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December 10, 2025

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Football : stade suprême de l’aliénation planétaire et terrain topique d’extériorisation de la violence (III)

Par Khider Mesloub

À cet égard, force est de constater que la caractéristique essentielle de la peste émotionnelle footballistique est son pouvoir de contamination. Rien n’est plus contagieux que la peste. Mus par l’esprit de meute ou de horde, les shootés du ballon rond transforment souvent les stades en terrains d’affrontements violents généralisés meurtriers. Il ne faut pas oublier les responsabilités du football-business dans les massacres du Heysel en 1985 et de Sheffield en 1989. Ni les responsabilités des forces de l’ordre dans la mort de 131 spectateurs indonésiens. En effet, le 1 octobre 2022, le soir du match, après la défaite de leur équipe, pour exprimer leur mécontentement des centaines de fans avaient pénétré sur le terrain. En riposte, la police indonésienne lança aussitôt des volées de gaz lacrymogène vers les gradins bondés. Les spectateurs se précipitèrent en masse vers les portes étroites de sortie où ils furent piétinés par la foule, et étouffés par la grande quantité de gaz lacrymogène déversée par la police. Au reste, les familles des victimes et les supporteurs « survivants » accusèrent les forces de l’ordre d’avoir réagi de façon disproportionnée et irresponsable.

Contrairement à l’opinion communément répandue, de nos jours le football ne constitue pas un vecteur d’intégration sociale, de concorde civile ou d’amitié entre les peuples. Au contraire, la réalité effective des terrains nous prouve qu’il remplit une fonction réactionnaire de dépolitisation, de grégarisation régressive et d’exutoire aux frustrations libidinales et sociales, de diversion idéologique, de déversoir hystérique.

À cet égard, si le football est producteur de violences sociales, vecteur d’agressivités nouvelles, cela tient aussi à sa structure même : le football est organisé en logique de compétition et d’affrontement ; il est fondé sur le principe de rendement et de hiérarchie, normes inhérentes à la société capitaliste foncièrement belligène.

Football : régression au stade « baballe »

L’apothéose de l’aliénation se vérifie en ces temps de crise économique et sociale. En effet, il est pathétique que, au sein des populations, l’unique sujet de conversation quotidien soit le football. À cet égard, en matière de commentaires footballistiques, chaque individu rivalise d’ingéniosité pour s’improviser expert sportif de comptoir de café ou de boutique de rue. Selon la topique psychique freudienne, on est en pleine régression au stade « baballe », où les déjections logorrhéiques footballistiques dominent la personnalité.

Pour autant, au-delà de la « fête populaire », le football a toujours été au service des politiques réactionnaires, du dévoiement des luttes sociales, vecteur de distillation du chauvinisme, d’obscurcissement de la conscience de classe. Le football est le seul sport dépourvu d’« innocence politique ». Les grandes messes footballistiques ont souvent servi à légitimer diverses dictatures et régimes autoritaires, de manipulations politiques dans les pays dits « démocratiques ».

Pour l’historien Eric Hobsbawm, le football c’est « la religion laïque du prolétariat », confiné dans la vénération de ces nouveaux Dieux du ballon rond. Pour apaiser les affres du prolétariat, le football s’est converti à l’affairisme capitaliste, par ses promesses paradisiaques de promotion sociale et d’enrichissement facile censément octroyés à tout jeune adepte du ballon rond. Une chose est sûre : le football est un efficient instrument de mystification idéologique et de démobilisation politique.

Le plus révoltant à l’occasion de la dernière Coupe immonde organisée au Qatar, c’est qu’au moment où tous les supporteurs de la majorité des pays communiaient joyeusement dans l’extase tonitruante, partout les systèmes des protections sociales étaient pulvérisés dans un silence assourdissant d’aliénation.

De même, au moment où se déroulait l’Euro en juin et juillet 2021, en pleine panique pandémique politiquement instrumentalisée, les gouvernants poursuivaient leur politique antisociale, accéléraient la militarisation de la société, aggravaient la paupérisation des populations.

Assurément, les classes populaires préfèrent s’emparer des tribunes des stades que d’occuper les terrains centraux politiques. Préfèrent succomber aux « passions vibratoires » et aux « extases » footballistiques que de se passionner pour de vibrantes causes politiques émancipatrices. Chaque adepte du foot réclame sa dose d’opium footballistique pour assouvir son addiction, loin des tribulations politiques et sociales mais près des tribunes des stades hystériquement envahies.

Football : véritable multinationale capitaliste

Le paroxysme de l’aliénation se déroule dans les stades. Faire jouer les spectacles footballistiques par des acteurs mercenaires millionnaires devant des smicards et des chômeurs constitue en effet l’apothéose de l’aliénation planétaire. Par rapport au néant que les joueurs produisent, on ne peut que s’alarmer sur l’état mental de leurs supporteurs.

En conclusion, Nul doute, si autrefois le football était un spectacle ludique collectif populaire, depuis plusieurs décennies il est devenu une véritable multinationale capitaliste où les joueurs sont achetés, vendus ou échangés comme des chevaux de course ou des call-girls de luxe. À l’ère de la mondialisation, l’achat et la vente des footballeurs s’apparentent à de modernes formes de traite d’êtres humains.

Le football professionnel brille par ses multiples prouesses mafieuses : escroqueries, caisses noires, dessous de table, salaires et primes non déclarés, faux en écriture, détournements, fraudes, truquages, etc. Toutes les normes capitalistes, valorisées dans le monde de l’entreprise, sont propagées dans l’univers du football : culte de la performance, dépassement de soi, virilité, force physique, victoire sur l’autre, etc.

Football :  agent de diversion social, soupape de sûreté pulsionnelle

En outre, le football est devenu un instrument de politique d’encadrement pulsionnel des foules, un moyen de contrôle social, une intoxication idéologique saturant tout l’espace public. À cet égard, il représente pour les États un idéal agent de diversion social, une soupape d’échappement permettant la dissolution de l’individu dans la masse grégaire anonyme, un terrain propice au conformisme des automates. Ces porteurs d’un ballon à la place du crâne ressemblent à ces animaux mus par un fonctionnement mimétique, instinctuel.

De nos jours, le football est devenu une véritable machine à décerveler les consciences, une entreprise de massification régressive des émotions, de chloroformisation des esprits, de crétinisation culturelle, de colonisation des conduites par le conformisme grégaire, de fanatisation des masses par les chauvinismes hystériques.

Le football sert d’exutoire à ces shootés du stade, toxicos du foot, décérébrés des stades. Le football, comme tous les sports de compétition, stimule l’agressivité, excite les rivalités, intensifie les tensions, attise les haines, exacerbe les conflits, déchaîne les violences, enflamme les foules fanatisées, exalte les chauvinismes, incite aux crimes, prédispose à la guerre. Il recèle même un ferment de radicalisme. Certains de ses fanatiques supporteurs ne sont-ils pas « fichés S », interdits de stade en raison de leurs activités violentes.

Décidément, l’opium footballistique s’apparente à la drogue islamiste où la violence est érigée en référent culturel, en sport international.

Dans le football, les explosions de bonheur s’apparentent davantage à des décharges pulsionnelles primaires bestiales qu’à des expressions de sentiments liés à une sociabilité pacifique fondée sur l’amour et la fraternité.

Le football est la meilleure école de la guerre (autre point commun avec l’islamisme belliqueux qui utilise non pas le ballon rond pour dynamiser les foules mais la bombe explosive pour dynamiter des populations civiles innocentes) : guerres des quartiers, des régions, des nations, guerres des maillots, des sponsors et des télévisions, guerres ethniques, guerres des supporteurs, transformées souvent en guerres civiles.

Par ailleurs, le football est un terreau fertile du racisme (dernier acte raciste, qui plus est en Algérie : l’attaquant nigérien du NC Magra, Soumana Boubacar Hainikoye, a été victime d’insultes racistes de la part d’une partie des supporteurs de l’équipe locale et des dirigeants du club, JS Saoura, selon les informations. En 2014, le joueur africain, l’attaquant camerounais, Ebossé, évoluant dans l’équipe de la JS Kabylie avait succombé après avoir reçu des projectiles lancés sur lui par des supporteurs), de la xénophobie, de l’antisémitisme, de l’exaspération des appartenances identitaires, de l’exaltation des différences, des crispations communautaristes, des haines amoureusement partagées dans les stades (encore des affinités électives avec l’islamisme qui aime partager son islam haineusement).

Assurément, ces dernières décennies, nous vivons à l’ère de l’horreur footballistique généralisée : violences, dopage, magouilles, crétinisme des supporteurs et des joueurs, etc.

Force est de relever que le football est belligène. Le football est la continuation de la guerre par d’autres moyens. Le football est la praxis de la polémologie, théorie de la guerre. Le football est devenu le dernier terrain d’affrontement direct entre pays antagonistes. Le football est une guerre de proxy. L’esprit d’invincibilité, incarné dans le moral de l’équipe de football soudée comme une troupe militaire, est l’élément capital qui permet de gagner ou perdre la guerre footballistique, autrement dit le match.

Pour conclure, nul doute, le football ne recèle aucune créativité artistique. Il est à l’art ce que la nuit est au jour : il n’offre aux yeux aucune lumière esthétique. La nuit sombre reproduit les mêmes ténébreux aveuglants et angoissants paysages minuscules dépourvus de tout horizon. Le jour au contraire offre au regard un majestueux illimité spectacle de la nature perpétuellement métamorphosée. Chaque matin une nouvelle chorégraphie naturelle ouvre le ballet de la danse du jour.

Monotone répétition mécanique des gestes techniques

Dans le football, il n’existe aucune créativité. C’est la monotone répétition de l’ancien, la répétition des mêmes gestes techniques rébarbatifs, la reproduction des mêmes schémas tactiques acquis au cours des entraînements. C’est l’éternel recommencement du même jeu appris mécaniquement lors des apprentissages-dressages des jeunes footballeurs soustraits tôt à l’école pour être livrés à des centres footballistiques disciplinaires, comme des esclaves. On se croirait à l’usine, soumis à la cadence et au chronomètre.

De surcroît, si la chorégraphie sur la pelouse se réduit aux ballets de la violence et des chocs brutaux, l’œuvre d’art, au contraire, incite à penser, invite à stimuler l’imagination, incline à varier sans fin les œuvres, à bouleverser constamment les règles de la création.

Si l’art s’inscrit dans un horizon infini de perspectives où l’imagination prend son envol pour atteindre le firmament de la création, le football, lui, s’exerce aux ras des pâquerettes dans un périmètre restreint où le seul enjeu est de projeter un ballon dans la lucarne.

Qui a dit que (seule) la religion est l’opium du peuple ?

Lire: Football : stade suprême de l’aliénation planétaire et terrain topique d’extériorisation de la violence (I)

Et: Football : stade suprême de l’aliénation planétaire et terrain topique d’extériorisation de la violence (II)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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