pays dépourvu de capacités de stockage adéquates se trouve dans « une position doublement vulnérable ». D’une part, « il manque de réserves de sécurité en cas de crise ». D’autre part, « il ne peut pas tirer profit des fluctuations des marchés internationaux pour acheter lorsque les prix sont avantageux ».

«Un pays qui a les moyens d’acheter et si à un certain moment les prix sont abordables», explique-t-il, «il achète beaucoup une quantité très importante mais s’il n’a pas de silo, même s’il le veut, il ne peut pas, il va perdre tout ça ce qu’il va acheter». Cette incapacité à stocker limite donc drastiquement les marges de manœuvre du pays sur les marchés internationaux.

L’expert révèle que la stratégie algérienne vise un stockage couvrant environ neuf mois de consommation, une durée qui permettrait de réduire considérablement la dépendance directe aux importations. «N’oubliez pas que dans le monde le stockage c’est deux fois plus, c’est des milliards de tonnes qui sont stockées. La moitié qui est consommée par an, le reste, il est toujours en stock en sécurité».

Un automne pluvieux exceptionnel, une opportunité à saisir

Cette politique de renforcement du stockage prend tout son sens dans le contexte climatique actuel. Cet automne se caractérise par des précipitations largement supérieures à la moyenne, une situation que l’Algérie n’avait pas connue depuis une dizaine d’années. «Cette année, on a dépassé la moyenne de pluie. Il y a beaucoup de pluie», constate le professeur Mouhouche avec satisfaction.

Cette abondance d’eau ouvre des perspectives prometteuses pour la production agricole nationale. «Le fait qu’il y ait de la pluie, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que la voie est ouverte pour se lancer dans l’activité de production agricole qu’elle soit production animale ou végétale», explique l’expert. Des millions d’agriculteurs, particulièrement ceux dépourvus de systèmes d’irrigation, «attendent la clémence du ciel», et cette année, leurs attentes ont été largement comblées.

Le contraste avec l’année précédente est saisissant. «L’année dernière à ce moment, il y avait vraiment un stress très important, un manque d’eau très important qui n’a pas permis aux agriculteurs de rentrer dans les champs pour travailler», rappelle-t-il. Cette année, la situation s’est inversée au point que certains exploitants rencontrent le problème inverse : «Ils ont des problèmes, ils ne rentrent pas dans les champs parce qu’il y a beaucoup d’eau dans le sol».

Trouver le juste équilibre

Le professeur Mouhouche souligne une différence fondamentale entre les besoins des agriculteurs et ceux des gestionnaires des ressources hydriques. Alors que les barrages, actuellement remplis à moins de 40%, nécessitent une pluviométrie continue pour reconstituer leurs réserves, les agriculteurs ont besoin d’alternances. «L’agriculteur, il a besoin d’une quantité de pluie qui lui permet de travailler», précise-t-il, ajoutant qu’«il suffit qu’il y ait 2 jours 3 jours» sans précipitations pour permettre aux exploitants d’intervenir sur leurs terres avec leurs engins.

«C’est très important qu’il y ait de la pluie mais qu’il y ait aussi des périodes, des séquences d’accalmie», insiste l’expert.

Cette eau abondante bénéficie également aux régions sahariennes, bien que sous une forme différente. «La pluie du sud généralement, c’est des séquences, ce n’est pas permanent et lorsqu’elle pleut, il pleut sous forme d’orage», explique le professeur Mouhouche.

Des indicateurs positifs pour la production

Interrogé sur les perspectives de production, l’expert se montre optimiste : «Il n’y a pas de doute. Généralement à 95% des cas lorsqu’il y a de la pluie, ça ne fait que du bien pour l’agriculture».

Il nuance toutefois son propos en mentionnant quelques cas exceptionnels où des pluies printanières pourraient provoquer «l’avortement des fleurs» en arboriculture, mais précise immédiatement : «Ce n’est pas pour autant qu’on va croire qu’il vaut mieux ne pas qu’il pleuve. La pluie elle est toujours la bienvenue pour l’agriculteur».

Un soutien étatique massif aux agriculteurs

Pour accompagner ces évolutions, l’État maintient un soutien sans précédent au secteur agricole. Le professeur Mouhouche n’hésite pas à affirmer que «l’Algérie, je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de pays pour ne pas dire qu’il n’y a pas de pays qui subventionne, qui aide autant que l’Algérie pour les agriculteurs». Avec un budget de près de 6 milliards de dollars prévu dans la loi de finances, certaines productions bénéficient de subventions atteignant 50%.

Parmi les mesures récentes, « la facilitation de l’importation de matériel agricole », même d’occasion», devrait renforcer la mécanisation du secteur. «Celui qui n’a pas de mécanisation ne peut pas se développer», insiste l’expert, rappelant l’importance de cet outil pour améliorer la productivité.

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